En conclave depuis jeudi dernier, les membres du Majliss Echoura du MSP ont concédé une petite ouverture à la presse nationale dans ce qu'ils ont appelé «ouverture officielle» des travaux. Le président du Majliss a été le premier à prendre la parole. Il faut dire qu'il n'a pas épargné, ni été tendre avec tous ceux qui ont, à un moment ou un autre, critiqué les positions de ce parti. Même la presse n'y a pas échappé. «Le MSP a fait couler beaucoup d'encre ces derniers temps. De l'encre enduite de haine, de rancune, d'enchères. Mais l'encre du Mouvement est déterminante», a indiqué Abderrahmane Saïdi. Il insistera pour dire que la session du Majliss Echoura est des plus ordinaires. Il s'agira pour ses membres, selon l'intervenant, de discuter du bilan du mouvement au courant de cette année et d'établir des perspectives, «car l'année 2012 sera électorale par excellence». Il s'agira aussi de mettre en place la commission nationale des candidatures, de débattre de la situation politique du pays, des réformes, des relations du MSP avec la scène politique, allusion à l'Alliance présidentielle. Une alliance de laquelle ce parti ne se retire pas, même s'il considère qu'elle est réduite uniquement aux activités parlementaires et au gouvernement. «Nous sommes un mouvement conscient et raisonnable», dira-t-il, avant d'appeler à discuter des divergences et aborder les points qui divisent à l'intérieur du parti avant de prendre des décisions communes qui engageraient l'ensemble du Mouvement. Pour sa part, Aboudjerra Soltani a considéré que la session de la plus haute instance du parti entre deux congrès est ordinaire, et intervient dans un contexte extraordinaire marqué par «le printemps arabe, la prédominance des débats sur les réformes et les divergences avec les alliés». Le patron du MSP lancera plusieurs avertissements, les mêmes qu'il a déjà lancés pendant les discussions des lois au niveau du Parlement, lorsqu'il a appelé à ne pas rater le coach des reformes sous peine de mener le pays vers l'inconnu : «Le peuple a payé par deux fois la facture des erreurs du pouvoir. Celles induites par le parti unique en 1988 et celles de la démocratie anarchique qui a plongé le pays dans la décennie rouge.» Et d'avertir : «Les évènements de janvier 2011 peuvent être réédités car les conditions ayant présidé aux émeutes n'ont pas disparu.» L'ex-ministre d'Etat sans portefeuille reviendra sur ce qu'il qualifie d'échec des réformes politiques diluées par la majorité parlementaire que constituent le FLN et le RND. Elles ont été réduites, selon lui, à de simples réformes partisanes, notamment en ce qui concerne le rejet des amendements proposés par son parti et d'autres. Il accusera ses alliés d'avoir réduit l'Alliance présidentielle à la mise en œuvre exclusive du programme du président de la République. «mais il se trouve que ce sont eux qui ont fait échouer les réformes du président.» Il dénoncera par-là même le refus du FLN et du RND d'ériger l'Alliance en partenariat politique. M. Soltani estime qu'il faut absolument rectifier le tir en révisant le processus politique sous le slogan de «Défendre les libertés». Il a appelé à la conjugaison de tous les efforts pour faire des réformes un succès «afin de satisfaire le peuple, et faire en sorte qu'il se rende aux urnes le jour des élections.» Et, en réponse aux détracteurs de ce parti qui jugent qu'il a révisé ses positions, il dira : «Le MSP n'a changé ni ses positions ni ses convictions. Ce sont plutôt les conditions qui ont changé, et nous devons nous y adapter.» L'ex-ministre du Travail est revenu sur les contributions du MSP dans tout le processus qu'a connu le pays depuis 1994, après la conférence nationale. Il a rappelé les activités du parti et de son groupe parlementaire, notamment lors de cette session d'automne : «Ce qu'a fait le Mouvement jusqu'à maintenant au sein de l'Alliance était un devoir basé sur l'exégèse politique marquée par la réconciliation nationale comme priorité. Mais aujourd'hui, les priorités ont changé et le devoir national nous commande de combler le vide laissé par les réformes pour consacrer l'Etat de droit.» Il appellera à des alliances, même si auparavant il avait affirmé que l'année 2012 était celle de la concurrence et non des alliances. Dès lors, l'on comprendra que les alliances dont il parle sont exclusivement destinées à l'autre mouvance islamiste constituée par Ennahda, le parti de Djaballah, et les militants de l'ex-FIS. L'appel du pied de Soltani était flagrant. L'intervenant dira que son mouvement aspire à la réalisation de sept objectifs à l'occasion du cinquantenaire du recouvrement de l'indépendance du pays. «Plaidoirie pour l'instauration d'un régime parlementaire, la lutte pacifique pour arracher plus de libertés, mettre les jalons pour un véritable Etat de droit et la séparation des pouvoirs, la contribution dans la mue vers la démocratie», entre autres. Le président du MSP n'effleura pas son retrait ou pas de l'Alliance, mais il laissera entendre que l'engagement pris en 2004 l'a été envers le président de la République, et le Mouvement compte bien s'y tenir jusqu'en 2014. En plus clair, pas de retrait ni du gouvernement ni de l'Alliance. Sauf coup de théâtre. F. A.