RCK-FAF est un match lourd de souvenirs. Les plus récents ne sont pas très bons puisqu'ils nous ramènent à la dernière décision finale du TAS de Lausanne. Ce verdict final vient couper court à une histoire qui n'a que trop duré, surtout pour la FAF et son président Hamid Haddadj qui en a fait une affaire personnelle. Mais avec ces nouvelles décisions du TAS, c'est tout le Championnat de première et deuxième divisions qui sera remis en cause. En effet, si le résultat du match RCK-USMH est homologué, Kouba récupérera le point du nul. Il occupera la troisième place (classement D2 de la saison 2007/2008), ce qui lui donne droit d'accéder automatiquement en D1. Quant à l'USMH, le MCO, le WAT et l'OMR, qui ne vont pas tarder à se manifester, c'est à Haddadj de trouver la solution pour calmer les esprits qui commencent à s'échauffer. La gestion catastrophique de la FAF et de la LNF des dossiers a soulevé le courroux des présidents. Mais il est un Kouba-FAF qui a marqué bien davantage l'histoire du club banlieusard et du football algérien. C'est celui du bonheur de toute une ville prononcé à Lausanne. Car, ce jour-là, c'est l'accession en D1 qui se décida. Une D1 après laquelle le RCK, tout le monde le sait, court depuis des années pour l'accession parmi l'élite. Les données avant le coup d'envoi étaient claires : le club cher à Omar Rebrab, le président, 3ème, comptait le même nombre de points (68) ex aequo avec le club voisin, en l'occurrence l'USM El Harrach (4e), le grand rival qui a réussi à tenir en échec le club sur son terrain à Kouba. L'USMH, après le nul vierge, ne pouvait prétendre à l'accession, car il fallait recourir au goal-average particulier de l'aller qui était en faveur du RCK. La décision que le TAS de Lausanne a prononcée la 29 mai après trois heures de délibération a mis fin à une affaire (FAF-RCK) qui a duré quatre mois (28 mai-29 septembre 2008). Pour rappel, le TAS s'est déjà prononcé à trois reprises, la première, le 20 août 2008, lorsqu'il s'est «déclaré compétent pour statuer sur la requête du RCK» et avait ordonné à la FAF d'intégrer immédiatement le RCK, en tant que club supplémentaire, au Championnat national de football algérien de première division, dès la prochaine journée (3ème). Le lendemain, 21 août, la FAF sollicite le TAS pour lui demander de «surseoir à l'application des mesures provisionnelles pour éviter d'avoir à gérer une situation aux conséquences fâcheuses et graves en cas de leur remise en cause par la décision finale qui est tombée le 29 août au soir». Dès l'annonce de la nouvelle de la décision du TAS, les quartiers et fief du RCK furent envahis et les fans koubéens, sillonnant bruyamment les artères du quartier à bord de leurs véhicules, hissèrent leurs drapeaux sur les toits des immeubles pour un triomphal retour parmi l'élite. Le soir, les scènes de liesse se multiplièrent dans la ville, un feu d'artifice fut tiré et on dansa sur les places tandis que, dans les cafés et les maisons, Hamoud et Coca coulaient à flots. «Kouba, ce soir-là, c'était Rio de Janeiro», dira Rabah Mazziz qui, plus tard, se retirera à Bouzaréah où il occupe un nouveau logement. Moh du quartier la Croix de Kouba : «Un pur moment de bonheur !» «On est en N1 ! C'est dingue ça, non ? La performance est énorme, extraordinaire ! Nous étions une vingtaine de supporters koubéens réunis dans le quartier la Croix, aujourd'hui conscients d'avoir vécu un moment magique avec cette décision finale. On a tous été frappés par la magnifique décision qui nous propulse enfin en division une. On a vraiment apprécié cette ambiance extraordinaire. La salle du cafeteria s'était remplie plus d'une heure avant le coup de fil annonçant la décision du retour parmi l'élite. Vraiment impressionnant ! Nous, nous étions installés dehors devant l'entrée du salon. Cela nous a permis de voir que les gens qui déambulaient, mais qui n'étaient pas impressionnés par le contexte, s'en sont même servis pour “rester dans leur truc” et y puiser une énergie et un sang-froid remarquables. Ils ont vécu 2 semaines à ne penser qu'à cette décision, se persuadant qu'ensemble ils ont pu réaliser l'exploit, le rêve de tout un quartier. Le travail de préparation du