Position n L'opposition bahreïnie a rejeté ce samedi l'offre de dialogue du prince héritier, exigeant au préalable la démission du gouvernement et le retrait de l'armée des rues de Manama. «Pour envisager le dialogue, le gouvernement doit démissionner et l'armée doit se retirer des rues» de la capitale, a affirmé Abdel Jalil Khalil Ibrahim, chef du bloc parlementaire du Wefaq, principal groupe de l'opposition chiite. «Nous n'assistons pas à un langage de dialogue, mais à celui des armes», a-t-il ajouté, en évoquant les tirs de l'armée hier soir contre des manifestants, qui ont fait 95 blessés, dont «trois dans un état de mort clinique», selon lui. Ces tirs sont survenus alors que le prince héritier, Salman Ben Hamad Al-Khalifa, s'exprimait sur la télévision d'Etat pour promettre un dialogue avec l'opposition une fois le calme revenu. «Je ne fais aucune différence entre un Bahreïni et un autre», a déclaré le prince, ajoutant : «Bahreïn connaît aujourd'hui un état de division et c'est inacceptable.» Aussitôt après, le roi Hamad a chargé son fils, le prince héritier, de mener un «dialogue avec toutes les parties et communautés sans exception», en assurant que par une coopération «sincère», «Bahreïn s'en sortira plus fort». Cette offre de dialogue «n'est pas sérieuse», a commenté M. Ibrahim. «La situation se complique et je crains qu'elle n'échappe à tout contrôle.» Son groupe s'est retiré du Parlement, où il compte 18 des 40 élus de la Chambre, pour protester contre la répression sanglante, jeudi à l'aube, d'un sit-in anti-régime sur la place de la Perle à Manama, qui était samedi toujours aux mains de l'armée. «Nous ne pouvons pas dialoguer sous la menace des armes», a renchéri un chef de l'opposition de gauche, Ibrahim Sharif, estimant que l'initiative du prince héritier était «un pas positif» mais qui «nécessite des mesures favorisant le dialogue». Il a cité «le retour des troupes et des chars dans les casernes, le droit de manifester et de se rassembler, y compris sur la place de la Perle», devenue un symbole du mouvement de contestation, lancé le 14 février par de jeunes internautes. M. Sharif, chef de l'Alliance nationale démocratique, a exigé également «un arrêt de la campagne des médias officiels, qui alimente une sédition confessionnelle» dans ce petit royaume peuplé majoritairement de chiites, mais gouverné depuis le 18e siècle par une dynastie sunnite. L'opposition réclame une monarchie constitutionnelle, un gouvernement élu et une alternance pacifique du pouvoir dans un pays où le poste de Premier ministre est occupé par cheikh Khalifa ben Salman Al-Khalifa, oncle du roi, depuis l'indépendance de Bahreïn, en 1971, et où les ministères de souveraineté sont tenus par des membres de la famille royale. «Nous voulons un Etat démocratique, doté d'une Constitution qui établit une séparation entre les trois pouvoirs et dans lequel le roi sera le symbole de cet Etat», a expliqué M. Sharif.