Photo : M. Hacène Par Karima Mokrani L'ordre national des pharmaciens réitère son appel à l'administration du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière pour une collaboration étroite à même d'assurer une meilleure régulation de la profession. «Nous demandons à être consultés dans toutes les questions qui concernent le fonctionnement des officines et la gestion du produit pharmaceutique. Nous ne pourrons pas assurer pleinement notre rôle de veiller au respect des règles de déontologie sans travailler en concertation permanente avec les services du ministère de tutelle», a déclaré hier, lors d'une conférence de presse tenue à Alger, Lotfi Benbahmad, le nouveau président de l'institution regroupant 12 500 pharmaciens au niveau national. Et le conférencier de poursuivre, avec regret : «Cela fait treize ans que nous existons, mais nous sommes rarement appelés à donner notre avis sur les textes et autres décisions qui engagent l'avenir de la profession, du pharmacien et de l'officine et, partant, le devenir du secteur de la santé en Algérie. Nous avons des propositions à faire, mais nous ne sommes pas associés aux discussions.» Lotfi Benbahmad insiste sur la nécessité de créer une synergie entre l'ordre national des pharmaciens et l'administration du département de la Santé : «C'est de cette façon-là que nous serons plus efficients dans nos missions sur le terrain.» Le représentant des pharmaciens indique que la profession est minée par des pratiques illicites qui lui portent préjudice et menacent la santé du citoyen. Il évoque l'exercice illégal du travail de pharmacien ; pis, la location des diplômes. «Le problème essentiel, c'est la location des diplômes. C'est un cancer», lance-t-il. Ainsi, «des chaînes de pharmacies sont créées par des trabendistes soutenus par des lobbies. Des gens qui n'ont rien à voir avec la profession tiennent des officines. Cela cause de sérieux problèmes à la santé publique».Selon le président de l'ordre national des pharmaciens, «des dizaines de pharmacies, de sociétés de distribution et de laboratoires d'analyses ont été proposés à la fermeture pour location de diplôme, absence de pharmacien directeur technique ou de pharmacien biologiste». Ces établissements tenus illégalement par des non-pharmaciens portent atteinte à la santé publique (trafic de psychotropes, contrefaçon, erreurs et vente de médicaments sans ordonnance, entraînant des accidents thérapeutiques, contrebande aux frontières portant atteinte à l'économie nationale, mauvais résultats d'analyses médicales menant à de faux diagnostics, etc.). Pour sanctionner le supposé pharmacien qui enfreint la réglementation, les choses ne sont pas faciles : «Nous avons poursuivi en pénal un soi-disant pharmacien à Bab El Oued, mais nous n'avons pu obtenir la décision de lui fermer l'officine que six ans après. Il doit être fortement appuyé par un réseau de lobbies.» Aussi, pour contourner le fléau de location des diplômes, «nous avons même écrit à l'ordre des notaires. La pharmacie ne doit être gérée que par un pharmacien». Malheureusement, sur le terrain, les difficultés que connaissent les jeunes diplômés en pharmacie n'encouragent pas les bonnes initiatives allant dans ce sens : «De nombreux jeunes pharmaciens sont dans le désarroi. En plus du fait qu'ils n'ont pas reçu une formation adéquate (conditions pédagogiques précaires), cela nourrit davantage le trafic des diplômes et autres pratiques illicites.»