L'état d'urgence en vigueur depuis le 9 février 1992 a été officiellement levé. Un projet d'ordonnance adopté hier en Conseil des ministres abroge le décret législatif du 6 février 1993 qui a prorogé l'état d'urgence pour une durée indéterminée. La lutte antiterroriste relève toujours du ressort de l'Armée nationale populaire (ANP). Un projet d'ordonnance, modifiant et complétant la loi n° 91-23 du 6 décembre 1991 relative à «la participation de l'ANP à des missions de sauvegarde de l'ordre public hors des situations d'exception», a été également adopté. Le texte confirme l'ANP dans son rôle de fer de lance de la lutte antiterroriste. Il «confirme que la conduite et la coordination des opérations de lutte contre le terrorisme et la subversion sont prises en charge par l'état-major de l'armée nationale populaire». Les modalités d'exécution seront précisées par «arrêté conjoint» des ministres de la Défense et de l'Intérieur. En matière de lutte antiterroriste, l'abrogation de l'état d'urgence et la confirmation de l'ANP dans son rôle de conduite et de coordination ne «créent aucune situation nouvelle». La nouveauté réside toutefois dans l'instauration d'une protection d'inculpés qui fournissent des renseignements opérationnels susceptibles de faire avancer les investigations de la justice et à prévenir des actes terroristes. Les inculpés poursuivis pour terrorisme sont placés sous la protection d'un juge d'instruction qui fixe cette protection dont la durée est de trois mois, renouvelable deux fois. Sa mise en œuvre «sera entourée de toutes les garanties prévues par la Constitution et les instruments internationaux ratifiées par l'Algérie», précise le Conseil des ministres. La levée officielle de l'état d'urgence pose nécessairement un certain nombre de questions politiques. La première d'entre elles concerne la liberté de manifester, notamment à Alger où la Commission nationale pour le changement et la démocratie veut ritualiser les samedis de la démocratie. Etant donné que le décret n° 92-44 du 9 février 1992 instaurant l'état d'urgence est abrogé, les autorités algériennes interdiront-elles les manifestations pacifiques pour le changement démocratique en les jugeant préalablement attentatoires à l'ordre public, à la stabilité des institutions et à la paix civile ? Affaire à suivre. N. K.