Quatre Algériens ont tenté de s'immoler ces cinq derniers jours, dont l'un est décédé suite à ses blessures. Le premier cas a été signalé mercredi dernier à Bordj Ménaïel. Les deux autres se sont produits à Tébessa et à Jijel, alors que la dernière tentative a eu lieu à Mostaganem.Des hommes, des pères de famille pour certains, sains d'esprit et de corps, ont tenté de mettre fin à leur vie. De la pire des manières : se brûler vifs. Ce choix de s'immoler - de surcroît au sein ou face à des institutions - se veut un message fort à tous ceux qui refusent encore de le décrypter. Pourtant, face aux événements qui secouent les régimes arabes, il ne s'agit pas uniquement d'un acte de désespoir. Non. Mohcin, Saïd et les autres ont voulu lancer un cri à qui veut l'entendre. Combien de morts faut-il en Algérie pour que les décideurs entendent leur peuple ? Pour quel objectif inavoué laisse-t-on pourrir la situation ? Pousse-t-on au déclenchement d'un soulèvement populaire ? Ne suffit-il pas à l'Algérie les morts d'Octobre 88, ceux du Printemps noir, du terrorisme ou encore des dernières émeutes qui ont mis à feu plusieurs régions du pays ? Ne suffit-il pas aux Algériens d'enterrer leurs enfants, partis à l'aventure sur des barques de fortune avant d'être «vomis» par la Méditerranée ?A tous ces questionnements, aujourd'hui, il n'y a pas de réponse. Il n'y a plutôt pas de dirigeant qui veuille bien regarder en face la réalité amère de la dégradation de la vie de tout un peuple. Un peuple qui n'aspire qu'à vivre dignement. Il n'y a pas de dirigeant qui accepte de prendre ses responsabilités pour s'adresser à cette jeunesse en mal de vivre.Le seul écho qui parvient à la société : un silence de mort qui ne peut être traduit que par le mépris.Car les Algériens n'attendent pas que le prix du sucre soit fixé à 90 DA ou encore celui de l'huile à 120 DA. Ils ne cherchent pas des donneurs de leçons qui les qualifient de «voleurs». Le citoyen algérien refuse de vivre d'eau fraîche et de promesses, alors que ses réserves de changes dépassent les 150 milliards de dollars.Le soulèvement d'un peuple est peut-être spontané, mais certainement pas un acte irréfléchi. Il est toujours précédé de signes avant-coureurs. Ces signes sont lancés aujourd'hui, et il est primordial de les intercepter. Pas seulement en Algérie, mais un peu partout dans le monde arabe où les régimes, pour ne pas dire les monarchies, pensent avoir, après une si longue période de règne, dompté les peuples. La «révolte du Jasmin» a eu l'effet d'un séisme qui a ébranlé les confortables trônes sur lesquels ils s'étaient vautrés. Elle a réveillé ceux qui semblent avoir oublié qu'ils ont été élus par un peuple pour le représenter et non pas l'opprimer. Car quand le peuple décide de se réapproprier sa parole, son histoire, sa culture, rien ne saura l'arrêter. H. Y.