Le Paraguay de la Copa America 2011 va rester dans l'histoire du football de manière extravagante : il s'est qualifié pour la finale sans remporter le moindre match, en alignant cinq nuls et au gré d'un fond de jeu se délitant progressivement au fil de ses rencontres. Les Guaranis avaient marqué cinq buts lors du premier tour; aucun en quart contre le Brésil (0-0 a.p., 2-0 t.a.b.) ni en demi-finale face au Venezuela mercredi soir (0-0 a.p., 5-3 t.a.b.). De manière symptomatique, leur meilleur joueur, Justo Villar, est devenu leur gardien et capitaine, auteur d'un arrêt à chacune des séries de tirs au but, et carrément héroïque contre le Brésil, écœurant l'armada des Pato, Neymar et Robinho. Contre la Vinotinto mercredi, il y eut cette tête de Veron, bien détournée par le gardien adverse, à la huitième minute. Une seule occasion nette, et c'était tout. Les Guaranis allaient ensuite passer le match à défendre et bâcler leurs offensives. A croire que l'Albirroja s'attache à coller à sa caricature traditionnelle : priorité au bloc défensif, agressivité ininterrompue, construction erratique. Cela avait déjà fonctionné au Mondial-2010, lorsqu'elle avait atteint le meilleur résultat de son histoire, les quarts de finale, avec un parcours déjà cahoteux (quatre buts en quatre matches avant de s'incliner contre l'Espagne), marqué par une seule victoire (2-0 face à la Slovaquie). Cette victoire est d'ailleurs la seule des Guaranis lors de leur onze derniers matches de compétition, depuis un succès en octobre 2009, pour le compte des qualifications au Mondial, contre le... Venezuela (2-1). Le Paraguay donne l'impression d'une équipe à bout de souffle mais qui s'accroche. Car le jeu s'effiloche inextricablement; le sélectionneur Gerardo Martino l'a reconnu au fil de ses analyses successives. En phase de groupes ? Son équipe avait été «clairement supérieure» à l'Equateur (0-0), puis «un peu meilleure» que le Brésil (2-2), qui avait arraché le nul dans les dernières minutes. «Nous avons mal joué et aurions dû perdre le match», avait-il ensuite lâché après la remontée de deux buts du Venezuela dans les dernières minutes (3-3). En quarts, «le Brésil aurait dû gagner», avait-il admis. Après la demi-finale, il ne s'est pas exprimé. L'effondrement du jeu de l'Albirroja se reflète d'ailleurs dans la nervosité de son sélectionneur, exclu lors de chacune des confrontations contre la Vinotinto. «Nous avons fini exténués, presque sans oxygène, avec cinq ou six blessés et un suspendu», a relevé Villar après le match. Ainsi l'attaquant Santa Cruz n'est-il resté que sept minutes sur le terrain. «Aller jusqu'aux tirs au but, comme nous l'avons fait contre le Brésil et le Venezuela, serait trop risqué concernant une finale», a aussi avancé le capitaine des Guaranis. A moins que la chance ne les accompagne jusqu'au bout ? C'est que «le Paraguay a eu une chance incroyable», comme l'a dit Cesar Farias, le sélectionneur du Venezuela, qui a tout de même touché deux fois le poteau et une fois la transversale. La baraka du gardien ou la chance du champion ?