Photo : A. Lemili De notre correspondant à Constantine A. Lemili Rares seraient à Constantine ceux qui, il y a trois mois, auraient misé un kopeck sur la longévité de la contestation des sections syndicales d'Algérie Télécom, Algérie Poste et de la Seaco qui auront été sans doute derrière une levée de boucliers contre les caciques de l'Union de wilaya UGTA. Une protestation inscrite dans la durée depuis un peu plus d'un bimestre et qui, dans la foulée, allait fédérer quatre-vingt autres sections, voire plus. La preuve en a été apportée jeudi passé au cours d'une assemblée générale qui s'est tenue, non sans de sérieux heurts, à la maison des syndicats Abdelhak-Benhamouda. La commission provisoire de wilaya, créée le jeudi 10 février, est ainsi parvenue à agréger autour de son action-programme quatre-vingt structures.Des heurts dans la mesure où, compte tenu de la scission qui caractérise l'Union de wilaya depuis plus d'une année, ceux qui sont accusés d'être opposés à tout renouvellement des structures, aussi bien internes qu'au sein des entreprises économiques, et de la tenue d'un congrès de wilaya en vue de la désignation des délégués appelés à représenter Constantine au congrès national, et qui sont derrière le pourrissement de la situation, n'ont pas hésité à faire appel à des «jaunes», ces casseurs d'actions ouvrières, pour intimider les syndicalistes. Ces derniers ont répondu à l'appel de la commission provisoire de wilaya visant à rétablir une activité normale au sein de l'Union de wilaya dans le but d'engager l'organisation dudit congrès au sens où celle (commission) désignée par la Centrale syndicale s'évertuait à dessein à traîner en longueur, soit plus d'une année déjà, ses travaux. Un congrès qui, s'il est tenu, mettra en difficulté les intérêts énormes d'un quarteron de dinosaures.En s'abstenant d'intervenir, la Centrale syndicale, et pour cause «les complicités largement établies» de ses cadres avec ledit quarteron, «n'arrête pas d'orchestrer un pourrissement de la situation, donnant aux Arafa, Boudiaf, Boumendjel et Boufenara un sentiment d'impunité qui n'a d'égale que leur propension à la prédation», soutiendront à l'unanimité, au cours de leur intervention, les intervenants au débat général. D'où, justement, une mise en garde réitérée à plusieurs reprises et adressée au secrétaire général de l'UGTA : «Sidi Saïd, dans les jours à venir, assumera toutes les conséquences de ses atermoiements et une politique de l'autruche qui ne dit pas son nom, alors qu'il ne peut être sans savoir les abus et passe-droits qui prévalent à Constantine. Ceci d'autant plus que la presse n'a eu de cesse de faire ses choux gras des turbulences qui agitent l'UW. Le SG doit descendre de son nuage et se souvenir que si Constantine existe, c'est parce qu'elle dérange et le mérite en revient à des cohortes de travailleurs et de délégués qui luttent sans désemparer pour la préservation de l'outil de travail, de l'emploi parfois au détriment de leur propre vie de famille.»En tout état de cause, l'assemblée générale de jeudi passé a laissé voir un réel engagement des syndicalistes présents, mais aussi une maturité dans le propos qui n'est pas sans inspirer les grands moments d'un syndicalisme renaissant. C'est d'ailleurs dans cet ordre d'idées que le représentant du secteur des finances insistera sur «le renouvellement des hommes par le départ de ceux qui se fossilisent actuellement à la maison des syndicats Abdelhak-Benhamouda. Constantine a été le bastion de la lutte du monde du travail et la rampe de lancement du syndicalisme algérien. Elle doit retrouver cette aura pour la simple raison que c'est une question de légitimité historique».L'assemblée générale de jeudi dernier a eu le mérite de déroger à celles qui avaient pour habitude de se tenir dans la mesure où avec beaucoup de passion, Houria B., cadre de Naftal, a apporté un témoignage courageux sur sa condition de femme qui plus est cadre ayant demandé la rupture avec les pratiques népotiques des pontes de l'UW, leur interventionnisme contraire aux dispositions statutaires de l'UGTA, leur arrogance et leur mépris de la morale, comme elle a courageusement dénoncé les méthodes inquisitoires d'une administration de l'entreprise en collusion avec le syndicat maison, relayée par les services de police, auxquels elle a eu affaire au cours d'une cabale montée contre elle. Elle évoquera en connaissance de cause «un grand trafic dans le recrutement à Naftal impliquant des agents de l'Anem».En tout état de cause, les quatre-vingt-quatre délégués présents à l'assemblée générale en sont arrivés à la conclusion qu'il ne suffit plus de palabrer et que seule l'action paye. Ils tiendront à partir de jeudi prochain, et tous les jeudis qui suivront, une assemblée générale jusqu'à ce que les locataires du bâtiment de la place du 1er-Mai sortent de leur mutisme. A défaut, ils s'érigeront, faute d'interlocuteur au niveau central et compte tenu de la vacance des responsabilités au niveau local, en commission de wilaya non plus provisoire, mais effective pour organiser le congrès et, n'en déplaise à quiconque, désigner leurs délégués au congrès national. Les évènements n'arrêtent pas de se précipiter depuis quelques semaines dans une crise qui aurait eu du mérite à être réglée avant d'atteindre un point de non-retour. Mais, vraisemblablement, l'autisme du secrétaire général de l'UGTA et de ses collaborateurs directs, notamment Djenouhat nommément et régulièrement cité, ne risque pas de permettre une telle avancée.Le communiqué n°2 est rédigé et lu sur place pour être soumis à l'approbation des élus. Il contient six points qui proposent substantiellement au secrétaire de l'UGTA la plus grande célérité dans l'étude et le traitement du dossier de l'UW Constantine, l'organisation dans de rapides délais du congrès de wilaya, le gel des activités de l'ensemble des sections syndicales locales jusqu'à la tenue du congrès, l'organisation d'une conférence de wilaya des cadres syndicalistes et l'écoute attentive de leurs préoccupations. Par ailleurs, les rédacteurs confirment le refus de l'ensemble des sections syndicales de collaborer avec la commission de wilaya installée par la Centrale syndicale et annoncent, enfin, la tenue d'un sit-in élargi aux travailleurs des entreprises concernées le jeudi 24 février. En conclusion, les rédacteurs du communiqué affirment leur confiance au SG de l'UGTA s'en remettant à la décision salutaire qu'il est appelé à prendre afin d'éviter une éventuelle confrontation.Soulignons qu'une forte mobilisation policière était visible aux alentours de la maison des syndicats. Les immuables locataires des lieux ont tenté par tous les moyens d'interdire l'accès aux représentants des travailleurs venus assister à l'assemblée générale, et tous les moyens de dissuasion ont été tentés pour faire avorter leur rencontre. Jusqu'à l'agression physique et la fermeture de la grande salle de réunions.