De petits stimulateurs implantés dans le cerveau semblent porteurs d'espoir pour les personnes atteintes de certaines maladies psychiatriques rebelles aux traitements habituels. Reste à déterminer l'endroit précis où les introduire.La stimulation cérébrale profonde, ou SCP, a déjà prouvé son efficacité dans le traitement du tremblement de la maladie de Parkinson, mais bloquer une maladie mentale n'est pas aussi simple. Les scientifiques veulent élargir la recherche dans ce domaine, notamment dans les formes graves de dépression, les TOC (troubles obsessionnels compulsifs) et le syndrome de Gilles de la Tourette, afin de mieux savoir comment les utiliser avant que trop de médecins et de patients ne veuillent y avoir recours.Cela ne signifie pas de toute façon la fin des traitements traditionnels, tout comme les personnes qui reçoivent une prothèse de la hanche ont besoin de rééducation, remarque le Dr Helen Mayberg, de l'Emory University. «Une fois que vous retrouvez votre cerveau, il faut apprendre à vous en servir», a-t-elle souligné la semaine dernière lors du Congrès annuel de l'American Association for the Advancement of Science. Environ 70 000 personnes dans le monde ont reçu une SCP pour traiter une maladie de Parkinson ou un autre trouble moteur quand les traitements standards ne marchaient pas, selon Michael Okun de l'Université de Floride, un des principaux chercheurs à la conférence. Comment cela fonctionne-t-il ? Les chirurgiens implantent une électrode en profondeur dans le cerveau. De petites secousses électriques émises par un stimulateur placé près de la clavicule et transmises à l'électrode désactivent alors les cellules nerveuses hyperactives, ce qui supprime le tremblement.Les scientifiques ont déterminé la région à cibler en se fondant sur la chirurgie qui, en détruisant des bouts de tissu cérébral, peut améliorer les formes de Parkinson les plus graves. Mais dans la SCP, les électrodes ne détruisent pas de tissu. Les signaux électriques peuvent être adaptés, voire stoppés s'ils sont inutiles ou entraînent des effets secondaires neurologiques.Selon les scientifiques, les maladies psychiatriques nécessitent une intervention similaire, sans qu'ils sachent pour l'heure où implanter l'électrode dans le cerveau. Deux fabricants, Medtronic et St Jude Medical, ont commencé à évaluer à grande échelle les effets de la SCP dans la dépression profonde. Chaque fabricant a implanté les électrodes à un endroit différent, en fonction d'essais-pilotes prometteurs. En 2009, l'agence américaine du médicament Food and Drug Administration (FDA) a donné son feu vert à la version Medtronic pour un petit groupe de patients atteints de TOC réfractaires à tout traitement, dans le cadre d'un programme spécial autorisant la vente d'appareils destinés au traitement des maladies rares avant que leur efficacité soit définitivement établie. Ce qui inquiète toutefois le Dr Joseph Fins, responsable de l'éthique médicale au New York Presbyterian Hospital, qui craint que d'autres patients ne tentent de se procurer ces électrodes à 30 000 dollars sans passer par des essais stricts. Les chercheurs souhaitent la mise en place d'un registre de suivi des bénéficiaires et restent prudemment optimistes. Un peu plus de 60 personnes souffrant de TOC rebelles ont bénéficié d'une SCP depuis 2000, a déclaré Benjamin Greenberg, psychiatre à l'Université Brown qui conduit une vaste étude financée par l'Institut national de santé mentale. Environ les trois quarts de la première douzaine de patients étudiés se sont légèrement améliorés, certains pendant huit ans. «Vous avez toujours un fardeau, mais vous pouvez vivre», résume-t-il.Ce sont des gens qui essaient de soulager leur peur ou leur anxiété par des comportements obsessionnels, comme de se laver les mains ou vérifier s'ils ont bien fermé la porte de multiples fois, explique le Dr Greenberg. Beaucoup d'entre eux n'ont du coup plus le temps de sortir de chez eux et la thérapie comportementale a échoué. Un obstacle important à la SCP toutefois : la batterie, placée près de la clavicule, dure moins de deux ans. Elle se change en chirurgie ambulatoire (entrée et sortie de l'hôpital le même jour), mais cela a conduit environ un tiers des patients étudiés à arrêter leur suivi. Le Dr Greenberg teste un modèle qui peut se recharger tous les quelques jours.Sur 100 patients testés avec une dépression sévère, la moitié environ va mieux, quel que soit l'endroit d'implantation de l'électrode, selon le Dr Mayberg. Elle étudie désormais ce que les cerveaux traités avec succès ont en commun qui pourrait aider à repérer les meilleurs candidats. AP