Depuis l'avènement du multipartisme, les islamistes algériens ont connu plusieurs crises, scissions et démissions. Chaque échéance électorale voit la naissance d'une nouvelle formation accompagnée d'une volonté d'union jamais réalisée. Cette reproduction des partis islamistes est comparable à celle de la paramécie. Une reproduction asexuée qui s'apparente à une multiplication par division du corps primaire. Cette scissiparité fait réfléchir tous les leaders de la mouvance. Les plus connus comme les moins en vue savent que le stock de voix et de militants est un nombre quasi-figé. La multiplication des sigles et des candidatures ne fait que réduire les pourcentages obtenus par chaque formation. Les élections législatives de mai 2012 ont été un très bel exemple sur la déperdition des voix et des sièges. À 90 jours des échéances locales et leur implication sur le renouvellement du Conseil de la Nation, les islamistes se demandent à quel saint se vouer. Leurs ambitions ont été nourries au sein du «printemps arabe», ils se voyaient première force politique du pays avec un électorat potentiel de 2 millions de voix. Pour se prévaloir de ce creuset électoral, les islamistes savent qu'ils ne doivent présenter qu'une liste par circonscription. Mais les ambitions personnelles l'emportent souvent sur la rationalité et la tactique à mettre en place n'est pas encore établie.L'AAV du MSP, d'Ennahda et d'El Islah ayant reçu une volée de bois vert lors des législatives n'arrive pas à se remettre de la défection de Amar Ghoul et de bon nombre de ses amis. Cette situation la pousse à essayer des tentatives de rapprochement avec le Front du changement de Abdelmadjid Menasra et du énième parti de Abdallah Djaballah, le Front de la justice et du développement (FJD). Les égos des responsables islamistes étant de même grandeur que les ambitions de leurs militants, l'équation «union égale majorité, division équivaut à la disparition», n'arrive pas à les réunir. Aussi, certains pensent-ils à faire des listes autonomes dans certaines circonscriptions et des listes d'union dans d'autres. Les décisions sont repoussées à chaque réunion, comme pour la présence ou non de ministres MSP dans le gouvernement, alors que le parti est censé être dans l'opposition ou pour Ennahda et El islah, de conseillers à la présidence de la République et d'ambassadeurs.La scissiparité des islamistes se complique avec l'apparition d'un objet politique non- identifié dirigé par l'ancien président du groupe parlementaire du MSP et ex-ministre des Travaux publics. La naissance du Taj de Amar Ghoul pourrait être le couronnement de la reproduction des sigles islamistes, comme elle pourrait annoncer une nouvelle orientation dans les alliances de ce courant avec des militants un peu plus pragmatiques et moins conditionnés que leurs aînés. Une alliance, que semble souhaiter Hamlaoui Akkouchi d'El Islah, qui inclurait des partis laïcs à même de constituer un front d'opposition à la majorité actuelle. En attendant la convocation du corps électoral, les dirigeants des partis islamistes semblent hésitants. La participation n'est pas encore tranchée et les appels à «de véritables garanties quant à l'intégrité du déroulement du prochain scrutin» sont lancés au pouvoir. Les électeurs attendront la campagne électorale pour savoir ce que peut un président d'APC ou d'APW. A. E.