Le réseau Wassila a rendu public hier son «livre noir» au sujet des violences conjugales. Cette forme de violences parmi tant d'autres à l'égard du sexe dit «faible» prend des proportions alarmantes au sein de la société algérienne. Selon les chiffres avancés par les services de sécurité, 7 419 victimes ont été enregistrées durant l'année en cours par les services de police à l'échelle nationale. Parmi ce nombre, il y a 5 179 victimes de violences physiques, 277 victimes de violence sexuelle et 1 753 cas de mauvais traitements ainsi que 34 cas d'homicide volontaire et, enfin, 176 victimes de harcèlement sexuel, qui ont été enregistrés à l'échelle nationale. Selon la commissaire divisionnaire à la Direction générale de la Sûreté nationale Kheïra Messaoudène, citée par la Radio nationale hier, la violence intrafamiliale est le fait de l'époux en premier lieu, mais aussi du père, du frère et du fils. Or, ces chiffres officiels, qui font état de milliers de femmes victimes d'actes de violence, sont loin de refléter la réalité. Car il ne s'agit que des plaintes recensées par les seuls services de police, alors que la majeure partie des femmes victimes des violences conjugales ou familiales n'osent pas les porter en public, encore moins devant la justice. Ce qui n'empêche pas la multiplication des actes d'intolérance et d'agression contre les femmes, dont celles travaillant à Hassi-Messaoud en ont fait les frais, suite auxquels est né un collectif composé de plusieurs associations, de centres de recherche et de femmes chercheurs qui plaident pour la criminalisation des violences à l'égard des femmes. «Parce qu'il y a encore des femmes qui paient de leur vie à cause de la violence et du silence de l'entourage» qu'est née l'idée «d'aider ces femmes qui vivent continuellement dans la peur», pour laquelle activent nombre d'associations de par le monde. Une initiative lancée à cet égard sur un réseau social a réuni jusqu'à présent 431 260 membres. En Algérie, le collectif, dénommé «Stop à la violence, des droits des femmes maintenant», s'est fixé comme objectif de faire pression sur les dirigeants et les amener à promulguer des lois protégeant les Algériennes de toute violence. L'Association algérienne de planification familiale, présidée par Mme Aberkane qui en fait partie, à côté du réseau Wassila qui a mis en place un service d'écoute téléphonique ouvert cinq jours sur sept pour recueillir la parole des victimes, vise, outre la protection les femmes contre toute forme de violence, à sensibiliser le grand public sur la question. Ce collectif cherche également à amener les pouvoirs publics à respecter leurs engagements quant à la mise en œuvre de «la stratégie nationale de lutte contre les violences à l'égard des femmes». L'Association algérienne de la planification familiale (AAPF) a annoncé que le collectif «Stop à la violence, des droits des femmes maintenant» organise, le 25 novembre prochain à Alger, un colloque international portant sur une «loi-cadre relative aux violences faites aux femmes». Cette rencontre, qui coïncidera avec la célébration de la Journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes, servira à présenter des propositions de lois visant à protéger les Algériennes, conformément aux conventions internationales, notamment le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes que l'Algérie a ratifié en 1996, et aux recommandations des Nations unies, dont le Comité des droits économiques, sociaux et culturels qui a préconisé d'éliminer toutes les formes de discrimination contre les femmes et d'adopter des mesures pour réduire le taux de chômage des femmes et des jeunes. Pourtant, l'Algérie fait partie des rares pays dans la sphère arabo-musulmane qui peut se targuer d'avoir promulgué sa loi fondamentale, afin de constitutionnaliser la promotion des droits politiques et économiques de la femme. R. I.