Synthèse de Amel Bouakba Le vent de révolte continue de souffler sur la Jordanie. Hier, des milliers de personnes ont manifesté à Amman pour dénoncer les violences et réclamer des réformes constitutionnelles. Contrairement à vendredi dernier, où des partisans du régime avaient attaqué les manifestants, le rassemblement, le plus grand organisé dans la capitale depuis le déclenchement du mouvement de contestation en Jordanie, en janvier, s'est déroulé dans le calme, ont rapporté des agences de presse. Dix mille personnes, selon les organisateurs, 6 000 selon la police, manifestaient pour une «journée de la colère» à l'appel de l'opposition et de la société civile. Trois mille membres des forces de sécurité ont été déployés pour éviter des violences, a affirmé un haut responsable des services de sécurité. L'opposition tente de faire pression sur le roi par cette «journée de la colère» pour un engagement rapide des réformes. «Toute la Jordanie veut des réformes constitutionnelles urgentes, un gouvernement parlementaire et un vrai Parlement représentatif du peuple», a déclaré cheikh Hamzeh Mansour, chef du Front de l'action islamique (FAI) principal parti d'opposition et émanation des Frères musulmans. Les manifestants ont scandé des slogans pour dénoncer la «corruption à tous les niveaux» et pour un «retour à la Constitution de 1952». La Constitution adoptée en 1952 par le roi Talal, grand-père du roi Abdallah II, a été amendée 29 fois depuis, donnant des pouvoirs plus grands à la monarchie. «Nous voulons des réformes, une vraie monarchie parlementaire», a indiqué de son côté un syndicaliste, Maissara Malass. «Nous manifestons contre la violence et le recours à des voyous pour empêcher nos protestations», a-t-il ajouté, en référence à la journée de vendredi dernier lors de laquelle des partisans du régime avaient blessé plusieurs manifestants. Plus d'une centaine de partisans du régime étaient là hier mais la police les a maintenus à distance afin d'éviter une répétition des troubles. «Nous sommes contre les manifestations qui donnent une mauvaise image de notre pays», a affirmé l'un d'entre eux. Un haut responsable des services de sécurité a souligné que «trois personnes ont été arrêtées et sont accusées d'être impliquées dans les violences de vendredi dernier». Les manifestations de la colère se sont poursuivies dans le reste du pays où près de 2 000 personnes se sont rassemblées notamment à Irbid (nord) et Karak (sud) pour dénoncer la corruption et appeler à des «réformes sérieuses». Les manifestations avaient commencé en Jordanie en janvier pour protester contre l'augmentation du coût de la vie. Pour calmer la rue et désamorcer la contestation, le roi Abdallah II avait limogé, le 1er février, son Premier ministre et s'est engagé à des réformes politiques et économiques. En janvier, le gouvernement avait également annoncé le déblocage de près de 500 millions de dollars pour augmenter les salaires des fonctionnaires et les pensions des retraités, favoriser l'emploi et faire baisser les prix. Mais le processus des réformes évalue trop lentement, aux yeux des membres du parti d'opposition.