Qui a dit que c'est «la fin de l'Histoire», lorsque le mur de Berlin s'est effondré ? L'altermondialisme prend forme. L'altermondialisme quitte les salons feutrés et les salles de conférences pour investir les rues de 951 villes à travers le monde. Né en Espagne, le mouvement des indignés se propage à travers le monde, notamment dans les pays du Nord, au cœur des puissances économiques qui se présentent comme le modèle parfait à suivre et faisant du FMI et de la Banque Mondiale leurs instruments de pression sur les pays du Sud. Hier, les indignés ont crié leur indignation en Allemagne, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas. Imitant les révoltés des pays arabes, les indignés occupaient les places publiques des grandes villes en Europe, comme c'était le cas à Madrid, à Athènes, à Paris, à Londres. Plusieurs centaines d'«indignés» ont passé la nuit de samedi à hier, sur le parvis de la cathédrale Saint-Paul, où 70 tentes ont été érigées après le rassemblement, la veille, sur les lieux de quelque 2 000 à 3 000 «indignés». «Nous allons rester aussi longtemps qu'il faudra pour que le gouvernement nous entende et dise qu'il va changer les choses», a prévenu Spyro Van Leemnen, 27 ans, un des représentants du mouvement Occupy London Stock Exchange. Pour lui, la protestation vise à «démocratiser le système financier», et les rassemblements, à Londres et partout dans le monde, «sont un premier pas». Même scénario à Francfort, en Allemagne, où près de 200 personnes ont passé la nuit, dans 30 tentes, devant le siège de la Banque centrale européenne (BCE), symbole de la finance européenne et du dérèglement économique que subissent de plein fouet la majorité des Européens. Aux Pays-Bas, Amsterdam a également vu pousser 50 tentes, plantées sur la place de la Bourse, où des «indignés» ont passé la nuit. Genève, Miami, Paris, Sarajevo, Zurich, Mexico, Lima, Santiago, Hong-Kong, Tokyo, Sydney...., «l'indignation» contre le capitalisme s'est exprimée samedi dernier sur pratiquement tous les continents. Pour Max Bank, de la section allemande du mouvement altermondialiste Attac, fondé en France en décembre 1998, la vague de protestation n'en est qu'à ses débuts. Pour le journal El Pais, «c'est la première fois qu'une initiative citoyenne réussit à organiser de manière coordonnée tant de manifestations dans des lieux aussi disparates et éloignés». «Peuples du monde, levez-vous» ou «Descends dans la rue, crée un nouveau monde», sont les slogans de ce mouvement qui se réclame ouvertement anticapitaliste mais n'a pas encore formulé une perspective claire, ni une alternative capable de bouleverser l'ordre injuste qui renforce les riches et enfonce les pauvres. Les indignés remettent en cause l'ordre économique mondial et toutes les institutions nationales et internationales érigées pour le mettre en œuvre. L'Histoire est en marche. Elle ne s'est jamais arrêtée. Elle prend des chemins sinueux mais finit toujours, comme l'eau, par reprendre son lit. Mais le changement n'est pas une fatalité, n'est pas écrit. Il est à écrire, à faire parce que le changement est l'œuvre de la conscience et de la volonté des Hommes. A. G.