En présentant jeudi dernier le projet de loi organique relatif aux cas d'incompatibilité avec le mandat parlementaire, le ministre de la Justice et Garde des Sceaux était loin de se douter qu'il allait essuyer quelques vives critiques de la part de certains députés, notamment ceux du Mouvement du changement et de la prédication, dirigé par Abdelmadjid Menasra et du MSP de Bouguerra Soltani.C'est Abdelaziz Mansouri qui ouvrira les hostilités en indiquant que le problème n'est pas tant l'incompatibilité mais plutôt l'utilisation à bon escient de l'immunité parlementaire. «L'incompatibilité du mandat parlementaire est étroitement liée à l'immunité parlementaire», dira-t-il. L'intervenant exprimera son opposition à ce que les activités commerciales, non définies dans le projet de loi, soient exclues de l'exercice du mandat parlementaire. «Si on met à l'écart les patrons d'entreprises et toutes les autres activités citées dans le texte, on se retrouvera avec un Parlement où siégeront les chômeurs, les femmes au foyer et les prolétaires.» Les députés du MSP, eux, n'ont pas beaucoup critiqué le document mais ont émis des réserves quant à l'exclusion des professeurs d'université et des médecins des cas d'incompatibilité, estimant qu'ils ne représentaient pas un grand nombre. «Je crains que l'expression ne devienne la règle dans ces cas», dira Kamel Guergouri non sans préciser que «s'il y avait une éthique politique, nous n'aurions pas eu besoin de ce projet de loi organique».Quant aux élus du FLN, ils n'avaient pas tous la même position, certains ayant même informé qu'ils allaient introduire des amendements pour demander particulièrement l'abrogation de l'article 5 du projet. Lequel article définit les cas qui ne sont pas incompatibles avec le mandat parlementaire. D'autres parlementaires de l'ex-parti unique n'ont pas trouvé matière à critique. Tout comme d'ailleurs leurs collègues du Parti des travailleurs qui se sont adressés à ceux des locataires de l'hémicycle qui estiment que le texte était anticonstitutionnel. «Arrêtez de nous brandir l'anticonstitutionnalité, vous qui avez adopté la loi sur les hydrocarbures (avant d'être révisée) et celle sur les domaines alors qu'elles étaient en contradiction totale avec la Constitution. Mêler l'argent à la politique, c'est créer une arme de destruction massive», a lancé Ramdane Taâzibt. «Nous l'avons déjà vu lors des élections du Conseil de la nation, des hommes d'affaires acheter leur place à coup de milliards. Les lobbies des affaires ont fait pression sur les députés pour qu'ils réintroduisent la légalisation de l'importation de la friperie. Il s'agit aujourd'hui de la survie d'une nation, ce n'est pas un problème partisan.» Mme Bousmaha, pour sa part, a soulevé le fait que le texte n'ait pas prévu l'inéligibilité. «Pourquoi attendre que ces gens arrivent au Parlement pour leur demander de faire des déclarations sur l'honneur ou choisir entre leurs activités et la mission de député ?», s'est-elle interrogée. En effet, l'article 103 de la constitution sur la base duquel a été élaboré le projet de loi sur les cas d'incompatibilité avec le mandat parlementaire, dispose que «les modalités d'élection des députés et celles relatives à l'élection ou à la désignation des membres du Conseil de la nation, les conditions d'éligibilité, le régime des inéligibilités et des incompatibilités, sont fixés par une loi organique (…)».Notons que la commission juridique de l'APN a élargi la liste des cas d'incompatibilité aux présidents de clubs sportifs professionnels et aux membres de bureaux exécutifs des organisations et fédérations professionnelles. Le texte sera soumis au vote le 2 novembre prochain. F. A.