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Est-ce la fin des conflits ?
Coopération énergétique entre l'Algérie et l'Espagne
Publié dans La Tribune le 29 - 09 - 2008

Enfin, le bout du tunnel ! La compagnie gazière ibérique Repsol vient d'être déboutée par la justice espagnole dans le conflit qui l'oppose à Sonatrach. En effet, la justice espagnole a notifié dernièrement au groupe pétrolier espagnol, Repsol YPF, la caducité de son recours contre la décision du ministère espagnol de l'Industrie, du Tourisme et du Commerce relative à la levée des conditions de l'autorisation accordée à Sonatrach dans le cadre de son actionnariat dans la société Medgaz. Selon le ministère algérien de l'Energie et des Mines, Repsol se devait de formaliser son recours 21 jours après la date de notification du dossier, soit le 3 juin 2008. Cependant, les délais accordés à Repsol ont été dépassés et, de ce fait, le recours a été déclaré caduc en date du 31 juillet dernier. Cette décision a été notifiée par la justice le 10 septembre dernier à ce groupe pétrolier. Cette notification met (en principe) fin à un conflit purement commercial qui a duré plusieurs mois, et dans lequel la société algérienne Sonatrach s'est indignée de l'attitude des compagnies espagnoles. La cause ? Ce litige entre ces deux sociétés, contractantes de surcroît dans plusieurs projets, est né au lendemain de la décision du gouvernement espagnol d'accorder à Sonatrach le droit de vote sur la base de sa détention de 36% du capital du projet Medgaz, mais….
Contre toute attente, la Commission espagnole nationale de l'énergie (CNE) avait, en mai 2007, conditionné l'augmentation des droits de vote de Sonatrach correspondant à sa participation additionnelle de 16% dans la
société Medgaz par une limitation du volume de gaz à commercialiser sur le sol espagnol à 1 milliard, au lieu des 3 milliards de mètres cubes qu'elle possède dans le projet. N'en restant pas là, les sociétés espagnoles ont même exigé de Sonatrach qu'elle ne descende pas en dessous de 80% dans ses acheminements de gaz à travers le gazoduc (8 milliards de mètres cubes par an). Ces deux conditions n'ont pas du tout plu à la partie algérienne, à tel point que le ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, avait alors déclaré tout de go qu'il s'agit d'une pure et claire «discrimination» à l'égard de la compagnie algérienne, par rapport aux facilités accordées à une quarantaine de compagnies étrangères activant dans le domaine gazier en Espagne. En effet, l'Algérie a reproché à la Commission espagnole de l'énergie (CNE), l'équivalent d'une autorité de régulation, d'avoir pris des mesures restrictives pour les activités de Sonatrach, les qualifiant de «discriminatoires». Ainsi, la
Sonatrach avait présenté, le 8 juin de la même année, un recours auprès du ministère espagnol de l'Industrie contre les conditions imposées par la CNE à Sonatrach et ce, pour arbitrer dans ce conflit.
Les dessous d'une décision arbitraire…
Ce litige, qui aurait dû être résolu dans son pur contexte commercial, avait pris des proportions telles qu'il avait
dépassé le cadre des deux entreprises pour passer dans l'arène politique. Parallèlement, les dirigeants des deux sociétés ont sauté à pieds joints dans une guéguerre de déclarations par presse interposée. L'ampleur et les
enjeux qui allaient avec n'ont fait que pousser certains médias des deux côtés de la Méditerranée prendre leur parti : la presse espagnole pour Repsol YPF, l'algérienne pour Sonatrach. Par ailleurs, les spécialistes en questions énergétiques ont justifié l'attitude de la société Repsol YPF et puis de la CNE par plusieurs raisons. En effet, la partie non apparue de l'iceberg a trait à la position et à la situation financière de l'entreprise espagnole, qui est née, pour rappel, du rachat par Repsol de la première compagnie de pétrole argentine YPF en 1999, pour un montant de 12,7 milliards de dollars. Nonobstant son chiffre d'affaires, un peu flatteur, puisqu'il l'a placée à la cinquième place parmi les grandes sociétés pétrolières européennes et à la neuvième au plan mondial, Repsol YPF a le plus mauvais rendement, concernant le remplacement de ses réserves de pétrole et de gaz tirées du sol. En chiffres, ses réserves ont baissé de 89%, soit une perte colossale pour l'entreprise, qui aspire à jouer un rôle important sur le marché pétrolier. Le comportement de l'entreprise ibérique est justifié également par les observateurs par la perte des parts qu'elle détenait en Bolivie au moment de la nationalisation des ressources du sous-sol en 2004. En effet, elle a été contrainte deux années plus tard, soit en 2006, de revoir à la baisse ses réserves de pétrole et de gaz, les réduisant de 25%, la plupart en Bolivie et en Argentine, ce qui lui a infligé la perte de 1,25 milliard de barils équivalent pétrole. Repsol possédait 4,93 milliards de barils équivalent pétrole à la fin 2004 et extrait en moyenne 450 millions de barils équivalent pétrole par an. Résultats des courses : une suspension de la cotation de titres en Bourse à Madrid d'une entreprise qui réalise un chiffre d'affaires de…
