Photo : M. Hacène Par Mohamed Touileb Après deux saisons sous l'ère professionnelle, le bilan reste décevant et le football algérien ne cesse de régresser à l'image des faibles performances enregistrées par nos clubs sous la forme d'éliminations précoces dans les compétitions continentales. Les progrès, il n'y en a pas eu. Enfin, si. Les salaires des joueurs deviennent de plus en plus astronomiques, limites exagérées avec des exigences salariales infondées et auxquelles la Fédération algérienne de football (FAF) a tenté de mettre un terme avec une nouvelle loi : chaque joueur est obligé de signer un contrat de deux ans minimum et n'est pas autorisé à percevoir plusieurs mensualités à l'avance. Aussitôt cette loi promulguée, les premiers «rebelles» s'illustrent. Même si la durée du contrat (2ans) a été respectée, les nouveaux signataires réclament toujours des «avances», allant parfois jusqu'à 5 mois de salaire. Les responsables eux, restent de marbre face à ces écarts commis par des «pseudo-footballeurs» qui ne connaissent qu'une chose, signer et encaisser l'argent. Pire, des joueurs ont fait mieux en signant deux contrats avec deux équipes différentes. Une première dans l'histoire de la balle ronde. Chemseddine Nessakh, par exemple, n'a pas hésité à parapher un contrat avec l'USM Alger avec laquelle il s'était engagé avant de faire «marche arrière» et d'opter pour l'ASO Chlef. Dans le règlement, un joueur qui signe deux contrats différents doit être sanctionné par une année de suspension. L'ex-joueur de la JS Kabylie l'a échappé belle. Comment ? On ne le saura jamais. Face à des frasques pareilles, la Ligue du football professionnel (LFP) n'a pas bougé le petit doigt et laisse le football algérien sur une poudrière qui risque d'exploser d'un moment à l'autre. Le mot professionnel signifie bien deux choses : respect et bons comptes. En Algérie, personne ne demande de compte à personne et l'argent coule à flots. Avec l'apparition d'une nouvelle mode, celle des entraîneurs étrangers qui envahissent la scène footballistique. Des chefs de barre technique de 3e, voire de 4e rang, méconnus dans leur pays et qui voient leur cote monter en Algérie. L'Algérie est devenue un Eldorado pour des entraîneurs comme Alain Geiger, Alain Michel ou Robert Nouzaret qui ont rebondi dans le championnat algérien avant de devenir des pointures en la matière. Enfin, un entraîneur de renom Roger Lemerre, ça vous dit quelque chose ? Eh ? Oui ! l'ancien sélectionneur de l'équipe de France a pris -c'est officiel- les rênes du CS Constantine. Le Français n'est ni plus, ni moins qu'un ex-champion d'Europe et champion d'Afrique successivement avec les Bleus de l'équipe de France et la Tunisie. Un CV riche, très riche même, dont le club de l'est algérien pourra bénéficier à partir de cette saison. Un apport considérable pour ce club et pour le championnat algérien. A la clé, un salaire mensuel de 30 000 euros (soit 450 millions de centimes). Raisonnable, vu les salaires que touchent certains joueurs. C'est donc un gros coup réalisé par le président Mohamed Boulhabib, intelligent surtout, lorsqu'on sait que l'USM Alger a fait des mains et des pieds pour s'attacher les services de Roland Courbis dont l'envergure est beaucoup moindre que son compatriote Roger. Le Champion du monde 1998 avec la France (il était l'adjoint d'Aimé Jacquet) tentera d'apporter toute son expérience et son savoir-faire pour mener le CSC au sommet de la hiérarchie footballistique en Algérie. Le chairman du club, M. Boulhabib, vient peut-être de réaliser la transaction de l'été et de montrer le flair du boss. Ça bossera dur dans la ville des Ponts cette saison. Le MCA, tout ça pour ça Tout le monde voulait chasser Omar Ghrib, mais le bonhomme est toujours à la tête du Doyen des clubs algériens. Que ce soit le vent sibérien ou le mistral, toutes les tempêtes du monde n'ont pas réussi à déraciner Ghrib du trône mouloudéen. Quittant le vaisseau Vert et Rouge à un moment donné, il a décidé d'y revenir après la fin de l'«épisode Loungar» pour poursuivre son «règne» avec une activité débordante sur le marché des transferts qui laisse pantois d'autant qu'il avait déclaré que «le club était très endetté et que pour partir il devait toucher les quelque 7 milliards qu'il avait dépensés de ses propres deniers depuis qu'il est devenu le premier responsable du team algérois». Dernière recrue en date, l'international algérien Hachoud pour 300 millions par mois ??? Une somme mirobolante mais qui n'étonne plus personne sachant que des joueurs moyens, voire très limités au double plan technique et tactique, perçoivent des sommes tournant autour de 90 millions de centimes/mois. Les contrats juteux attirent même les joueurs qui évoluent en National en France ou même de D2 française. Certains n'hésitant même pas à faire le chemin inverse et viennent de l'autre côté de la Méditerranée pour «soigner» leurs comptes bancaires, ni plus ni moins, puisque la majorité d'entre eux n'ont plus le niveau pour jouer ailleurs ou failli à faire leur preuves. A titre d'exemple, l'ancien joueur du MCA, Brahim Bedbouda ayant réussi à décrocher un (vrai) contact pro avec le FC Mans (D2 française) et qui est de retour au pays après une (courte) pige d'un an. Il a choisi l'autre club algérois, Rouge et Noir pour rebondir. Est-ce vraiment pour des raisons sportives ? On en doute fort. Le rythme auquel avancent les choses n'est guère rassurant et le statut professionnel peine vraiment à se dessiner. La ruée des entraîneurs étrangers et des joueurs évoluant en Europe (dans des clubs de seconde zone) est une mini-satisfaction. On a besoin de personnes ayant bénéficié d'expérience dans des pays où le football est un sport bien structuré avec des statuts de clubs bien définis. L'éthique footballistique demeure en réel danger au moment où l'argent commence à prendre le dessus sur l'aspect sportif. La liquidité est certes un atout important pour la progression et la mise en place de bases pour construire un club solide. Mais la solidité réside aussi dans la prise en charge de ses petits espoirs et les préserver de cette «mentalité de mercenariat» qui constitue une réelle menace pour le sport et ses réelles valeurs. Travailler et cueillir les fruits de sacrifices est une légitimité, être surcoté et ne rien apporter en est une autre. Les mentalités peinent à changer au moment même où beaucoup de choses sont à revoir avant que tout ne s'écroule et qu'on retourne à la case départ, si véritable départ il y a eu.