staff technique, composé de Latreche, Sidroho [à créditer d'un sans-faute pour le coaching durant la saison 2007-2008] et d'un précieux président, Omar Rebrab, leur a permis de se mettre dans des conditions idéales», nous raconta Moh Lacroix, un des fervents supporters du Celtic de Kouba. Le tricot à bandes vertes et blanches du RCK montrait clairement on appartenance. Saïd R. El Bahia : «Les présidents de la FAF et de la LNF, Haddadj et Ali Malek, ont voulu nous faire chavirer» «Quelques déclarations un rien provocantes, voire irrespectueuses de leurs adversaires [manquant singulièrement d'humilité] et quelques articles de presse rapportant les propos du président de la FAF ou celui de la LNF laissant penser qu'on allait chavirer sans trouver de défenseurs pour plaider notre cause tel un frêle esquif, auront fini de les motiver encore un peu plus. A la présentation des écrits de la décision finale du TAS de Lausanne, dans un vacarme impressionnant, les Koubéens entassés dans un café au lotissement font face à leurs adversaires harrachis, les yeux dans les yeux. Ultime défi avant la célébration de l'événement, Pepsi, Coca démarre sur un air de fiesta, avant que, bien lancés par un serveur très habile, Saïd El Koubaoui, les jeunes prennent la discussion en main… pour pratiquement ne plus jamais la lâcher ! Cela défend dur des deux côtés. Les fautes pleuvent, surtout côté harrachi. Comme au jour du match retour à Benhadad [peut-être mieux !], Saïd dirige ses troupes, donne le tempo, gère le chrono, fait “péter les plombs” à ses adversaires du même quartier et enchaîne : les présidents de la FAF et de la LNF, Hamid Haddadj et Ali Malek, ont prouvé qu'ils ont une dent contre Kouba, sinon comment expliquer le retard pris dans cette affaire alors que la décision est tombée depuis bien longtemps. Nous les laissons à leur conscience s'ils en ont une. En tous les cas, la vérité a éclaté et nous en sommes sortis vainqueurs, Dieu merci.» Mustapha Ronaldo de Garidi 2 :«Ils ont montré leurs incompétences le jour où ils ont accepté que notre sélection nationale se produise sur des terrains répliques» Mustapha Ronaldo de Garidi 2, bien que handicapé par des douleurs au dos après avoir reçu un coup dans un match entre copains de quartier, montre déjà qu'il sera plus présent dès le premier match du RCK. «Jusqu'ici, les Verts sont d'une correction exemplaire, nous sommes restés dans notre quartier, nous n'avons pas voulu aller défiler à El Harrach pour les narguer comme ils l'ont fait eux, bravant même les consignes des agents de sécurité qui formaient le cordon entre le Lotissement et Badjarah. Coup de chapeau pour leur calme et leur attitude exemplaire et Rachid du lycée Hamia [défiant le public harrachi qui lui reprochait une petite provocation au match aller à Kouba] est décidé à aider le club en s'organisant en comité de vigilance et de supporters. Au tout début, nous, supporters, étions un peu inquiets au sujet des décisions de la FAF, de la LNF et du TAS algérien qui s'est déclaré incompétent, mais confiants devant la prestation de nos dirigeants. Et on avait raison. Ces gens sont vraiment incompétents. Ils ont montré leurs limites le jour où ils sont engagés, nos supporters très patients semblaient supporter la pression de l'événement, sans rien dire à ces messieurs qui acceptent que notre équipe nationale se produise en France dans des stades de réplique. Hchouma, aïb. Où est l'honneur ? Fateh le chauffeur de taxi, sans doute vexé des déclarations peu agréables de son camarade à l'égard des membres de la FAF, sort encore une cigarette pour calmer son copain.» Sofiane D. du quartier Approval : «Nous sommes réellement fiers de vous et reconnaissants envers le TAS qui nous a réhabilités dans nos droits» Sofiane de Jolie Vue apporte sa contribution au discours de son ami Mustapha, mais se montre également plus combatif, donnant quelques conseils et avis vraiment précieux. Après un léger moment de doute dans les têtes des supporters. Mais ce dernier n'ira pas avec le dos de la cuillère. «Nous avons remporté la victoire finale qui est vraiment méritée.» La joie, la danse et les cris de tous les enfants du quartier, venant à la rescousse, font plaisir