Photo : A. Lemili De notre correspondant à Constantine A. Lemili «Il s'agit de trente ou peut-être trente-deux locaux en tout». De part et d'autre du conflit commercial qui pourrit leur quotidien, autrement dit entre les membres de la commission des œuvres sociales de l'Université des Frères-Mentouri et les locataires, il y a quand même unanimité sur l'imprécision du nombre de commerces aujourd'hui menacés d'être «libérés» par voie de justice. Mais en attendant, l'administration a déjà pris une longueur d'avance sur le résultat improbable du bras de fer. Elle a tout simplement coupé le… courant électrique à ses vis-à-vis. Et suspendre la fourniture d'énergie électrique à des commerces qui ne peuvent qu'en vivre essentiellement, c'est très certainement avoir réussi à toucher là où cela fait vraiment mal et plus particulièrement au tiroir-caisse. Et ce, même si les plus grandement pénalisés sont à l'évidence les milliers d'étudiants dont l'exercice quotidien est d'abord de photocopier des documents. Pour les commerçants, en raison du noir absolu qui peut régner même en cours de journée, c'est d'être victimes de larcins d'objets souvent minuscules mais parfois très coûteux. Surtout si leur nombre se multiplie.Voilà donc plantés décor et casting de ce qui vient rappeler ce qui est un trait génétique des responsables à hauteur d'institutions publiques importantes et ce qu'est la mauvaise gestion et notamment l'alibi derrière lequel ils se sont réfugiés jusque-là : l'instabilité chronique du pays lors de la décennie noire. Ce qui se passe à hauteur des locaux implantés au sein de l'université Mentouri ressemble «pile poil» à ce qu'a vécu, il y a huit ans, l'Entreprise de gestion des structures aéroportuaires (EGSA) avec les siens (locaux) implantés à l'aérogare Mohamed Boudiaf et surtout le recours au même procédé (suspension de l'énergie électrique et du gaz).A hauteur de l'université Mentouri, les deux parties jurent avoir raison et forcément ont, toutes les deux, tort et raison dans la mesure où la précipitation de l'administration à récupérer à la hussarde ses biens et l'obstination des locataires à continuer à jouir d'un loyer anachronique compte tenu de la réalité ne peut que mener à une solution logique, légale, et réglementaire où très certainement l'une des parties devrait y laisser des… plumes. Certains des locataires jurent disposer même si, étrangement, ils ne l'ont pas sous la main, du contrat de location et que celui-ci a été établi auprès de notaire par bail notarié pour une durée dite de 3, 6, 9 ans avec tacite reconduction. L'éventualité d'une révision des prix est évoquée mais elle ne saurait dépasser 10% à chaque renouvellement de bail et enfin toutes les commodités liées à la disponibilité d'une bonne prestation de services demeurent à la charge de l'administration. Elles sont loin d'être anodines et moindres, les charges en question sachant qu'il s'agit de la fourniture d'eau, de gaz et d'électricité lesquelles entre-temps, est-il besoin de le souligner, ont été multipliées sans doute par dix ces quinze dernières années. Or, les locataires continuent à payer dans leur majorité des loyers dérisoires dont le plus significatif est celui de 30 000 dinars par an. Ce qui à titre indicatif est proche de la facture de gaz et d'électricité du plus ordinaire des ménages algériens. Le problème est donc plus que vraisemblable et la situation, on ne peut plus burlesque.A contrario, si des commerçants jurent disposer de contrat de location notarié, nous n'en avons pas trouvé qui peuvent le justifier sur place. Et pour cause ? La réponse nous est fournie par les membres de la commission des œuvres, celle-ci même par qui le… scandale est arrivé. «Il est des cas de figure où il est impossible de retrouver le premier bénéficiaire du local compte tenu des sous-locations qui en parsèment l'existence». Nous saurons ainsi que si l'administration a décidé de l'augmentation des loyers, les locataires officieux auraient été également relancés par leurs loueurs pour une augmentation de loyer (sic). Il n'en demeure pas moins que les conditions de cession pour une bouchée de pain et surtout grâce à l'entregent des uns et des autres, de leurs affinités et relations amicales ou d'affaires ont réellement besoin d'être revues et le dossier dépoussiéré tant les pouvoirs publics s'y perdent actuellement. «Nous admettons qu'il y a eu erreur sur toute la ligne cette dernière décennie et cela ne nous empêche pas de prendre des mesures pour redresser la situation. Le plus grave et impardonnable serait de laisser perdurer une telle situation». Ce sont là les propos sans équivoque des gestionnaires et élus de la commission des œuvres sociales dont le souci premier est de redonner les cartes et soumettre les commerçants à de nouvelles règles commerciales assises sur une durée renouvelable annuellement et selon des conditions comme le strict respect des dispositions du cahier des charges et donc, et surtout, la possibilité de résilier la relation de part et d'autre pour peu que la décision soit notifiée par un préavis de trois mois.Conclusion : tout ce qui se passe actuellement n'est en réalité qu'escarmouches entre, si l'expression est permise, menu fretin. La mesure sujette à controverse a été prise à hauteur du ministère de tutelle des universités et il n'est pas à exclure que ledit département ait commis un péché de précipitation sans s'être entre-temps assuré de ne pas avancer en terrain inconnu. C'est ce que déterminera et ce que statuera certainement la justice en ce sens qu'il ne saurait y avoir une autre issue de sortie. L'administration cherchant à passer vaille que vaille en force en multipliant formidablement les loyers et les locataires de s'arc-bouter sur une position qu'ils estiment à leur avantage.Et enfin la rumeur, parce qu'il en faut une, laisse entendre que les locaux seront attribués même au prix fort et cela n'est pas exclu non plus, à des personnes qui piafferaient d'ores et déjà de faire le siège des lieux. C'est dire qu'il semble exister un filon.