Les pénuries s'accentuent, le nombre de médicaments introuvables pendant de longues périodes sur les rayons des officines est en augmentation. Les déclarations du ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière ont beau être rassurantes, la situation ne s'améliore guère. Une virée dans les pharmacies de la capitale montre que de nombreux médicaments destinés au traitement des maladies chroniques, notamment le cancer, le diabète, l'hypertension, les maladies cardiovasculaires et psychiatriques, la polyarthrite rhumatoïde sont introuvables. Même les pilules contraceptives sont en rupture de stock. «La liste des médicaments essentiels qui manquent ne cesse de s'allonger», affirme, harassée, Imène Chelabi, une jeune pharmacienne à El Achour. «Elle concerne différentes classes thérapeutiques, entres autres les antibiotiques, les anti-inflammatoires, les anti-histaminiques... «Les marques des médicaments qui souffrent de pénurie sont, notamment, Femara, Colchicine, Celestène, Cotareg, Medrol, Solupred, Clamoxyl… La pénurie n'a pas épargné les pilules contraceptives, comme Marvelon ou Duphaston», précise-t-elle. «C'est regrettable, cette situation n'a que trop duré», déplore cette pharmacienne qui dénonce les pratiques de certains pharmaciens qui «incitent leurs clients à acheter des médicaments génériques pour qu'ils puissent obtenir un médicament princeps qui fait l'objet de pénurie». Evoquant le calvaire des malades qui viennent vers elle à la recherche d'un médicament introuvable, elle dira que «la situation est d'autant plus grave vu que certains parmi ces médicaments ne sont pas encore disponibles en génériques». Le malade se retrouve ainsi livré à lui-même. «Il est obligé de changer de traitement à chaque fois que le médicament est en rupture. Ceux qui en ont la possibilité vont jusqu'à se le procurer de l'étranger», explique-t-elle. C'est le cas pour un malade atteint de crise d'arthrite aiguë (la crise de goutte) que nous avons rencontré à la recherche en vain de la Colchicine, un traitement que lui a prescrit son médecin. Il a fait le tour des pharmacies d'Alger, sans résultat. Finalement, il a dû se procurer le fameux sésame de France. «Je ne comprends pas pourquoi un médicament qui ne coûte pas cher (près de 4 euros seulement) soit indisponible», s'étonne-t-il. Les pharmaciens d'officine ne s'expliquent pas les raisons de ces ruptures récurrentes. Selon certains pharmaciens interrogés, les pénuries de médicaments seraient dues à «l'interdiction d'importer certains produits, d'autres évoquent la mauvaise distribution des médicaments ou encore la vente concomitante». Toujours est-il, l'Etat est appelé à contrôler le marché du médicament livré au diktat du lobby pharmaceutique. Aussi les pharmaciens demandent-ils aux pouvoirs publics d'intervenir une bonne fois pour toutes pour réguler le marché des médicaments. «Cette situation est inadmissible, le marché du médicament est instable et anarchique, l'Etat doit intervenir pour régler la question de l'approvisionnement du médicament», souligne un autre pharmacien accablé au niveau de la place du 1er-Mai. Notons que les médicaments destinés au milieu hospitalier sont aussi touchés par la pénurie. C'est le cas, notamment, pour l'Herceptin destiné au cancer du sein.Pour rappel, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Djamel Ould Abbès, déclarait récemment que «des mesures ont été prises pour renforcer le contrôle après la découverte d'anomalies sur le marché du médicament avec, notamment, des surfacturations des produits, dont le prix initial est multiplié par dix, voire quinze». A. B.