à voir et à écouter. Tous drapés dans des maillots aux couleurs du RCK, ils nous diront : «Nous, dans les tribunes, on est comme des fous !!!» Scènes de liesse au milieu de quelques milliers de supporters de leur équipe forcément très contents. Mouloud, qui ne s'est pas mêlé au débat depuis son début, Omar et Rabah qui ont été informés en dernier, ne sont pas les moins heureux. «Un peu plus tard, après avoir reçu de nombreuses félicitations des supporters d'autres clubs tels que l'USM Alger et le Mouloudia d'Alger, reconnaissant que nous méritions notre victoire, nous, supporters, avons partagé un moment avec les joueurs. On s'est rendu compte qu'ils étaient vraiment heureux, émus même, d'avoir réalisé cet exploit.» Le bonheur visible d'un ammi Ahmed le boucher, d'un ammi Boualem ou d'un Sayeh du taxiphone (pour ne citer que les plus expérimentés) montrait assez bien que ces mecs-là (11 joueurs, bien sûr) venaient de valider par une énorme performance une saison qui aura été grande sportivement, mais aussi, mais surtout, l'histoire d'un groupe de garçons soudés, motivés, talentueux qui ont vécu une «formidable histoire» ensemble. «Merci Messieurs. Bravo ! Nous sommes réellement fiers de vous et reconnaissants envers le TAS qui nous a réhabilités dans nos droits.» Sur le coup de minuit, nous les avons laissés partir pour une nuit qui leur appartenait, longue, joyeuse… et vraiment bien arrosée d'après des sources sûres !!! Pour ceux d'entre nous qui sont rentrés dans la nuit, ce fut un peu pénible physiquement (!), mais on avait une telle banane. Nabil M. de Jolie Vue : «Pour épurer le calendrier, la LNF va nous proposer un marathon jusqu'à essoufflement pour nous reléguer !» Une question reste en suspens, celle de l'exclusivité concernant l'épuration du calendrier pour la période postérieure de la saison 2008-2009. L'examen de ce problème donne l'opportunité de clarifier ce point et d'éviter que se reproduise ce que nous avons connu. Nabil, le plus jeune de tous, a posé la question la plus pertinente. Il a demandé à ses camarades comment la FAF va-t-elle procéder pour épurer le calendrier sachant que Kouba doit disputer 7 matches ? «Nous avons interpellé sur ce point le président de la Ligue nationale de football. Pourriez-vous nous donner des précisions sur les règles qui s'appliqueront aux matches retard que compte le club banlieusard ? Pourriez-vous également nous dire s'il sera possible d'inscrire la faute à l'actif du bilan comptable des matches joués des clubs sportifs ? C'est là une revendication légitime du RC Kouba. Je sais que la LNF va nous proposer un marathon où l'on jouera chaque jeudi et chaque lundi jusqu'à essoufflement. Sinon, cette dernière va nous priver de la trêve hivernale pour rattraper le retard. Mais la question qui se pose est celle-ci : les clubs seront-ils d'accord pour se passer de leurs vacances ? Il faut certes jouer les matches mais je regrette la suspicion qui plane sur chaque performance sportive ou sur chaque drame qui implique ces dirigeants mal dirigés. Je regrette aussi que les mêmes clubs se retrouvent systématiquement dans le collimateur de la FAF ou de la LNF. Ya latif ! Normalement, nous devions agir ensemble, en dépassant les clivages politiques habituels, pour que le sport soit enfin reconnu comme ce vecteur irremplaçable de rassemblement, de convivialité et d'intégration sociale. Oui, le sport contribue à l'émergence d'un véritable art du “vivre ensemble”, car il joue un rôle important dans le développement de la citoyenneté. Mais eux veulent qu'on continue à quitter le pays [nahargo], mais “ahna imout kassi !”» renchérit Billel de Garidi 1. Côté harrachi Rachid B. d'El Harrach :«Nous sommes en division une et nul ne pourra nous déloger !» «Nous sommes en division une et nul ne pourra nous déloger !» C'est en ses termes que s'est adressé à nous Rachid M'hibla. «Qu'ils n'essayent surtout pas de trouver en l'USMH un bouc émissaire. Ce sera une déception qui fera trop mal khouya, si on essaye de rétrograder El Harrach. Car on a trop souffert, on n'a jamais cru en l'équipe comme cette année. Sur les 7 saisons de D2, c'est celle qui a vu le retour du peuple et la famille harrachis. On a