Photo : S. Zoheir Par Karima Mokrani On ne parle plus de personnes handicapées mais de personnes aux besoins spécifiques. Elles souffrent de handicaps sans être pour autant «handicapées». Pourvu qu'on leur donne les moyens de s'affirmer dans une société en pleine mutation, qu'on leur manifeste de l'intérêt et du respect. Voilà ce pour quoi les associations militent au quotidien. Elles sont là et interviennent sérieusement et efficacement pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes qu'elles représentent. C'est une réalité tangible qui se vérifie tous les jours sur le terrain. Atika El Mameri avait 24 ans lorsqu'une force invisible et imprévisible s'est mise sur son chemin de femme libre, autonome… et l'a arrachée à son rêve de partir en France pour la réalisation d'un projet qui lui tenait à cœur. La destinée a décidé de lui faire subir un choc terrible en l'éjectant d'une voiture au moment du bref plaisir d'une randonnée familiale et de la clouer dans un fauteuil roulant. Tout un dessein pour un autre dessein : celui de servir une mission noble, celle de défendre les droits des personnes handicapées. C'est ainsi que la jeune femme s'est retrouvée à la tête de la Fédération nationale des associations des personnes handicapées, se battant pour la dignité et le respect de ces hommes et de ces femmes condamnés à la marginalisation et à l'exclusion. L'association qu'elle préside est connue de tous les représentants des pouvoirs publics mais aussi de la société civile tellement elle travaille avec sérieux et engagement. Atika El Mammeri ne rate pas une occasion de parler des problèmes des personnes handicapées, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays, et de proposer des plans et des idées pour leur insertion sociale et professionnelle. La jeune femme suscite l'admiration par son franc-parler et la puissance de ses mots. Elle ne parle pas pour ne rien dire ; quand elle parle, elle titille les sentiments et interpelle les consciences, toute charmante et coquette, dans son fauteuil roulant qu'elle ne quitte jamais sans l'aide d'une tierce personne. Flora Boubergout, la présidente de l'association El Baraka, et son mari ont subi le même sort. Tous les deux étaient à bord d'une voiture, sur une route paisible lorsqu'une autre, roulant à grande vitesse, les a surpris dans leur petit déplacement. Le couple a vécu au moins trois années de souffrance et de douleur mais a réussi à s'en sortir. L'homme et la femme ont surmonté le choc, la douleur, les difficultés de commencer une nouvelle vie… et se sont lancés dans la bataille pour la défense des droits de ces personnes aux besoins spécifiques. Mme Boubergout, tout comme Melle El Mameri, ne manque pas une occasion de parler de ces personnes, de leur souffrance au quotidien, de la nécessité de leur venir en aide… mais aussi de mettre en garde contre les dangers de la route, étant elle-même victime d'un accident de la circulation. Elle participe pratiquement à toutes les rencontres nationales, tous les débats qui portent sur les deux phénomènes, se fait inviter par les chaînes de télévision et de radio et va jusqu'à interpeller des ministres et des représentants de l'Etat lors de leurs déplacements sur les différents chantiers de la capitale. Contrairement à Melle El Mameri, Mme Boubergout marche sur ses deux pieds, à l'aide d'une béquille. Flora, dont le prénom se rapproche du mot «fleur», est une femme pleine d'énergie, d'ambitions et d'initiatives. Elle a le verbe et le contact faciles avec toutes les personnes, toutes catégories confondues. Il faut voir comment elle interpelle de simples citoyens en visite dans les Salons de la Safex où, souvent, un stand est réservé à son association, pour constater à quel point cette femme ne recule devant rien pour faire entendre la voix des personnes handicapées. Atika El Mameri et Flora Boubergout, pour ne citer qu'elles, se donnent à fond pour le travail. Elles aiment ce qu'elles font et le font avec grandeur et amour. Grâce à elles, les personnes handicapées ont fini par arracher des droits, si minimes soient-ils.