La colère populaire qui secoue Bahreïn depuis fin janvier fait craindre le pire aux autorités de Manama, qui évoquent ouvertement, pour la première fois, une «division entre les communautés religieuses», ont rapporté les médias. «Ce qui se passe à Bahrein constitue une phase très dangereuse. Il y a la stabilité, mais nous redoutons par-dessus tout une division entre les communautés religieuses», a déclaré hier le ministre des Affaires étrangères de Bahreïn, Cheikh Khaled ben Ahmad Al Khalifa, à la chaîne de télévision turque NTV, repris par Reuters. «Nous devons discuter avec nos alliés turcs pour rechercher une position commune à propos de ces divisions et de ces conflits entre communautés religieuses», a-t-il ajouté lors d'une visite effectuée hier en Turquie. «Dans la région tout entière, nous devons parvenir à une entente stratégique sur la conduite à tenir dans ce processus de transformation politique en cours», a-t-il encore indiqué, faisant notamment référence aux «tentatives de déstabilisation» étrangères qui menaceraient, selon Manama, ce petit pays de la péninsule Arabique. Autrement dit, Bahreïn soupçonne le voisin iranien d'alimenter la contestation populaire menée principalement par les chiites qui demandent des réformes politiques profondes, dont l'instauration d'une monarchie parlementaire. La dynastie des Al Khalifa (sunnites) détient le pouvoir depuis environ deux siècles à Bahreïn, un pays majoritairement peuplé de chiites. Lundi, le roi de Bahreïn a indirectement montré du doigt l'Iran en déclarant que les manifestations qui secouent son pays étaient le fruit d'un complot étranger. Le roi Hamad ben Isa Al Khalifa a évoqué, en fait, «l'échec du complot subversif fomenté contre la sécurité et la stabilité du pays», a rapporté l'agence de presse officielle Bahrain News. L'Iran a évidemment nié toute implication dans les évènements qui secouent Bahreïn. La montée de tensions entre ces deux pays a poussé hier Gulf Air, la compagnie nationale de Bahreïn, à suspendre ses vols vers l'Iran, mais aussi vers l'Irak et le Liban où il y a aussi une forte communauté chiite. Ces trois pays avaient critiqué la répression dont avaient été victimes les manifestants de l'opposition à Bahreïn. Cette annonce intervient au moment même où les manifestations se poursuivaient à Manama et dans d'autres villes du pays. A noter, enfin, qu'une force maritime koweïtienne est arrivée depuis lundi dernier à Bahreïn pour se joindre au millier de soldats saoudiens membres de la force du Conseil de coopération du Golfe, ont rapporté les médias locaux. Les Emirats arabes unis ont aussi envoyé 500 policiers et le Qatar a annoncé son intention d'envoyer des forces sans toutefois préciser le nombre de leurs effectifs. L. M.