Photo : Riad De notre correspondant à Tizi-Ouzou Lakhdar Siad
Jadis centre de rayonnement scientifique et fer de lance des combats politiques et sociaux, l'université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou est devenue une université quelconque sans relief apparent de savoir et de production d'énergies novatrices. Ces dernières années, les débats au sein de la communauté universitaire concernent beaucoup plus les questions de sécurité, les agressions d'étudiants dans l'enceinte même des cités universitaires, la fuite des quelques compétences encore en poste, le manque énorme d'encadrement de haut niveau, la déliquescence de la gestion des œuvres sociales universitaires, etc. à l'université Mouloud Mammeri, rarement on a entendu parler de nouveautés qui réjouissent la population et qui font honneur à la communauté estudiantine et au corps enseignant et administratif. La violence sur le campus et devant les cités, les plaintes, les rendements de comptes entre groupes d'intérêts mesquins, et la mauvaise gestion des aires universitaires occupent plus souvent les discussions sur la situation de l'université reléguant au second plan les aléas de l'application du système LMD et ses retombées sur la qualité de l'enseignement universitaire, le rapport entre l'université et l'environnement économique local, la contribution de l'université au développement de la recherche sur les économies régionales, l'apport au débat sur l'avenir politique de la région de Kabylie, les opportunités de partenariat, d'échange et de jumelage avec les universités étrangères, etc. Comme au début de l'année universitaire 2010-2011, en pleine généralisation du nouveau système LMD (licence, mastère et doctorat), cette année encore, la question de l'encadrement dans son aspect quantitatif et qualitatif a occupé une bonne partie de l'actualité universitaire à Tizi-Ouzou. Dans certaines formations spécialisées telles que les sciences médicales, l'inscription au doctorat est pratiquement problématique en raison du manque d'encadrement de niveau requis et le manque de moyens didactiques de recherche scientifique. Dans cette spécialité, à l'université Mouloud Mammeri et en contradiction avec des normes scientifiques appliquées dans la formation des diplômes de cette filière, on compte seulement 8 professeurs, 5 docents et 155 médecins pour un total d'étudiants inscrits estimés à 3000. Un des résultats de cette politique qui semble vouée à l'échec : même pas une dizaine de soutenances de doctorat depuis l'existence de la filière à Tizi-Ouzou. On parle de la surcharge des activités professionnelles des enseignants au niveau du CHU Nedir Mohamed de Tizi-Ouzou délaissant ainsi le volet formation des étudiants et le manque de conditions sociales adéquates comme le logement, les moyens pédagogiques et scientifiques dérisoires. Au sujet de l'encadrement, l'université de Tizi-Ouzou (UMMTO) dispose de 1680 enseignants permanents alors qu'elle aurait besoin d'un «effectif théorique» de 3100 enseignants permanents, en respect des normes universelles qui supposent un enseignant pour 15 étudiants, faisant au total un manque à gagner de plus de 1100 enseignants permanents notamment les filières d'architecture, les sciences économiques et les filières de langues étrangères. De leur côté, les responsables de l'université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou ont annoncé cette année que l'offre de formation dans le système LMD a été enrichie au titre de l'année universitaire en cours par le rajout de 23 nouvelles formations de licence et 22 autres de mastère. Ainsi, les offres de formation sont passées de 42 à 65 pour la licence et de 39 à 61 pour les offres de formation de mastère, selon le vice-rectorat chargé des formations graduées. L'université Mouloud Mammeri a accueilli pour cette rentrée universitaire environ 47 000 étudiants, dont 9013 nouveaux inscrits dans 18 filières. 55 % de cet effectif sont inscrits dans le régime LMD, selon la même source qui précise le basculement total vers le système LMD de toutes les filières, à l'exception de celles de médecine, pharmacie et chirurgie dentaire. Une note de joie qui ne peut malheureusement rien devant l'ampleur des dégâts que l'université Mouloud Mameri de Tizi-Ouzou : celle-ci a été choisie récemment par l'Association des universités africaines (AUA), basée au Ghana, pour «piloter un projet d'harmonisation» de l'enseignement supérieur dans le domaine du génie civil et de la construction pour les universités du continent africain, elle a été retenue parmi 800 universités africaines pour la mise en œuvre du projet qui s'insère dans le cadre d'un programme compris dans un protocole de coopération entre l'Union africaine et l'Union européenne.