Photo : S. Zoheïr Par Amine Echikr L'Algérie a connu une mue dans sa législation depuis la révolution d'octobre 1988. Le gouvernement Hamrouche avait réussi à faire passer, face à l'Assemblée du parti unique, des lois permettant la création de nouveaux syndicats. Cette situation avait été jugée de superbe avancée vers une démocratisation de la vie publique. L'Union générale des travailleurs algériens perdait son monopole et l'ère était aux promesses de nouvelles luttes pour un meilleur pouvoir d'achat et d'excellentes conditions de travail. En vertu de l'article 5 du code du travail, «les travailleurs jouissent des droits fondamentaux suivants : exercice du droit syndical, négociation collective, participation dans l'organisme employeur, Sécurité sociale et retraite, hygiène, sécurité et médecine du travail, repos, participation à la prévention et au règlement des conflits de travail et au recours à la grève».Les syndicats dits autonomes et d'autres affiliés à des partis politiques ont vu le jour. Le combat syndical a été souvent dévoyé. Au-delà du fait que le gouvernement continuait à considérer l'UGTA comme seul interlocuteur, les nouveaux syndicats avaient du mal à recruter en dehors de la Fonction publique où les revendications corporatistes étaient plus simples à mettre en œuvre. Les efforts pour parvenir à une réelle représentativité des nouveaux syndicats restent très difficiles même si la majorité des travailleurs répondent positivement aux appels à la cessation du travail pour telle ou telle revendication. Pourtant, la législation définit un certain nombre de facilitations pour que les délégués des travailleurs puissent accomplir leur mission.En effet, la loi dispose qu'aucun «délégué syndical ne peut faire l'objet, de la part de son employeur, d'un licenciement, d'une mutation ou d'une sanction disciplinaire, de quelque nature que ce soit, du fait de ses activités syndicales. Les fautes à caractère strictement syndical sont de la compétence exclusive des organisations syndicales».Les syndicalistes sont protégés par la loi et ne doivent subir aucune pression qui les amènerait à abandonner la «lutte ouvrière». Cependant, la volonté des uns et des autres de gérer les œuvres sociales fait que les travailleurs ne comprennent pas ce nouveau mode de lutte. Les textes en vigueur pour la gestion de cette structure remontent à 1982 et n'ont pas été modifiés depuis. La totalité des commissions des œuvres sociales sont gérées par des syndicalistes de l'UGTA et dans certains cas par l'employeur. Dans les secteurs de l'éducation ou de la santé, il s'agit de budgets colossaux. Des budgets qui permettent à celui qui préside la commission d'avoir un argument électoral supplémentaire et de se constituer une clientèle. Cette dernière agira pour que la confiance lui soit renouvelée au moment des élections triennales.En dépit des lois et des droits protégeant la lutte ouvrière, les différentes grèves que l'on a eu à observer ces dernières semaines ne sont pas l'œuvre des syndicats. Des coordinations de travailleurs, de médecins, de journalistes ont vu le jour pour prendre en charge un certain nombre de revendications.Les syndicats dits autonomes se contentent de casser le monopole de l'UGTA sur les œuvres sociales. Hélas, pour nos syndicalistes, l'essentiel est ailleurs.