Alors que la crise en Libye risque de déraper dangereusement, l'Otan et l'Union européenne vont se réunir les 10 et 11 mars à Bruxelles. Les initiatives sont à la mesure de la complexité de la situation. Le régime de Mouammar Kadhafi tente de reprendre l'initiative en lançant une opération de reconquête, en utilisant ses chars et ses avions contre les opposants moins bien armés. Des efforts concertés pour trouver une issue marqueront le week-end. Le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, a affirmé que l'alliance militaire examinait tous les scénarios. Cependant, il a tenu à préciser que l'Otan n'interviendrait pas en Libye sans mandat de l'ONU. La question de la zone d'exclusion aérienne fait son chemin. Les ministres de la Défense des Etats-Unis et de leurs 27 alliés européens et canadiens en discuteront ce jeudi. Le chef de l'Organisation de la conférence islamique (OCI), Ekmeleddin Ihsanoglu, s'est déclaré, lui, favorable à une telle zone. La Ligue arabe le serait également. Sans attendre, les ambassadeurs des pays de l'Alliance atlantique à Bruxelles ont pris, lundi dernier, une mesure susceptible d'accélérer la mise en place d'une zone d'exclusion. Les Européens sont hantés par une possible vague d'émigration venant d'Afrique du Nord. Cela dépend beaucoup de l'issue de la crise en Libye, pays pétrolier où de nombreux Egyptiens et Tunisiens travaillaient depuis des années avant de devoir le fuir. Sur le terrain, l'insurrection libyenne fait face aux raids intensifs au début de la quatrième semaine de la révolte populaire. L'opposition libyenne a rejeté toute négociation avec le régime Kadhafi, exigeant que le numéro un libyen se défasse du pouvoir, lui promettant toutefois de ne pas engager de poursuites pénales contre lui. Des insurgés ont annoncé avoir reçu, et rejeté, une offre de négociation. Une offre difficile à vérifier dans les conditions actuelles. Le président du Conseil national créé par l'opposition pour préparer la transition, et basé à Benghazi dans l'Est, Moustapha Abdeljalil, a indiqué que Kadhafi n'avait pas envoyé d'émissaire, mais que des avocats de Tripoli s'étaient proposés comme intermédiaires «pour arrêter le bain de sang». Sur le terrain, la ville pétrolière de Ras Lanouf, base la plus avancée de l'opposition dans l'Est libyen, à environ 300 km au sud-ouest du siège de l'opposition à Benghazi, a fait l'objet de raids aériens intenses. Face à l'inaction internationale, l'aviation libyenne se permet de viser quotidiennement les positions des insurgés dans l'est du pays, essentiellement sur la ligne de front, mais aussi à Brega et Ajdabiya, deux points considérés comme des verrous stratégiques vers Benghazi. A l'ouest de Tripoli, l'opposition contrôle toujours Zenten, à 120 km au sud-ouest de la capitale, mais la ville était encerclée par les forces de Kadhafi. Les 27 pays européens se sont mis d'accord sur de nouvelles sanctions contre la Libye, visant notamment un fonds souverain et la banque centrale, après le gel des avoirs du colonel Kadhafi et de 25 de ses proches. Enfin, la crise humanitaire provoquée par les combats tend vers la dégradation. Selon l'ONU, plus de 191 000 personnes ont fui les violences. Le secrétaire général de l'instance onusienne Ban Ki-moon avait avancé, le 25 février, un bilan de plus de 1 000 morts depuis le début de l'insurrection. M. B.