Les partis politiques libanais semblent se diriger inexorablement vers une confrontation aux conséquences dramatiques. Chaque côté durcissant ses positions après l'échec des efforts de médiation. Saad Hariri a surpris son monde en annonçant, lors d'un discours à la nation, sa candidature au poste de Premier ministre malgré la gravité de la situation. Le Liban est divisé depuis des mois au sujet du fameux Tribunal spécial pour le Liban (TSL) chargé de trouver et de juger les responsables de l'assassinat, en 2005, de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri. Les déclarations de Hariri sonnaient comme un acte de défiance après la décision de la Turquie et du Qatar de suspendre leur médiation destinée à débloquer la crise. L'Arabie saoudite annonce dans la foulée qu'elle abandonnait également sa médiation avec la Syrie. Tous les regards se tournent alors vers le leader druze libanais Walid Joumblatt, qui apparaissait comme l'ultime arbitre entre les deux camps. Son bloc parlementaire compte onze députés, parmi lesquels cinq chrétiens et un sunnite. S'il réunit suffisamment de soutiens parmi ses députés, il pourrait permettre à l'opposition d'imposer son candidat au poste de Premier ministre. Et c'est Omar Karamé, ayant déjà été Premier ministre à deux reprises, qui a les faveurs de l'opposition. Le Hezbollah compte 57 sièges au sein du Parlement, contre 60 pour la coalition de Hariri. Le parti de Nassrallah aura besoin des voix de huit députés en dehors de son alliance pour imposer ses vues. Le risque d'une déflagration interconfessionnelle est palpable. La crise libanaise s'est durcie quand, le 12 janvier, onze ministres de l'opposition claquent la porte, provoquant la chute du gouvernement de Saad Hariri qui refuse de désavouer le pourtant peu crédible TSL. Le Hezbollah a averti qu'il se défendra contre toute charge de ce Tribunal à la nature politique évidente. Lundi dernier, à La Haye, le procureur du TSL, le Canadien Daniel Bellemare, a présenté au juge de la mise en état, le Belge Daniel Fransen, un acte d'accusation confidentiel. En attendant que l'acte soit rendu public, le président libanais Michel Sleimane doit entamer lundi prochain des consultations avec les groupes parlementaires pour la nomination d'un nouveau Premier ministre. Selon le système en vigueur au Liban, le président doit être chrétien maronite, le Premier ministre musulman sunnite et le président du Parlement musulman chiite. Le camp pro-occidental a laissé entendre qu'il refuserait de participer à un gouvernement dirigé par le Hezbollah et ses alliés en cas d'échec de Saad Hariri. La crise politique a provoqué des appréhensions dans tout le Liban. En mai 2008, des combats entre sunnites et chiites avaient fait une centaine de morts. Le spectre de la guerre civile n'a jamais été aussi menaçant. M. B.