Il y a quelques semaines le journal économique espagnol Cinco Dias annonçait que la compagnie espagnole Gas Natural avait porté plainte auprès du tribunal national espagnol, à Madrid, contre la décision de la Commission nationale de l'énergie espagnole, qui porte sur la levée des contraintes imposées à l'entrée de la Sonatrach, avec une part importante, dans le projet Medgaz, qui relie l'Algérie à l'Europe à travers le territoire espagnol. Lundi, l'agence espagnole d'information EFECOM, citant des sources du secteur pétrolier, a rapporté que le groupe pétrolier espagnol Repsol YPF a décidé de se joindre à la demande de Gas Natural formulée devant les tribunaux espagnols. L'idée selon laquelle la démarche de Gas Natural consiste à perturber le projet Medgaz, déjà bien avancé, pour faire pression sur Sonatrach dans le litige qui les oppose sur le projet intégré de Gassi Touil, semble se confirmer puisque le société Repsol YPF n'est autre que le second partenaire de Sonatrach qui s'est fait évincer du projet de Gassi Touil. Pour rappel, ce projet, décidé il y a cinq ans et qui a vu l'entrée dans le partenariat des deux compagnies espagnoles, devait être achevé en 2009, mais le retard accusé par les deux partenaires a amené l'entreprise algérienne à revoir ses cartes et à rompre le contrat après plusieurs mises en demeure. Mieux, le recours à un tribunal commercial international s'est avéré nécessaire pour Sonatrach en ce sens qu'elle a perdu beaucoup d'argent dans cette affaire. Par ailleurs, la plainte de Gas Natural, appuyé lundi par Repsol YPF, n'est intervenue que plus de 9 mois après la décision de la CNE espagnole qu'elles contestent. Le timing choisi par Gas Natural pour l'introduction de sa plainte n'est, en sens, pas innocent. En effet, cette plainte intervient après que la société Medgaz ait annoncé que la phase de construction avait commencée à Almeria. L'Algérie, pour sa part, ne semble pas prête à se laisser faire. En effet, le ministre de l'Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, a récemment déclaré, sur le plateau du Forum de l'ENTV, que même si, officiellement, l'Algérie n'est pas saisie de la plainte de Gas Natural, "nous sommes prêts à l'affronter". Il avait ajouté qu'une réunion a été tenue entre les représentants des sociétés participantes à Medgaz et les autorités espagnoles "pour prendre les mesures nécessaires en la matière". Il faut dire que les plaignantes, dans cette affaire, auront fort à faire face à la position des sociétés participantes à Medgaz au côté de Sonatrach. Les espagnoles Cepsa (20 %), Iberdrola (20 %), Endesa (12 %) et le français Gaz de France 12 %), partenaires dans le projet, ont été les premiers à soutenir Sonatrach lors du conflit avec la commission nationale de l'énergie espagnole. Mieux encore, les actionnaires de Medgaz avaient déposé un recours auprès de la CNE espagnole, estimant que les conditions imposées par la CNE ne touchaient pas uniquement Sonatrach, mais elles avaient une influence sur le projet du gazoduc. Le président de Cepsa, M. Carlos Perez de Bricio, l'un des initiateurs du projet durant l'année 2000, avait même souligné que les conditions imposées par la CNE sont excessives et la position défendue par Sonatrach est logique. En déposant plainte contre Sonatrach, Gas Natural et Repsol YPF ouvrent un front qui les opposera, outre à Sonatrach et Gaz de France, à trois sociétés espagnoles (Cepsa, Iberdrola, Endesa) qui se feront un devoir de défendre leurs intérêts dans Medgaz.