Le théâtre régional Kateb Yacine de Tizi Ouzou a abrité dans la soirée de samedi dernier la cérémonie d'ouverture de la douzième édition du Festival culturel national annuel du film amazigh (FCNAFA). Devant des centaines de personnes, dont de nombreux invités parmi des artistes et des professionnels du septième art, le wali de Tizi Ouzou a ouvert officiellement la manifestation dans laquelle une quinzaine de films, longs métrages, courts métrages et documentaires sont en compétition pour l'Olivier d'or. Une dizaine d'autres œuvres seront également en compétition dans une nouvelle catégorie : celle du jeune talent que les membres du commissariat ont instituée pour encourager les jeunes cinéastes en herbe à persévérer dans le 7e art.Il y avait beaucoup d'émotion sur la scène du théâtre régional Kateb Yacine quand on a annoncé au public la décision des membres du commissariat de décerner un Olivier d'or d'honneur au réalisateur Abderrahmane Bouguermouh, remis par le président du jury, Aomar Hekkar, pour toutes ses œuvres cinématographiques, mais aussi en tant que pionnier du film amazigh, avec La Colline Oubliée qu'il a réalisé durant la décennie quatre-vingt-dix. Beaucoup d'émotion donc lors de cette cérémonie, plutôt simple et sobre, qui a vu la présence de grands noms de la culture algérienne, dont Saïd Hilmi, Fawzi Saïchi dit Rmimez et Lounis Aït Menguellet. Au programme, il y avait également de la poésie avec Benmohamed qui faisait lecture d'un poème, repris à chaque fois en chant par le chanteur Hamidou. De la poésie aussi avec Abdelmadjid Bali, précédé par un achwiq présenté par Khadidja Hamsi.Cette manifestation dédiée au réalisateur de La Montagne de Baya, le défunt Azzedine Meddour, au monument de la chanson kabyle récemment disparu, Cherif Kheddam, ainsi qu'à notre collègue chroniqueur, le défunt Abdou B. qui a longtemps été journaliste spécialisé dans le cinéma, a jeté son dévolu sur le cinéma libyen qui est à l'honneur à l'occasion de cette 12e édition. D'ailleurs, deux réalisations ont été projetées lors de cette cérémonie d'ouverture : Djeha, un film d'animation de Madghis Madi et Partage, une fiction d'une dizaine de minutes réalisée par Salah Kouider. Ce dernier, avec peu, très peu de moyens a transmis à travers son film plusieurs messages, même sans dialogue ni narration. Un film muet qui raconte l'histoire d'un garçon et de sa sœur qui portent une paire de basket à tour de rôle (pauvreté, puis partage, solidarité) pour aller à l'école. Une explosion arrachera à ces deux enfants une jambe chacun (violence) ce qui réglera définitivement le problème de la paire de basket. Mais au-delà de la pauvreté en Libye, du partage et de la solidarité dont la société libyenne a fait preuve dans les moments difficiles, y compris lors de violences, le réalisateur cherche vraisemblablement à transmettre aussi un autre message à travers son choix de faire de son œuvre un film muet. Le silence imposé au peuple libyen en général et aux Amazighs de Libye en particulier sous la dictature du colonel El Gueddafi, et probablement même sous le règne des nouvelles autorités libyennes qui semblent avoir tourné le dos à la revendication amazighe. Selon l'un des jeunes réalisateurs libyens présents sur scène, après 40 ans de négation, les Imazighen libyens ont «réussi à réaliser six films en à peine quatre mois de liberté». Les nouveaux maîtres de Tripoli laisseront-ils le cinéma amazigh de Libye prospérer ?