Photo : Hacene Par Bahia Aliouche Un programme national de maîtrise de l'énergie (PNME) 2007-2011 est mis en œuvre par l'Agence nationale pour la promotion et la rationalisation de l'utilisation de l'énergie (APRUE). Parmi les principaux axes de ce programme figure l'institution de l'étiquetage énergétique sur les appareils électroménagers et ce, dans le cadre d'un arrêté interministériel publié dans le Journal officiel n° 12 du 22 février 2009. Définissant la classification d'efficacité énergétique des appareils à usage domestique soumis aux règles spécifiques d'efficacité énergétique et fonctionnant à l'énergie électrique, l'arrêté en question est entré en vigueur le 1er octobre 2010. Ce texte stipule que les réfrigérateurs, congélateurs, climatiseurs, appareils combinés à usage domestique ainsi que les lampes domestiques fonctionnant à l'énergie électrique, lorsqu'ils sont proposés à la vente ou à la location-vente, doivent être munis d'une étiquette indiquant leur consommation en énergie ainsi qu'une fiche d'information précisant les indications portées sur l'étiquette.Le fabricant ou son mandataire, ou à défaut toute personne qui propose au consommateur un de ces appareils, est tenu à fournir cette étiquette qui doit être apposée sur l'appareil de manière à être clairement visible. La fiche d'information, quant à elle, doit être tenue à la disposition de l'acquéreur potentiel par la personne qui l'expose à la vente, à la location ou à la location-vente. Elle doit comprendre, entre autres, le nom et l'adresse du fournisseur, la marque de l'appareil, une description générale du produit permettant de l'identifier, la référence du modèle défini par le fournisseur ainsi que le classement du modèle selon son efficacité énergétique, sur une échelle allant de A (économe) à G (énergivore).Il est important de souligner que les appareils concernés par l'étiquetage électrique ont été choisis sur la base d'une étude menée par l'APRUE en partenariat avec le ministère de l'Energie et des Mines, le Centre de recherche et de développement de l'électricité et du gaz (CREDEG-Sonelgaz) ainsi que le Centre algérien du contrôle de la qualité et de l'emballage (CACQE). Cette étude a consisté à tester dans des laboratoires de contrôle l'efficacité énergétique de certains appareils électroménagers prélevés sur le marché national. L'étude a montré que le marché national est inondé d'appareils électroménagers et d'équipements domestiques non performants énergétiquement et n'obéissant pas aux normes d'efficacité énergétique. Ainsi, l'éclairage représente le tiers de la consommation ménagère d'électricité, suivi de la réfrigération (27%), du téléviseur (17%) et de la climatisation (11%). De ce fait, l'institution de l'étiquetage énergétique sur ces appareils électroménagers à forte consommation d'énergie vient pour permettre la pénétration sur le marché d'équipements performants et, par ricochet, la réduction de la facture d'électricité des ménages. Pour l'entreprise, le dispositif de l'étiquetage énergétique constituera indéniablement un paramètre d'amélioration de sa compétitivité et un argument commercial fort lui permettant d'avoir plus de parts de marché. Pour la collectivité, les gains sont évidents, car les économies d'énergie peuvent être assimilées à de nouvelles découvertes d'hydrocarbures. Absence de laboratoires de contrôle d'efficacité énergétique Cependant, bien que les conditions réglementaires pour la mise en oeuvre du système d'étiquetage énergétique soient réunies, celles de sa concrétisation sont loin de l'être. Selon l'article 16 de la loi n°99-09 du 28 juillet 1999 relative à la maîtrise de l'énergie, «il est institué un contrôle d'efficacité énergétique qui permet de constater et de certifier la conformité aux normes relatives au rendement énergétique des équipements, matériels et appareils». Ce contrôle, stipule l'article 17, «est assuré par des organismes et/ou des laboratoires compétents, chargés de la certification et de l'homologation et agréés par les ministères concernés».Néanmoins, après presque une année de la mise en œuvre du système de l'étiquetage énergétique, rien n'a été fait pour assurer le contrôle de l'efficacité énergétique des appareils fonctionnant à l'électricité et aux gaz.Bon nombre d'acteurs économiques considèrent que l'absence de procédures de contrôle est une lacune qui entrave l'application de ce dispositif. En cet état des lieux, n'importe quel importateur ou fabricant peut mentionner ce qu'il veut sur l'étiquette sans pouvoir être démenti, et le mauvais produit finira