frôlé un échec qui aurait fait mal au club pour l'avenir, mais avec le retour de Mohamed Laïb, qui a été vu comme la fin du calvaire, le messie, le club a finalement réalisé le rêve de tout le monde quoi ! L'USMH ne peut rester éternellement en division deux. Nous sommes le charme du football algérien. Tous les matches joués à El Harrach sont des matches derbies avec un stade plein à craquer. Nous créons une ambiance formidable pour encourager cette jeune équipe qui fera parler d'elle dans peu de temps, vous pouvez l'écrire même.» Rabah M. de Badjarah «Nous avons démontré que nous méritons amplement la division une» «Ecoute khouya, enta journaliste ? Imala ekteb weche engoulek.» Ce sont là les propos de Rabah Essefra de Badjarah. «Nous, nous ne sommes pour rien dans cette affaire en ayant gain de cause après avoir formulé des réserves, les Koubéens ne doivent s'en prendre qu'à eux-mêmes pour avoir aligné un jouer “fraudé”. Vraiment dommage pour Kouba qui mérite tout comme nous l'accession, je trouve injuste le comportement de la Ligue et de la FAF à son égard. On dit que nos supporters sont violents et qu'ils ne méritent pas l'accession. Pourquoi ? On n'est pas des sauvages comme on le laisse entendre, nos fans ressemblent à tous les violents du monde entier et la violence n'est pas propre aux Harrachis. Nous avons démontré que nous sommes une équipe de l'élite, nous n'avez qu'à vous référer au classement. Jetez-y un coup d'œil ! Mon cher ami, nous sommes classés 7e avec dix points à 6 points du leader avec la troisième meilleure attaque du championnat. Cela est édifiant, non ?» Mohamed Laïb, président de l'USMH : L'USMHest et restera en D1» Le président du club harrachi, Mohamed Laïb, qui nous a donné son avis sur la décision du TAS de modifier le classement de la division deux 2007-2008, dira que son club n'est pas du tout concerné par les récentes décisions du tribunal de Lausanne et que ce n'est pas son problème. Il dira que son équipe a accédé en formulant des réserves qui étaient recevables. C'est à la FAF donc de trouver la solution au club koubéen. «C'est ne décision qui ne nous concerne pas», a-t-il déclaré. Pour lui, c'est clair, «l'USMH est et restera en D1». Et de conclure : «Je ne veux pas parler de cette affaire, je m'occupe de mon équipe et de son avenir.» TAS, du terrain au tribunal, il n'y a qu'un pas… Un peu de pelouse au centre du tribunal et on s'imaginera presque sur un terrain de football. Les tribunes sont déjà là, les spectateurs aussi, les deux entraîneurs tout autant (procureur d'un côté, avocat de l'autre) et les caméras ne sont pas en reste. Les tribunaux, et le plus célèbre d'entre eux, le Tribunal arbitral du sport (TAS) situé à Lausanne, vont être amenés à devenir les futurs lieux où l'on jugera les prestations sportives, laissant les stades comme une sorte d'amuse-gueule pour les autres. Vous l'avez noté, les décisions se prennent de plus en plus devant le TAS, quels que soient les litiges : matches, transferts ou ruptures de contrat. Bientôt, un nouveau lot fera son apparition pour l'attribution des droits TV : la retransmission des audiences et des délibérations en live. Notez qu'il y aura peut-être plus de spectacles là que sur la pelouse des stades. A l'heure où les ultras titrent dans les stades, trop de pognon tue la passion -ceux-là même qui réalisent des bénéfices énormes via leurs associations plus que juteuses- les actions se multiplient : Sheffield va peut-être récupérer 42 millions d'euros suite à sa descente en division one anglaise, l'Irak n'est plus sûr de voir son titre de champion d'Asie 2007 entériné, Mutu va peut-être devoir payer 17M€ à Chelsea, Dodo s'est fait suspendre en appel pour deux ans… Et ce ne sont que les derniers dossiers en cours, on aurait pu ajouter notamment ceux de l'été concernant la libération des joueurs pour les jeux Olympiques. Aujourd'hui, les sommes d'argent sont telles, la libre circulation des joueurs est telle, l'appât du gain des joueurs est tel (…) et enfin les 5 000 francs suisses que doit payer la faf, et les autres charges pour dédommager le club koubéen, que l'on n'hésite plus à aller devant les tribunaux pour éssayer de faire entendre sa voix. M. G.