Après avoir pris le contrôle de Gao samedi dernier, les rebelles touareg sont entrés à Tombouctou hier, et la principale composante de la rébellion, le Mouvement national pour la libération de l'Azawad (Mnla) a annoncé avoir pris le contrôle de la ville historique et de sa région entière, dernière ville du nord-est du Mali encore sous contrôle gouvernemental. La chute de Tombouctou, située à environ 800 km au nord-est de Bamako, consacre ainsi la mainmise des rebelles sur la quasi-totalité du nord du Mali. La junte militaire, qui a renversé, le 22 mars dernier, le président malien Amadou Toumani Touré -accusé d'avoir été incapable d'endiguer l'offensive des touareg, déclenchée en janvier- est aujourd'hui en déroute face à l'avancée éclair des rebelles. Elle a annoncé hier qu'elle va «rétablir» la Constitution et les institutions. «Nous prenons l'engagement solennel de rétablir à compter de ce jour la Constitution (...) ainsi que les institutions républicaines», a déclaré le chef des putschistes, le capitaine Amadou Sanogo. Il a annoncé «des consultations avec toutes les forces vives du pays dans le cadre d'une convention nationale», sous les auspices des pays de l'Afrique de l'Ouest pour permettre «la mise en place d'organes de transition en vue de l'organisation d'élections apaisées, libres, ouvertes et démocratiques». Il a confirmé que la junte n'y participerait pas, mais sans préciser la durée ni les termes de cette transition. Il n'a pas évoqué le sort du président Touré. Le chef de la junte s'exprimait aux côtés du médiateur ouest-africain, le chef de la diplomatie burkinabé, Djibrill Bassolé, venu négocier les modalités d'un retour à l'ordre constitutionnel exigé par les pays de la région et la communauté internationale. Cette dernière avait brandi la menace d'un «embargo diplomatique et financier». De son côté, la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a mis samedi dernier une force d'intervention de 2 000 hommes en «alerte». Profitant de la désorganisation des forces armées après le coup d'Etat, les rebelles ont réussi hier à prendre le nord du pays, le divisant ainsi en deux. Plusieurs villes clés sont maintenant sous le contrôle des rebelles, à savoir Kidal, Gao, Ansongo, Bourem et Tombouctou. Selon des sources concordantes, les rebelles ont négocié, hier, leur entrée à Tombouctou avec une milice arabe loyaliste qui avait pris position après la défection de la plupart des soldats réguliers. Selon les miliciens loyalistes, plusieurs groupes rebelles ont participé à l'encerclement de Tombouctou aux côtés de la principale composante de la rébellion du Mouvement national pour la libération de l'Azawad (Mnla). Il s'agirait en particulier du groupe islamiste Ansar Dine du chef touareg Iyad Ag Ghaly, des éléments d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) -ce que le Mnla dément régulièrement- et du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), une dissidence d'Aqmi, dirigée par des Maliens et des Mauritaniens, qui a revendiqué sa participation à l'attaque de Gao. L'Algérie, pays frontalier avec le nord du Mali, a tenu à rappeler hier que la restauration rapide de l'ordre constitutionnel au Mali est «une exigence politique» qui permettra de renouer avec un processus démocratique et la mise place d'un leadership politique légitime dans ce pays. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, M. Amar Belani, a, dans une déclaration rendue publique hier, annoncé que l'Etat a pris acte de l'engagement solennel du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l'Etat de rétablir à compter de ce jour la Constitution de la République du Mali du 25 février 1992 ainsi que les institutions républicaines. L'Algérie appelle de nouveau, «de manière pressante et solennelle» à l'arrêt des hostilités, qui connaissent, a ajouté le porte-parole du ministère, «une dérive inquiétante» dans le nord du pays, et engage tous les acteurs à «faire preuve de retenue et de s'inscrire dans une logique politique qui soit en harmonie avec les aspirations des populations et les efforts des pays voisins visant à accompagner le Mali dans la voie du recouvrement de la légitimité et de la stabilité». «L'Algérie demeure confiante dans la capacité des Maliens, par-delà leurs appartenances politiques, à transcender les difficultés actuelles pour promouvoir une solution politique», a également déclaré M. Belani qui a enfin ajouté que cette solution «favorisera le règlement de la crise institutionnelle née du coup d'Etat et relancera le dialogue entre Maliens afin de définir le règlement de la question du Nord, fondé sur les intérêts supérieurs du peuple malien et la préservation de l'unité nationale et de l'intégrité territoriale du Mali». H. Y./Agences