De plus en plus d'enfants sont confrontés aux troubles déficitaires de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) en Algérie, un fléau dangereux dont les répercussions sont inéluctables et qui mériterait plus d'attention. C'est le cri d'alerte de Meriem Yousfi Hamada, psychologue, thérapeute de famille et membre actif de l'association d'aide des enfants hyperactifs et de leur famille. Dans cet entretien, elle nous livre ses appréhensions sur un phénomène qu'il ne faut surtout pas prendre à la légère, au vu de ses conséquences dramatiques sur «l'avenir de l'enfant, sa vie scolaire, sociale et familiale», dit-elle. «L'enfant hyperactif est un enfant dont l'activité motrice est augmentée et désordonnée, accompagnée d'impulsivité, de réactions agressives et de troubles de l'attention, ce qui perturbe sérieusement son efficience scolaire. L'enfant hyperactif présente des troubles de l'attention, de la perception, de la conceptualisation, du langage, de la mémoire, de la coordination et des dyspraxies qui entraînent une incapacité ou un retard d'apprentissage. Par ses conséquences sur la vie scolaire, sociale et familiale, le TDAH représente le plus sévère des troubles touchant l'enfant avant l'âge de 7 ans. Il s'agit d'un trouble chronique du développement qui est souvent accompagné de troubles anxieux et de dépression et s'associe fréquemment à des troubles de l'apprentissage, de dyslexie, de dyscalculie, de troubles oppositionnels, de troubles de la conduite et de troubles du sommeil. Il est d'autant plus inquiétant que les enfants atteints de TDAH sont souvent victimes d'échec scolaire. Quant aux adolescents qui en sont atteints, seuls 20% d'entre eux ont une scolarité normale», d'après notre psychologue. En fait, toute leur vie familiale est fortement perturbée du fait que ces enfants sont souvent rejetés et auront beaucoup de difficultés à s'insérer dans leur vie socioprofessionnelle. Pour cerner ce fléau jusque-là ignoré des pouvoirs publics, mais aussi et surtout sensibiliser, informer et accompagner les enfants et leur famille, cette association qui a vu le jour en 2004 (elle n'a eu son agrément qu'en 2007), ne cesse depuis de faire un travail d'information sur le terrain auprès du grand public et des professionnels de l'éducation nationale et de la santé, particulièrement les médecins scolaires à travers, notamment des conférences, des sessions de formation. «Ecouter et soutenir les personnes concernées par le TDAH, former et coordonner le réseau des bénévoles qui répond chaque jour aux demandes des familles», sont entre autres objectifs de notre association, indique notre psychologue Meriem Yousfi Hamada. «Nous n'avons pas de statistiques sur le nombre d'enfants touchés par ce phénomène, mais d'après les études réalisées dans le monde, entre 3 à 5% d'enfants scolarisés soufrent de TDAH, ce qui est fort inquiétant, dit-elle, sachant que l'Algérie compte 8 millions d'élèves, c'est soit quelque 80 000 d'entre eux qui sont atteints de ce trouble». Notre psychologue regrette qu'il n'y ait pas une prise en charge réelle de ce trouble. «L'idéal, dit-elle, c'est qu'il y ait une collaboration avec le ministère de la Santé et celui de l'Education nationale.» L'association composée, entre autres, de psychologues, d'orthopédistes et de psychomotriciens travaille en réseau avec des services de pédopsychiatrie, notamment à l'hôpital psychiatrique de Chéraga, au centre de pédopsychiatrie et de thérapie familiale de Dely Ibrahim et celui de Garidi II. D'autre part, l'association se déplace dans les écoles privées pour faire un travail de sensibilisation et de dépistage de TDAH. «Contrairement aux écoles publiques, dans les écoles privées nous n'avons pas besoin d'autorisation, ce qui nous facilite notre tâche», explique notre interlocutrice. Apparemment, les pouvoirs publics commencent peu à peu à montrer de l'intérêt à cette pathologie. «Le ministère de l'Education nous a contactés pour une esquisse de projets», précise notre psychologue. «Mais notre revendication phare concerne la nécessité du dépistage scolaire du TDAH, d'autant que c'est là une