Et si le FLN devenait un patrimoine à protéger ? Ce n'est pas encore le cas, mais un groupe de députés y croit. Au moins 22 parlementaires, issus de bords politiques différents, ont déposé, au niveau de l'Assemblée populaire nationale, un amendement à la loi sur le moudjahid et le chahid pour «élargir la protection légale des symboles de la Guerre de Libération nationale à deux appellations qui ont été les chevilles ouvrières de l'aboutissement de ce combat».Il s'agit, selon la proposition qui a été rendue publique hier, d'ajouter le «Front de Libération nationale» et «Armée de libération nationale» à la liste des symboles de la Révolution. Les députés, dont Ali Brahimi, élu de Bouira, a porté le projet, proposent également d'ajouter un article (52) qui stipule que «l'usage des mêmes noms, sigles et autres signes distinctifs appartenant aux organisations symboles de la Révolution de libération nationale est prohibé. Les organisations dont les appellations et sigles utilisent ces symboles sont tenues d'y renoncer dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi».«Il me paraît en effet absurde que la déclaration du 1er Novembre 1954 soit consacrée symbole de la Libération nationale tandis que le couple FLN-ALN qui en est à l'origine est ignoré», justifie Ali Brahimi dans une correspondance envoyée à la presse. Lui et ses cosignataires disent ne pas vouloir utiliser la situation interne du FLN. Cette initiative est «totalement étrangère aux conflits internes qui agitent le parti du FLN, (et) n'est nullement dirigée contre ses militants», ajoute encore le document. Les rédacteurs de la proposition donnent une autre argumentation à leur geste. «D'illustres vrais moudjahidines -aujourd'hui dans l'opposition ou loin de toute activité politique -assistent, révoltés, à l'instrumentalisation politicienne d'un grandiose combat anticolonial par des acteurs qui n'étaient pas toujours à son avant-garde hier lorsqu'il fallait affronter l'Armée française et les colons. Grâce au peuple et au FLN-ALN, cette épopée nationale a abouti et sa mémoire mérite d'être protégée par l'Etat auquel elle a donné naissance», écrivent-ils encore.Parmi les signataires de la proposition, six sont députés du Front national algérien, FNA. D'autres sont issus soit de l'ANR, soit du Mouvement pour la jeunesse et la démocratie (MJD), soit des indépendants. Parmi ce panel, on trouve également un député du RND, en la personne de Smaïl Mira, fils du commandant Abderrahmane Mira. Des parlementaires d'autres partis, tels El Islah, Ennahda et El Enfitah, ont signé le document.La question de restituer le FLN comme patrimoine commun à tous les Algériens s'est posée à plusieurs reprises. Certains ont même demandé à mettre «le FLN au musée». Chose que les responsables de l'ancien parti unique rejettent. «Le FLN n'ira pas au musée», a répliqué Abdelaziz Belkhadem.La proposition intervient au moment où l'Assemblée populaire nationale s'apprête à étudier la nouvelle loi sur les partis politiques. La loi contient, entre autres dispositions, des articles renvoyant à la protection des symboles de la Révolution avant la création de tout parti politique.Il reste à savoir quelle sera l'attitude du président de l'APN, Abdelaziz Ziari, issu lui-même du FLN. Jusque-là, il a systématiquement rejeté toutes les propositions de loi émanant de l'opposition. A. B.