Des députés qui défendent bec et ongles ce qui est qualifié de «nomadisme politique», cela n'a rien de surprenant. Cela émane, il faut bien s'en rappeler, d'un parlement qui n'a de politique que la définition. Une bonne partie des législateurs de l'hémicycle Zighout Youcef militent donc pour la liberté de voyager d'une formation politique à une autre. Au grand dam de ceux qui soutiennent, à l'image de madame Louiza Hanoune, un minima de fidélité pour la formation politique qui aura permis au «militant» de passer au statut d'«élu». L'éthique politique est ainsi tenue d'attendre les mandatures à venir. En réalité, elle doit attendre que la chose politique soit réhabilitée et qu'elle soit exercée par ceux qui portent des idées politiques partagées par des franges de la société. Ce n'est malheureusement pas le cas pour notre auguste Assemblé populaire nationale (APN), cette véritable boite d'enregistrement et néanmoins fausse représentation de la société. L'on sait comment les Algériens perçoivent les députés qui sont censés les représenter. En voyant les députés intervenir, les Algériens se disent que «ces gens» ne sont pas dans cette tribune pour défendre des idées ou la condition de leurs électeurs. Mais ils y sont arrivés, dans une grande propension, en véritables opportunistes. En candidats aux privilèges qu'offre le statut de député dans un système structuré par la rente. La démonstration vient d'être donnée une énième fois avec cette déroutante inversion des rôles qui voit le gouvernement suggéré, du moins dans la forme, aux partis une moralisation de l'exercice politique. Pourtant, en règle générale de l'exercice politique, ce sont les formations politiques qui émettent des critiques d'ordre éthique envers le gouvernement. Il est vrai que le pouvoir est tenté de jouer tous les rôles, y compris celui de l'opposition. Mais là, nous sommes en face d'un mélange des genres que seule l'architecture de la scène politique algérienne peut offrir. Le gouvernement propose, dans son projet de loi organique relatif au régime électoral, une sorte de «fair-play politique» à des députés qui, une fois n'est pas coutume, s'y opposent. En proposant que soit déchu «de plein droit de son mandat électif tout élu qui aura rejoint, en cours de mandat, un parti autre que celui sous l'égide duquel il a été élu», le texte invite les acteurs politiques à la discipline partisane qui fait visiblement défaut aux appareils en question. D'où cette aptitude des dissidents à défier le parti pour lequel ils étaient élus. Le «nomadisme politique» aura décidément de beaux jours, de beaux mandats même, devant lui, tant que la conception et l'exercice de la politique ne changent pas. Résoudre cette faille n'est pas une affaire d'amendement de texte. Le remède consiste à redonner son sens à la politique et ses valeurs, pour pouvoir élire un parlement crédible. A. Y.