Photo : M. Hacène Par Hasna Yacoub L'ouverture de l'année judiciaire s'annonce chaude. Les dossiers explosifs de scandales qui ont tenu en haleine les citoyens ces dernières années vont être traités par les magistrats. Il y a, en premier, celle attendue par tout le monde, l'affaire Khalifa, jugée en 2007, par le tribunal criminel de Blida. Le 19 janvier dernier, la Cour suprême s'est prononcée sur les pourvois en cassation introduits par la défense et le ministère public dans cette affaire et a décidé de les accepter. Un procès en appel devra donc être programmé pour les prochains mois. Rappelons à ce sujet que la déclaration du procureur général près la cour de Blida, M. Bacha Boumediène, qui avait dirigé le tribunal criminel près la cour de Blida, rejugera les accusés dans l'affaire El Khalifa Bank sans attendre l'extradition du principal accusé, Abdelmoumène Khalifa et l'affaire sera programmée dès la réception du dossier. Le représentant du ministère public avait également précisé que la cour de Blida n'a pas encore reçu le dossier de l'affaire en question mais aucune priorité et aucune attention particulière ne seront accordées à cette affaire. Elle suivra normalement l'ordre chronologique des affaires. Si le rôle le permet, l'affaire sera programmée pour la prochaine session criminelle. Sinon, celle d'après. Il faut s'attendre, donc, à l'annonce de la date du procès vers la fin du deuxième trimestre de l'année en cours ou durant la session de mars 2013.
Procès Khalifa, l'arbre qui… cache la forêt Rappelons que cinquante-quatre pourvois en cassation ont été introduits par le ministère public et vingt quatre autres par la défense, soit un total de 78 pourvois en cassation acceptés par la Cour suprême. Dix-sept autres accusés se sont désistés de leurs pourvois en cassation. Seront donc concernés par ce nouveau procès, les soixante dix-huit accusés (des 104 personnes jugées en 2007) dont le pourvoi en cassation a été accepté, y compris ceux qui ont purgé leur peine ou ont été relaxés. Les autres accusés qui se sont désistés de leur pourvoi, peuvent considérer leur condamnation comme définitive dans le cas où aucun autre pourvoi (celui introduit par le parquet ou encore celui introduit par le liquidateur de la banque El Khalifa, constitué partie civile) n'a été accepté. Les accusés condamnés définitivement comparaîtront, en tant que témoins, devant le tribunal criminel. L'accusé principal, Abdelmoumène Rafik Khalifa, condamné par contumace à perpétuité par le tribunal criminel près la Cour de Blida, sera, quant à lui, jugé seul dès son extradition et le reste des accusés dans l'affaire comparaîtront, à ce moment-là, en qualité de témoins. C'est le cas également de tous les condamnés par contumace à l'exemple de l'épouse Khalifa ou encore des Keramane. Précisons que l'extradition de Abdelmoumène Khalifa est suspendue au verdict de la Cour suprême (High Court) de Grande-Bretagne qui devra se prononcer sur le pourvoi en cassation introduit devant elle par la défense de Khalifa, après le feu vert accordé par le ministère de l'Intérieur britannique le 28 avril 2010 pour l'extradition de l'auteur du plus grand scandale financier en Algérie ayant causé un préjudice de plus de 7 000 milliards de centimes au Trésor public. Il est à signaler en ce qui concerne cette affaire qu'aucune information n'est donnée sur l'évolution des autres volets du dossier Khalifa (Swift, Khalifa TV, Khalifa Airways et Khalifa Construction). De même qu'aucune information ne filtre sur la procédure entamée contre les personnes bénéficiant du privilège de juridiction et dont la culpabilité a été révélée au cours du procès Khalifa.