ainsi par chasser le bon, d'où, préconisent-ils, l'importante de mettre en place un instrument de contrôle des normes sur l'étiquetage, qui permettrait d'éviter l'ouverture aux abus de toutes sortes de pratiques de la part des entreprises peu scrupuleuses.Néanmoins, l'Algérie, à l'instar de la plupart des pays arabes, accuse, estime Mohamed Salah Bouzeriba, directeur général de l'APRUE, un important retard en matière d'efficacité énergétique. Cela dit, les concepts d'efficacité et de performance énergétiques sont très récents en Algérie et demeurent le maillon faible du programme de maîtrise de l'énergie. A cet effet, la mise en place d'un centre national de contrôle d'étiquetage énergétique des équipements électroménagers, qui devrait être placé sous l'égide du ministère du Commerce, est, selon M. Bouzeriba, «primordiale». Cet instrument de contrôle permettrait d'améliorer la performance énergétique de ces appareils par la mise en oeuvre de normes d'efficacité et, par conséquent, le développement de la compétitivité des fabricants. L'APRUE a opté pour une démarche progressive visant, dans sa finalité, à introduire des incitations fiscales au profit, entre autres, des fabricants des équipements électroménagers performants, à interdire l'importation des appareils très consommateurs d'énergie dits «énergivores» et, surtout, à imposer des normes d'efficacité sur ces appareils conformément aux standards internationaux. «Des avantages financiers, fiscaux et en matière de droits de douane peuvent être accordés pour les actions et les projets qui concourent à l'amélioration, entre autres, de l'efficacité énergétique», précise l'article 33 de la loi n°99-09 du 28 juillet 1999 relative à la maîtrise de l'énergie. En cas d'une consommation excessive par rapport aux normes d'efficacité énergétique établies, les appareils neufs, vendus ou utilisés sur le territoire national, fonctionnant à l'électricité, aux gaz et aux produits pétroliers, sont soumis, selon l'article 44, à une taxe fixée par la législation. La sensibilisation des utilisateurs fait défaut Pour la bonne application du dispositif de l'étiquetage énergétique, le lancement des campagnes de sensibilisation au profit des fabricants d'appareils électroménagers, des vendeurs et des consommateurs est plus que nécessaire. Conscient de l'importance de l'application du dispositif de l'étiquetage énergétique dans l'amélioration de sa compétitivité et dans l'acquisition de parts de marché, «le Groupe Condor a été le premier à mettre en place cette étiquette sur ses produits consommateurs d'énergie», nous indique Mme Naït Kaci, responsable auprès du Condor, avant de préciser que ce groupe est le sponsor de l'APRUE, initiatrice de cette démarche. L'Entreprise nationale des industries de l'électroménager (Eniem) a suivi les pas de Condor. A ce propos, Mme Sadaoui, du département marketing de cette entreprise publique, nous confie : «L'Eniem veille à intégrer cette technique au fur et à mesure.» Samsung Algérie, LG Algérie et autres ont, quant à eux, introduit ce système, qui a favorisé la concurrence sur le marché de l'électroménager. Lors de notre virée aux différents magasins d'El Hamiz (Alger), l'affichage de l'étiquette «Energie» a été clairement visible. Cependant, aucun des clients rencontrés n'a prêté attention à cette étiquette, constate-t-on sur les lieux. Et pourtant, les étiquettes apposées sur les appareils électroménagers ont été réalisées en couleur et avec des dimensions «grand format». Interrogés sur l'institution, en Algérie, de l'étiquetage énergétique sur les appareils électroménagers, les clients rapprochés par nos soins se sont tous accordés à nous dire qu'ils viennent d'apprendre qu'une telle étiquette existe. «Mes critères pour l'achat d'un appareil électroménager sont, généralement, le prix et la marque», nous a confié une dame, avant de souligner avoir acheté un réfrigérateur comportant cette étiquette, mais sans savoir son utilité. D'après les vendeurs interrogés, rares sont les gens qui prennent en considération l'étiquette énergétique lors de l'achat d'un appareil électroménager. Selon eux, le peu d'intérêt accordé à cette question est dû à l'inconscience engendrée elle-même par une «mal-information». Conclusion déduite : le lancement des campagnes de sensibilisation au profit des citoyens est la pierre maîtresse de la réussite du dispositif visant l'institution de l'étiquetage énergétique et, par ricochet, la promotion de l'efficacité énergétique, l'objectif principal du programme national de maîtrise de l'énergie (PNME) 2007-2011.