cause de l'échec scolaire et de l'exclusion et entraîne irrémédiablement la délinquance», ajoute-t-elle. «Il y a bien le dépistage en milieu scolaire de certaines maladies telles que l'asthme, pourquoi n'y aurait-il pas celui du TDAH ?» préconise-t-elle. Selon elle, «il est impératif de dépister ce trouble chez l'enfant et de le traiter. Le traitement et le suivi doivent se faire sur plusieurs axes par une équipe pluridisciplinaire». Ainsi, il est conseillé de prendre en charge l'enfant pour des rééducations en orthophonie, en psychomotricité, selon le bilan, l'aider dans ses difficultés scolaires par un soutien spécifique et la mise en place d'aménagements pédagogiques, l'aider à mieux gérer ses émotions, lui apprendre à se contrôler au moyen d'une thérapie cognitive et comportementale. Enfin, le traitement médicamenteux est envisagé pour les formes sévères et moyennes de TDAH. «Le traitement médicamenteux est désormais disponible en Algérie depuis environ deux ans, et il n'y a pas de risque d'accoutumance», dit-elle, insistant sur l'intérêt de consulter un spécialiste au premier signe du trouble du comportement. A. B. Ce qu'il faut savoir Le TDAH est caractérisé par des difficultés à se concentrer (je suis très facilement distrait), une impulsivité marquée (j'agis avant de réfléchir), une agitation incessante (je bouge trop et je ne peux pas m'en empêcher). Ces trois symptômes, inattention, impulsivité et hyperactivité, peuvent se trouver ensemble ou séparément. Un enfant peut présenter les signes suivants : hyperactivité et impulsivité sans déficit de l'attention. Une inattention sans hyperactivité ; il peut même être hypoactif. Une hyperactivité en plus de l'impulsivité et du déficit de l'attention. Cependant, aujourd'hui, l'élément le plus important du trouble est le déficit de l'attention. Il faut savoir que le tiers des enfants hyperactifs commenceront à avoir des problèmes de comportement dès leur première année de vie : il pleure plus souvent et plus longtemps, a de la difficulté à s'alimenter, est plus actif et dort moins. Ainsi, dès l'âge de 6 ans, les enfants hyperactifs peuvent présenter un certain nombre de symptômes, comme le manque d'attention soutenue, une incapacité à se concentrer, une instabilité émotionnelle, une impulsivité, une difficulté à obéir, des signes neurologiques mineurs comme incoordination motrice fine. La manifestation dans le comportement qui différencie l'enfant hyperactif de l'enfant normal est l'impossibilité à soutenir l'attention sur des tâches et des buts déterminés. Elle s'accompagne de lassitude, de manque de concentration, d'étourderie, de maladresse, de troubles de l'apprentissage de la lecture. Les symptômes du TDAH engendrent dans la majorité des cas de gros problèmes scolaires. Un enfant hyperactif non diagnostiqué vit un véritable cauchemar : perturbation de la classe et rapports difficiles avec l'enseignant, rejet par ses camarades. Sans compter les conflits familiaux. Par rapport à des enfants non hyperactifs d'intelligence comparable, les enfants hyperactifs ont trois fois plus de risque d'être confrontés à l'échec scolaire. Mais un enfant qui bénéficie d'un traitement et d'une prise en charge adéquate pourra s'épanouir et suivre un cursus scolaire normal. On estime, aujourd'hui, que l'hyperactivité affecte entre 3 et 6% des enfants d'âge scolaire avec une prépondérance chez les garçons, mais les filles souffrant de TDAH sont plus difficiles à diagnostiquer. La majorité des enfants hyperactifs (70%) garderont ce syndrome à l'âge adulte. C'est à l'âge scolaire que se révèle, par comparaison avec les autres enfants du même âge, l'instabilité psychomotrice. Le comportement hyperactif est un degré inhabituel d'agitation motrice sans objet et non dirigée vers un but spécifique et intentionnel. Cette activité excessive interrompt l'attention et la concentration de l'enfant et gêne son aptitude à effectuer des travaux structurés. L'enfant a du mal à rester assis sur son banc. Son attention est détournée par le moindre petit bruit. Il ne peut se concentrer sur son activité scolaire. Source : revue santé