Autre scandale, autre procès ? L'arrestation le 15 juillet dernier de celui qu'on désignait comme étant un ami proche de Mohamed Bouricha, ex-wali de Blida, Djamel Boukrid en l'occurrence et qui a été écroué avec son épouse et une autre femme par le juge d'instruction près le tribunal de Blida, va-t-elle relancer l'affaire de l'ex- wali ? Une affaire qui a éclaté en 2005 et qui est encore aujourd'hui en instance de jugement par la Cour suprême. Ce n'est pas certain, même si Boukrid est cité dans l'affaire de surfacturation des vêtements destinés aux enfants démunis, occasionnant un préjudice financier de plus de 20 milliards de centimes à cinq communes de la wilaya de Blida. Il est aussi cité dans l'affaire de la villa de Chenoua-Plage qui appartenait à son épouse et qu'il avait achetée auprès d'elle au prix de 300 millions de centimes mais que les services de réévaluation des impôts de Tipasa imposeront à cette époque à plus de trois milliards de centimes. Djamel Boukrid est cité dans une autre affaire, jugée au tribunal de Blida, pour avoir offert une Mercedes avec de faux documents à l'ex-wali de Blida. Faut-il s'attendre à d'autres révélations de Djamel Boukrid maintenant qu'il est entre les mains de la justice ? Si la justice suit normalement son cours, la décision de la chambre d'accusation près la Cour suprême devra être connue dans les quelques mois à venir afin de l'envoyer devant la juridiction de jugement qu'elle déterminera. Est attendu également le procès de l'affaire Sonatrach dont laquelle est impliquée l'ex- P-dg de Sonatrach, ses deux enfants, l'ex P-dg du CPA, son fils, deux vice-présidents de Sonatrach et un de leurs associés. Cette affaire qui a fait couler beaucoup d'encre et suscite beaucoup d'intérêt laisse courir beaucoup de bruits. D'autres s'interrogent sur l'inculpation de nouvelles personnalités mais il apparaît que le dossier ficelé ne connaîtra pas d'autres interpellations. Certains appréhendent l'enterrement de cette affaire à l'instar de celle de BRC qui n'a pas connu de suite au niveau de la justice. Pour rappel, cette affaire a éclaté au grand jour, à la suite des investigations menées par les officiers judiciaires militaires du Département de renseignement et de sécurité (DRS) et qui concerne des malversations dans les marchés de gré à gré avec deux sociétés : un groupement algéro-allemand de matériel de sécurité et de surveillance pour l'activité transport par canalisation (TRC) et une deuxième société, italienne. Le DRS a décelé des malversations dans l'octroi de marchés à deux bureaux d'études et de consulting et d'installation de matériel de surveillance, dans le cadre de l'activité de transport par canalisation, qui auraient réussi grâce à leurs relations, notamment avec les enfants du P-dg, à avoir un statut de privilégiés. Après les auditions, le juge d'instruction a pris sa décision à l'encontre de l'ensemble des mis en cause en mettant sous mandat de dépôt les deux enfants du P-dg de Sonatrach, l'ancien P-dg du CPA, Hachemi Meghaoui, son fils (propriétaire d'un bureau d'études), un entrepreneur privé, deux vice-présidents de la compagnie, Benamar Zenasni (chargé de l'activité transport par canalisation - TRC) et Belkacem Boumedienne (chargé de l'activité Amont - exploration et production). Le juge a également placé sous contrôle judiciaire sept cadres dirigeants de la compagnie, dont leprésident-directeur général Mohamed Meziane et Chawki Rahal, vice-président chargé de l'activité commercialisation. Plusieurs chefs d'inculpation ont été retenus contre les mis en cause, dont le plus lourd est l'association de malfaiteurs.
Sonatrach, autoroute Est-Ouest, Oultache…et El Para Autre scandale, aussi lourd que celui de Sonatrach, qui a éclaboussé l'image du pays, celui de l'autoroute Est-Ouest. Une affaire qui suscite beaucoup d'interrogations et qui a soulevé l'ire de la défense sur des violations de la loi. La bataille judiciaire relative à l'affaire de l'autoroute Est-Ouest n'a toujours pas pris fin et l'on se demande si cette dernière sera prochainement enrôlée ou si elle prendra encore des années avant de l'être, à l'instar d'autres affaires. Outre les scandales financiers, les tribunaux devront traiter de nombreuses autres affaires comme celle de l'assassinat de l'ex-patron de la Dgsn, Ali Tounsi, ou encore des affaires liées a des détournements, comme celle des laboratoires pharmaceutiques qui sont accusés de surfacturation des importations. Les enquêtes liées aux vols et incendies suspects survenus dans des lieux stratégiques, comme celui qui a ciblé les locaux de l'inspection générale des douanes algériennes, ou encore le feu qui a détruit l'Hôtel des monnaies. Il y aura enfin les affaires liées au terrorisme. Il y a celle des deux complices d'El Para : Gharbia Amara, plus connu sous le pseudonyme El Moukatil Abou Djabel, et Youcef Ben Mohamed, impliqués dans l'enlèvement des touristes étrangers dans le Sud en 2003. Les procès de Abderrazak El Para, détenu à Serkadji, celui de Hassan Hattab en résidence protégée, et des auteurs de l'attentat contre le Palais du Gouvernement et des attentats du 11 décembre 2007, sont également attendus.