Synthèse de Ghada Hamrouche L'hypothèse d'une trêve rapide entre la Thaïlande et le Cambodge semble s'évaporer après l'annulation par Bangkok d'une rencontre des deux ministres de la Défense et la poursuite des échanges de tirs à l'arme lourde le long de la frontière. Les combats qui opposent la Thaïlande et le Cambodge, le long de leur frontière disputée, sont entrés dans leur sixième jour. Une rencontre prévue à Phnom Penh entre les ministres de la Justice de deux pays a été annulée par le gouvernement thaïlandais. Les combats ont repris au lever du jour à proximité de deux petits temples situés le long d'une frontière qui n'a jamais été délimitée précisément. Des affrontements s'étaient poursuivis jusqu'à 23 heures la veille. Quatorze soldats ont été tués dans ces affrontements, les plus violents entre les deux voisins depuis le début de leur querelle frontalière en 2008. Plus de 20 000 personnes ont été déplacées de chaque côté.Le Premier ministre cambodgien, Hun Sen, a lancé un appel au «cessez-le-feu», au sixième jour de combats qui ont déjà fait quatorze morts et qui plongent des dizaines de milliers de déplacés dans l'angoisse. Mais la seule opportunité de discussions immédiates, une rencontre prévue à Phnom Penh des ministres de la Défense cambodgien Tea Banh et thaïlandais Prawit Wongsuwon, a été annulée par le gouvernement de Bangkok. Hun Sen a laissé, toutefois, entendre qu'il rencontrerait son homologue à Jakarta lors d'un sommet régional les 7 et 8 mai prochains. Mais uniquement «devant les dirigeants de l'Asean». Le porte-parole et le ministre de la Défense lui-même se sont, par ailleurs, insurgés contre l'affirmation par des médias cambodgiens que Bangkok avait reconnu sa défaite militaire. Selon des sources militaires, ces derniers ont repris au lever du jour, à proximité de deux petits temples situés le long d'une frontière qui n'a jamais été délimitée précisément. Ils ont duré quelques heures. «La Thaïlande n'a jamais envahi aucun pays. Nous devons répondre s'ils n'arrêtent pas d'attaquer», a déclaré à la télévision le Premier ministre thaïlandais, Abhisit Vejjajiva, en mission dans l'est du pays. «Il n'y a pas de raison pour la Thaïlande d'attaquer le Cambodge, qui veut simplement accentuer le conflit.» «Nous combattons des ennemis sur notre territoire», a assuré pour sa part Hun Sen. Au pouvoir depuis 1985, il a affirmé n'avoir jamais travaillé avec un gouvernement thaïlandais qui «partait en guerre» pour résoudre ses problèmes frontaliers. En fin de journée, un communiqué de son gouvernement a estimé que les «bombardements inhumains et aveugles» par la Thaïlande «n'étaient autres que des crimes contre l'humanité». Signe d'une guerre des mots sans limite, le texte faisait même état «d'actes apparents de génocide». Les précédents combats entre les deux voisins, du 4 au 7 février dernier, avaient déjà fait dix morts. La tension était brusquement montée en 2008 lorsque l'Unesco a classé les ruines du temple de Preah Vihear, qui relèvent de la souveraineté du Cambodge, mais dont la Thaïlande contrôle les principaux accès. Les deux pays revendiquent aussi une zone de 4,6 km2 en contrebas de l'édifice. L'Association des nations d'Asie du Sud-Est (Asean), dont les deux pays sont membres, et l'ONU, dont le Conseil de sécurité s'est réuni en février sur le sujet, échouent à imposer un dialogue d'autant plus délicat que les combats alimentent les nationalistes des deux camps. Bangkok exige, par ailleurs, un règlement bilatéral, alors que Phnom Penh demande l'intervention d'une tierce partie.