La crise que vit le parti du Front de libération nationale a franchi une nouvelle étape. Plus de 220 membres du comité central s'étaient rassemblés, hier matin, dans l'enceinte du siège du parti, à Alger, pour signer une motion de destitution de l'actuel secrétaire général, Abdelaziz Belkhadem.Il n'y a plus l'ombre d'un doute. Des personnalités, pourtant proches de Abdelaziz Belkhadem, se sont montrées au grand jour. Des hommes, jusque-là fidèles au secrétaire général du FLN, tonnent, à présent, une nouvelle rengaine. Layachi Daâdouaâ, Hocine Kheldoun, Nadir Boulekroune ou encore Mohamed Bouazara partagent désormais le même combat que Mohamed-Seghir Kara, une des figures les plus emblématiques du mouvement de redressement. Tous demandent la tête du secrétaire général, Abdelaziz Belkhadem. «C'est la preuve que nous avons eu raison. Cet homme (Belkhadem, ndlr) a commis une dérive idéologique, politique et, maintenant, organique», s'est réjoui Kara, qui fait ainsi une entrée fracassante au siège de Hydra. L'embrassade qu'il a eue avec Boudjemaâ Haïchour, un des meneurs de l'actuelle fronde, est révélatrice de l'accord tacite qu'il peut y avoir entre les deux tendances. Pourtant, le groupe de Goudjil (qui s'est démarqué de l'action d'hier à titre personnel) a confectionné des listes «indépendantes» dans au moins 17 wilayas. Ces candidats feront la concurrence des listes officielles du parti. L'ancien ministre de la Poste, Boudjemaâ Haïchour, a usé de termes très violents envers le secrétaire général. Belkhadem «a comme mission de briser le parti», a-t-il dit. Pis, il qualifie l'actuel secrétaire général de «traître qui veut déstabiliser le FLN, donc le pays, au moment où l'Algérie est menacée de toute part». Pourtant, Boudjemaâ Haïchour et ses amis savent très bien que les listes pour les législatives, sujet de la contestation qui les a réunis, ne peuvent plus être revues. Des militants venus d'un peu partout n'ont pas boudé leur plaisir. Ils criaient à tue-tête : «Belkhadem dégage.» Ils ne sont pas tous membres du comité central du parti. C'est le cas de Hacen Badache. Il est docteur d'Etat. Il est de Constantine. Il s'insurge contre la désignation de Mme Bahloul comme tête de liste dans sa wilaya. Lui, comme d'autres, contestent les listes électorales décidées par «deux ministres qui prennent en otage le parti». Haïchour a désigné, de façon claire, Tayeb Louh et Rachid Harraoubia. Deux noms qui reviennent dans la bouche de la majorité des contestataires. Dans une motion de destitution lue par Mohamed Bourzane, les signataires, au nombre de 221, appellent à la convocation d'une «session extraordinaire» du comité central et ce, «dans les plus brefs délais» afin de «pouvoir, dans le cadre de la légalité et de la démocratie, sauver le parti et corriger sa trajectoire par l'élection d'une nouvelle direction pour la gestion de ses affaires». Les contestataires ont fait savoir que leur retrait de confiance au SG et au bureau politique du parti «intervient en réponse à la grande préoccupation et à l'inquiétude grandissante des militants, des cadres et des sympathisants du parti quant aux pratiques irresponsables et aux violations flagrantes des statuts du parti et des résolutions du comité central par le secrétaire général et son bureau politique». Les membres du comité, dans leur motion, ont imputé à M. Belkhadem l'entière responsabilité de l'élaboration des listes «sur la base du népotisme, des allégeances et de l'influence de l'argent, lesquels ont suscité des foyers d'anarchie et de division dans les rangs du parti». Un appel y est lancé à la participation pour la réussite des prochaines élections législatives en vue de «préserver le leadership du parti et du courant patriotique, sans le secrétaire général actuel et son bureau politique qui ont perdu leur légitimité et leur crédibilité». Une correspondance est envoyée au secrétaire général afin de convoquer une session extraordinaire du comité central. Dans le cas contraire, les contestataires menacent de tenir la réunion sans Abdelaziz Belkhadem et son bureau. Pour cela, 2/3 des membres du comité central (théoriquement 351 membres) doivent être réunis. Abdelaziz Belkhadem, absent du bureau et injoignable, a fait savoir, dimanche dernier au soir, que «toute initiative visant à organiser une réunion ne répondant pas aux conditions, est considérée comme illégitime», conformément à l'article 42 des statuts qui stipule que «le secrétaire général est seul habilité à convoquer les réunions du comité central, qu'elles soient ordinaires ouextraordinaires». Les contestataires, qui ont occupé le siège durant toute la matinée d'hier, se sont dispersés dans le calme. Ils ont promis de revenir dans «les plus brefs délais» pour une vraie session «extraordinaire» du comité central. A. B.
Le FLN qualifie la réunion des protestataires d'«action d'expression de mécontentement» La direction du parti du Front de libération nationale (FLN) a qualifié, hier, la réunion de membres du comité central (CC) au siège du parti, ayant appelé au retrait de confiance à M. Abdelaziz Belkhadem, d'«action d'expression de mécontentement», relevant qu'elle ne peut être celle du comité central. Dans un entretien à l'APS, le chargé de la communication, M. Kassa Aïssi, a affirmé, en réaction à l'appel de certains membres du CC du FLN, que «la réunion d'aujourd'hui n'est pas celle du comité central, mais nous la considérons plutôt comme une action d'expression de mécontentement et un sit-in de protestation qui a regroupé une soixantaine de membres du comité central et plusieurs autres jeunes», non membres. «Cette action s'est déroulée dans la cour du siège du parti et a regroupé uniquement une soixantaine de membres du CC et plusieurs autres jeunes», au moment où, a-t-il ajouté, le secrétaire général du parti, M. Belkhadem, était dans son bureau. M. Aïssi a indiqué que le bureau politique (BP) du FLN a enregistré cette action des protestataires qu'il va examiner.