Photo : S. Zoheir De notre correspondante à Tlemcen Amira Bensabeur L'hôpital public est souvent présenté comme le miroir de notre société, de ses détresses comme de ses joies, de ses limites comme de ses progrès. De la même façon, les valeurs qui sous-tendent l'hôpital public sont le reflet des valeurs qui fondent notre pacte social : des valeurs humanistes traduisant en termes de santé physique et morale le respect de la dignité de tout individu, la non-discrimination et l'égalité de traitement dues à chaque citoyen. Dans ce contexte, l'hôpital public occupe donc une place centrale car, tant en matière sanitaire que sociale, il est pour toute personne malade le recours ultime, lorsque toutes les autres possibilités de prise en charge se sont révélées inefficaces, parfois le premier, voire le seul. De plus, pour les personnes en situation de précarité, le service des urgences de l'hôpital est souvent la «seule porte d'entrée dans le système de soins».Or, la réalité des hôpitaux à Tlemcen en est une autre. L'un des problèmes majeurs que l'hôpital éprouve pour son fonctionnement, c'est d'abord la démotivation du personnel qui est liée à la faiblesse des plateaux techniques dont les matériels demeurent rudimentaires et archaïques, faute d'investissements. Il est difficile que les prestations du personnel médical puissent être à la hauteur des attentes de la population. En dehors de cela, il faut reconnaître qu'un hôpital doit être propre parce que l'insalubrité dans un hôpital rend l'environnement difficile à gérer. L'hôpital, c'est d'abord un environnement qui reçoit tous les malades. Il doit être régulièrement traité.Au niveau des hôpitaux, les choses qui ne nécessitent pas de l'argent sont le problème de conscience professionnelle qui n'a pas besoin des moyens matériels, ni financiers. C'est vraiment cette réelle volonté qui peut aboutir à aplanir certaines difficultés.A travers les hôpitaux, les malades admis deviennent encore plus malades, car le nombre de passages aux urgences hospitalières à travers la wilaya de Tlemcen semble doubler, et les services des urgences sont devenus une véritable porte d'entrée de notre système de soins. Quotidiennement, un flux de patients s'oriente vers ces structures le plus souvent marquées par une débandade et personne ne peut le nier devant le laisser-aller et ce, face à une ruée incroyable. «Si on n'a pas des connaissances, on est cuit, et le malade demeure cloué au lit», disent les malades. Les services des urgences ne désemplissent pas. Ils font face à une augmentation continue de leur activité dont la cause tient à la fois à des changements de comportement des usagers et à une évolution de l'organisation des soins.Les services des urgences hospitalières sont dans une contradiction majeure : obligés d'accueillir et de traiter toute personne qui se présente, ils demeurent, pour l'hospitalisation de leurs patients et la réalisation de certains examens complémentaires, dépendants de l'accord et/ou des contraintes organisationnelles des services partenaires. C'est la galère, et les urgences sont mal perçues, est-ce seulement un problème de perception ou y a-t-il vraiment des heures d'attente et des gens alités dans les couloirs ? Ces urgences sont devenues, au fil du temps, le seul lieu où convergent les patients et ce, devant la négligence constatée au niveau de certaines salles de soins, polycliniques, etc. Les EPSP sont un autre problème. Ils ont failli dans leur mission, car malheureusement, ils ne fonctionnent que 4 heures par jour et dès midi, les médecins désertent les lieux et à partir de 14 heures les EPSP sont carrément abandonnés pour ne pas dire clos jusqu'au matin. Cette politique n'a pas du tout réglé le problème des soins de proximité. Des budgets dépensés, des équipements qui font défaut, un matériel en panne, et le pauvre citoyen ne sait plus à quel saint se vouer et ne croit pas à cette réforme hospitalière. Les patients, dont les pathologies sont bénignes ou sans caractère d'urgence prioritaire, devront supporter une attente parfois longue, fonction de l'affluence et du nombre de patients présentant des urgences absolues ou vitales dont il faut s'occuper immédiatement ou rapidement. Flux ininterrompu de patients, longues heures d'attente sur un brancard inconfortable, épuisement, démotivation et besoin de reconnaissance des soignants, mécontentement des usagers, les urgences se retrouvent régulièrement au premier plan de l'actualité, au sein du CHU. «Ces situations doivent nous interpeller, car elles sont fréquentes et symptomatiques de graves dysfonctionnements et de difficultés d'adaptation de nos systèmes de santé», affirme-t-on au niveau de ces urgences.Manque chronique de lits d'hospitalisation surtout pour des moyens et longs séjours.Aujourd'hui, l'activité des services d'urgence se fait entre les urgences véritables, qui restent leur première mission, et une part de plus en plus grande de consultations non urgente au sens médical strict, mais nécessitant néanmoins l'accès à une structure de type «hôpital de jour», une consultation de médecine générale. Au-delà de la sempiternelle demande d'effectifs supplémentaires, une réforme en profondeur englobant aussi bien l'amont que l'aval des urgences est indispensable. Tout d'abord, nous dit-on, il faut repenser la mission des urgences en tant que structure. Bien sûr, le rôle des urgences n'est pas de se limiter à la seule prise en charge des situations où le pronostic vital est en jeu. L'hôpital public suscite les mécontentements, les grèves à répétition et une insatisfaction qui touche la totalité du personnel. Pourtant, les dépenses effectuées par ces infrastructures hospitalières sont faramineuses. Ce qui est plus grave, cependant, c'est le détournement des patients vers le privé. De nombreux cas ont été confirmés. A cela s'ajoutent également d'autres problèmes qui minent les hôpitaux à Tlemcen, notamment le manque de médicaments. A titre d'exemple, la crise qui persiste au niveau des UMC, etc. Les problèmes et les dysfonctionnements que vivent certains hôpitaux en particulier au niveau des grandes villes ne sont pas inhérents à un manque de moyens, mais résultent bien d'une mauvaise gestion de ces structures. Ce constat n'est pas une simple vue de l'esprit, mais traduit bel et bien une réalité et il n'est nul besoin d'être un spécialiste en la matière pour poser ce diagnostic, car rien ne va plus. La santé à Tlemcen est malade et toute la politique sanitaire est à revoir.