51 milliards d'euros en 2006. L'autre motif a trait à la structure interne de Repsol YPF. L'exploration et la production de pétrole et de gaz ne représentent que 18%, alors que le raffinage, la distribution des produits pétroliers, la production et la distribution d'électricité ainsi que la production de produits chimiques sont évalués à 81%. On se souvient, alors, de la décision annoncée en grande pompe par Repsol YPF, en 2005, qui consiste à consacrer 11,4 milliards d'euros (14,8 milliards de dollars) pour contenir la chute de ses réserves. Ses prévisions sur Gassi Touil étaient d'investir pour le développement de ce champ 5,2 milliards d'euros (6,7 milliards de dollars) sur quarante ans. C'est dire l'importance qu'attache Repsol à cette concession et aussi l'importance de ce gisement pour Sonatrach. C'est dire, en somme, l'intérêt porté par les sociétés espagnoles. D'où la réaction de cette entreprise face à une Sonatrach qui a voulu posséder un droit de vote correspondant à sa participation additionnelle de 16% dans le capital de la société Medgaz, laquelle élèverait, il est utile de le rappeler, la part de la société algérienne à 36%, et, de ce fait, elle deviendrait majoritaire dans ce projet. Pour ce qui est de la décision de la CNE, certains spécialistes ont fait remarquer que Sonatrach avait fait, tout simplement, les frais de la nouvelle loi espagnole sur les hydrocarbures entrée en vigueur en 2006 et qui a été appliquée pour la première fois à la compagnie nationale.
Lorsque les conflits viennent d'Espagne…
Un malheur ne vient jamais seul. Cet adage est vérifié dans le cas de Sonatrach avec ses homologues espagnoles. La
société algérienne, spécialisée dans les hydrocarbures, a eu, ces derniers temps, de mauvaises aventures avec certaines entreprises ibériques, en ce sens que des problèmes d'ordre, notamment, financier ont entaché les contrats liant les deux parties. En effet, Sonatrach, en dépit de l'immense retard causé par Repsol et de Gas Natural dans la réalisation du projet de Gassi Touil, et surtout après les nombreuses menaces de soulever ce problème au tribunal international, a rendu public un communiqué au mois de septembre 2007, confirmant avoir résilié le contrat conclu en 2004 avec les sociétés espagnoles Repsol et Gas Natural pour le projet intégré de développement du gisement de Gassi-Touil. «Cette résiliation est intervenue en application des clauses de contrat, du fait de l'inexécution par Repsol et Gas Natural de leurs obligations contractuelles, qui a entraîné des retards et des dépassements de coûts très importants, et de l'incapacité de Repsol et Gas naturel à redresser la situation, en dépit des nombreuses mises en garde de Sonatrach», avait expliqué l'entreprise nationale. Ce litige est né, pour mémoire, suite au retard engendré par ces deux sociétés contractantes pour la réalisation du projet qui devait être achevé en 2009. Mais, il ne pourra l'être qu'en fin 2012, selon les propres estimations… de Repsol et de Gas Natural. C'est considérable pour un projet sur lequel étaient adossés des engagements commerciaux lourds risquant de mettre Sonatrach dans une mauvaise posture à l'encontre de ses clients potentiels, ont laissé entendre les responsables algériens. Dernièrement, la Sonatrach a engagé une procédure contre les deux entreprises espagnoles en «réparation du dommage substantiel qu'elle a subi en raison de l'inexécution par Repsol et Gas Natural de leurs obligations contractuelles».
Le quotidien espagnol El Economista, dans son édition de la semaine dernière, a fait savoir que la société nationale des hydrocarbures, Sonatrach, aurait demandé 800 millions de dollars de réparation en dommages-intérêts aux deux groupes espagnols Gas Natural et Repsol dans le cadre de la procédure d'arbitrage international sur le dossier Gassi Touil. Le journal, qui cite des sources proches du dossier, affirme que Repsol et Gas Natural réclament pour leur part des indemnités de 2 milliards de dollars en compensation des préjudices qu'elles auraient, selon elles, subis après l'annulation par Sonatrach, en 2007, du contrat gazier avec les deux groupes.
S. B.


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