Photo : Sahel Par Karima Mokrani L'augmentation continue des accidents de la circulation en Algérie scandalise les associations des personnes handicapées. Cela fait des années depuis qu'elles activent sur le terrain pour la défense des droits de ces nombreuses victimes et la promotion d'une politique nationale de leur intégration sociale et professionnelle, et ces associations s'aperçoivent de l'inefficacité de leur travail. Campagnes d'information et de sensibilisation sur les dangers de la route, séminaires, déplacements dans les écoles, les établissements du secondaire…et interpellations incessantes des représentants des pouvoirs publics sur la nécessité de prendre de meilleures dispositions pour arrêter l'hécatombe. En vain. La moyenne nationale de 4 000 morts par an sur la route, avec au moins 3 000 personnes sur fauteuils roulants, ne baisse pas. Bien au contraire, les victimes de la mauvaise utilisation d'un outil aussi pratique et agréable que la voiture sont en croissance permanente. Le paradoxe, c'est que les pouvoirs publics eux-mêmes affirment être engagés dans la lutte contre ce phénomène, déployant des moyens matériels, financiers et humains et prêtant attention aux revendications et aux suggestions des différents partenaires dont justement les associations de soutien aux personnes handicapées. Des amendements ont été introduits dans le code de la route et des mesures répressives décidées à l'encontre des contrevenants. Les associations sont considérées comme un partenaire incontournable dans la lutte contre le spectre. Le fléau, dirions-nous. Ça ne marche pas et ça risque de ne jamais marcher si l'on en juge par le nombre impressionnant des véhicules sur la route et le comportement irresponsable des conducteurs derrière le volant.«Les chauffards nous ont déclaré la guerre et si ça continue, nous allons tous mourir sur la route ou devenir tous des handicapés» a déclaré récemment Mme Flora Boubergout, présidente de l'association El Baraka. La dame est très active dans le domaine de la sécurité routière, étant elle-même victime d'un grave accident de la circulation, elle et son mari. Tous les deux s'en sont sortis psychologiquement mais pas tout à fait physiquement puisqu'ils gardent toujours les séquelles du terrible drame vécu il y a plus d'une dizaine d'années. Depuis, Mme Boubergout, une femme forte de caractère et déterminée dans tout ce qu'elle entreprend, ne rate pas un événement pour alerter sur les dangers de la route mais aussi plaider la cause de toutes les personnes handicapées. Celle de mener une vie simplement normale malgré leur handicap. Ce qui est rarement le cas. Selon la présidente de l'association El Baraka, le problème réside dans l'inefficacité des politiques de prévention conçues et suivies jusque là. «La prévention avant tout…», insiste-elle, recommandant au ministère de l'Education nationale d'introduire des cours de sécurité routière dans le cursus scolaire à tous les niveaux. Par ailleurs, Mme Boubergout considère que les sanctions décidées jusque là restent insuffisantes et appellent à leur durcissement, en ce qui concerne notamment le retrait du permis de conduire: «La mesure portant sur le retrait du permis de conduire pour une durée limitée a montré son inefficacité. Il est temps de penser au retrait définitif de ce permis». Une autre dame, très active dans le domaine, est Mme Atika El Mammeri, présidente de la Fédération nationale des handicapés moteurs. Clouée dans un fauteuil roulant depuis plus d'une quinzaine d'années, elle aussi, suite à un terrible accident de la route, elle ne cesse de se battre avec courage pour la protection des droits des personnes handicapées. Mme El Mammeri pense aujourd'hui qu'il est nécessaire de renforcer la coopération avec les ONG de façon à travailler ensemble sur la définition des actions à engager pour assurer le bien-être des personnes handicapées et leurs familles, ainsi que leur intégration sociale et professionnelle. Aussi, la représentante de la FNHM appelle à la tenue d'assises nationales impliquant directement les personnes handicapées, celles-ci étant les mieux placées pour parler de leurs problèmes et de leur vision des choses à court, moyen et long terme. D'autres associations engagées dans le domaine méritent d'être saluées et encouragées pour leur travail en faveur de ces personnes. Car, malgré leur déception des résultats que l'on peut qualifier de médiocres, obtenus jusque là, elles poursuivent le chemin de la lutte…sans regarder en arrière ni s'arrêter. L'essentiel, c'est l'objectif.