De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar Longtemps folklorisées, voire même dédaignées, les cultures populaires reprennent progressivement de leur vitalité. A la faveur d'une prise de conscience collective et d'un besoin fortement ressenti, les fêtes et les rites locaux reprennent graduellement leur place dans le calendrier populaire. L'apport du mouvement associatif dans cette lente résurrection des pratiques séculaires est essentiel. Un retour aux sources qui s'avère instructif, mais également bien utile en l'absence d'une offre culturelle institutionnelle à la hauteur des attentes. Dans toutes les communes de la wilaya de Béjaïa, le secteur de la culture est quasiment effacé. Hormis le chef-lieu de wilaya où sont organisées d'épisodiques manifestations, les 51 municipalités restantes survivent, depuis des années, dans un vide culturel total. Cette monotonie mortifiante pousse, désormais, les populations à s'organiser pour redonner du sens aux activités traditionnelles. Les savoirs séculaires, les fêtes coutumières et les pratiques ancestrales sont convoqués à l'occasion pour combler ce vide sidéral. Beaucoup de citoyens ignoraient, en partie ou complètement, ce volumineux héritage qui constitue le substrat de la mémoire collective. Les festivités rituelles des sociétés berbères comme Timechret, Dhiafa, Anzar, Amenzou n'yennayer, Ass n'temghart, Aderyis ou Amezouar n'tefsut font partie de ce patrimoine immatériel qu'on redécouvre aujourd'hui avec beaucoup de plaisir. Ce sont des cérémonies populaires étroitement liées au calendrier agraire qui est commun à tout le bassin méditerranéen. A chaque rendez-vous, les comités de villages s'organisent et mobilisent les populations pour se rappeler le souvenir de ces fêtes bucoliques qui accueillent les quatre saisons ou marquent le début et la fin de diverses campagnes agricoles. Tous les villageois assistent aux réjouissances et des visiteurs viennent des autres contrées pour changer d'air et rencontrer du monde. On y organise des expositions. On y propose des objets artisanaux et des produits du terroir à la vente. Sur des airs de musique folklorique, des plats traditionnels sont gracieusement offerts aux participants. Toujours à l'initiative des populations, de vieux villages abandonnés ont été récemment restaurés pour servir de centres de vacances. Les expériences lancées dans ce sens à Tizi N' Berbère et Beni Ksila ont eu un franc succès auprès des estivants. A Aokas, une association locale a aussi piloté une vaste opération de plantation du caroubier, un arbre caractéristique de la région qui tend à disparaître de nos jours. Une initiative qui a également suscité l'adhésion des populations. A Bordj Mira, des activistes bénévoles œuvrent, non sans succès, à la relance de la poterie locale. Si les populations manifestent beaucoup d'intérêt à ce genre de communions, les autorités ne leur accordent aucune attention. Les élus locaux ne s'y rendent que très rarement. L'occasion se prête pourtant à merveille pour nouer le contact avec les administrés et s'enquérir sur place de leurs besoins. Cette dynamique mérite également l'appui et les encouragements de l'administration et des responsables du secteur de la culture.