Photo : Riad Entretien réalisé par Karima Mokrani LA TRIBUNE : Le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière vient d'introduire un nouveau vaccin contre la méningite et la pneumonie. Pourriez-vous nous en donner plus d'informations ? Dr Benbenour : En effet, le ministère de la Santé a introduit dans le calendrier national de vaccination un nouveau vaccin qui sera effectif à partir du 11 octobre prochain. Il s'agit du HIB (Haemophilus Influenzae B) contre les méningites bactériennes et la pneumonie. C'est un vaccin qui sera combiné avec le vaccin DTC et, donc, administré à l'enfant dans une même seringue. Ce vaccin est très cher. Il coûte, à lui seul, près de 700 millions de dinars, soit presque trois fois la somme dégagée annuellement pour l'ancien calendrier national de vaccination qui était de 250 millions de dinars. Cela ne risque-t-il pas de perturber l'ancien programme ? Le calendrier national de vaccination ne risque pas d'être perturbé du moment que nous avons gardé les tranches d'âge des DTC (diphtérie/tétanos/coqueluche) : une première dose le troisième mois, une deuxième dose le quatrième et une troisième le cinquième mois, avec un rappel les 18 mois. Cela fait des années que le ministère de la Santé se prépare pour l'introduction de ce vaccin. Il y a eu des réunions, des rencontres, un travail de longue haleine. L'année dernière, il y a eu la signature de l'arrêté relatif à son introduction (arrêté du 15 juillet 2007). Dès que l'arrêté a été signé, nous nous sommes occupés des questions administratives mais aussi du volet communication pour réussir au mieux notre campagne. Nous avons élaboré une affiche sur le nouveau calendrier vaccinal et un dépliant pour le personnel médical et paramédical. Nous avons fait un billet postal qui sera mis à la disposition des enfants scolarisés. Une instruction ministérielle a été envoyée à toutes les directions de santé de wilaya pour la bonne organisation de cette opération sans oublier les spots de télévision (en dessins animés)… Qu'en est-il de l'efficacité de ce vaccin ? Des études ont été faites à travers le monde et ont toutes prouvé son efficacité. Les pays qui l'ont introduit avaient des taux élevés de méningite bactérienne et de pneumonie. L'incidence de ces maladies a nettement diminué après son introduction. En Algérie, nous avons une incidence de 23,9% de méningites bactériennes purulentes dues au virus que nous appelons le HIB (Haemophilus Influenzae B). Autrement dit, un quart de ces méningites est dû au virus en question. C'est beaucoup. Il fallait, donc, agir au plus vite pour faire baisser cette incidence et, par conséquent, réduire les dépenses en matière de diagnostic et de traitement. Par ailleurs, avant l'introduction de ce nouveau vaccin, le ministère de la Santé a bien pris le soin de s'assurer de son efficacité. Ce vaccin est contrôlé et stocké par l'Institut Pasteur. Est-il disponible en quantités suffisantes ? Le vaccin est disponible depuis juillet dernier. Il se trouve dans les chambres froides de l'Institut Pasteur. A l'heure actuelle, nous avons réceptionné 1 500 000 doses et nous en réceptionnerons autant, voire plus, dans les jours à venir. Nous avons fait une commande de 3 080 000 doses pour les besoins de toute l'année. N'y aurait-il pas d'effets indésirables de ce nouveau vaccin ? Ce vaccin n'a aucun effet indésirable. Il se peut que certains enfants -comme c'est le cas, d'ailleurs, pour les autres vaccins- fassent de petites fébricules mais pas plus. Si la maman constate, donc, une petite fièvre chez son enfant, elle ne doit pas s'affoler. Le paracétamol fera vite disparaître la fièvre. Parlons, maintenant, de l'ancien calendrier de vaccination. Quels sont les vaccins qu'il comporte ? Nous avons sept antigènes dans sept maladies. Le BCG contre la tuberculose et le DTC contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche. En 1985, il a été décidé de rendre la vaccination contre la rougeole obligatoire. Douze ans après, nous avons réajusté notre calendrier de vaccination et introduit la vaccination antipoliomyélite orale à la naissance, ainsi qu'une deuxième dose de DTP entre 11-13 ans et 16-18 ans et un rappel DT tous les dix ans après 18 ans. Nous faisions cette vaccination à la rentrée scolaire. A partir de 2001/2002, nous avons introduit le vaccin contre l'hépatite virale B. La vaccination est-elle indispensable ? La vaccination est une nécessité pour préserver la santé de nos enfants mais aussi le budget de notre Etat, étant donné que la prise en charge des maladies est très lourde (diagnostic, traitement, hospitalisation…). Aussi, devrions-nous le rappeler, certaines de ces maladies sont invalidantes et laissent des séquelles. Il vaut mieux, donc, prévenir par le vaccin pour empêcher la réapparition, voire une recrudescence de ces maladies. Le vaccin contre la rougeole existe depuis 1987, mais cela n'a pas empêché les épidémies des années 1995/1996 et 2002/2003. Comment expliquez-vous cela ? Effectivement, l'Algérie a connu une grande épidémie de rougeole durant les années 1990 avec au moins 21 000 cas. Elle a particulièrement touché des adultes jeunes qui n'étaient pas vaccinés. Même chose pour l'épidémie de 2002/2003 où nous avions enregistré environ 6 000 cas. A vrai dire, on s'y attendait. Cette épidémie a touché aussi des adultes jeunes, c'est-à-dire ceux âgés entre 18 et 20 ans. Pourquoi ? La raison est que le vaccin contre la rougeole n'est devenu effectif qu'en 1987. Ces adultes jeunes avaient à l'époque trois à quatre ans. Ils avaient donc échappé à la vaccination. Quand nous avons introduit la deuxième dose en 1997, ces enfants étaient déjà scolarisés au cycle moyen ou au secondaire. Ils avaient donc échappé, encore une fois, à la vaccination. En somme, ils avaient raté les deux doses du vaccin et il a suffi qu'un seul enfant fasse de la rougeole pour que des centaines d'autres soient contaminés. Les campus et les résidences universitaires ont enregistré le plus grand nombre de cas. En 2006/2007, nous avions enregistré une autre épidémie mais cette fois de diphtérie et non de rougeole. Quatre cas à Mila et quatre autres à Adrar. Le nombre peut paraître dérisoire mais nous le considérons comme très important. Un seul cas de diphtérie est une épidémie. Là aussi, la raison en est que les personnes atteintes n'étaient pas vaccinées. Il s'agissait de nomades. Pour ce qui est de la polio, nous n'avons plus aucun cas depuis 1997. Il y avait un seul cas en 1996, en 1995, en 1994 et en 1993. C'était aussi des nomades non vaccinés. Je profite de cette occasion pour lancer un message aux parents dont les enfants ont raté un vaccin ou une dose de vaccin. Il faut se rendre aux structures de vaccination pour rattraper le retard. Il y a toujours possibilité de rattraper même si l'enfant atteint un certain âge.