Karim Tabou et Amar Ghoul n'ont pas caché leurs intentions de mettre en place de nouvelles structures partisanes. Visiblement, ils ne veulent plus rééditer la malheureuse expérience des redresseurs du FLN qui peinent à changer les choses de l'intérieur. Au risque d'encombrer une scène passablement surchargée. Peuvent-ils se faire entendre ? Allongeront-ils simplement la liste des sigles ? L'option n'a rien d'inédit. Beaucoup de formations politiques sur la scène ont été le fruit de mouvements de dissidence. C'est le cas, notamment du front du changement d'Abdelmadjid Menasra et du Front de l'Algérie nouvelle de Djamel Benabdeslem qui fut un responsable d'El Islah avant de prendre le large. La vie politique en Algérie est riche de ces conflits qui voient les uns brûler ce qu'ils ont adoré hier. Le constat est simple à faire. La plupart des responsables de partis ont été à un moment ou un autre de leur parcours des militants dans d'autres partis. « Cela aurait pu être normal si le processus relevait davantage de la compétition qui peut éventuellement déboucher sur la naissance d'autres partis », estime le professeur Djabi. « Du temps du parti unique, il y avait surtout des mouvances qui avec l'instauration du pluralisme ont éclaté, mais aujourd'hui le contexte est différent et la plupart des tiraillements sont davantage liés à des étroits financiers qu'à des considérations idéologiques », dit-il. On crée toujours un parti comme on créerait une entreprise. « Cela explique par exemple que la plupart des partis disparaissent juste après les élections pour ne réapparaître qu'à la veille d'autres rendez-vous électoraux », conclut-il. Le professeur Amor Saddok de la faculté de droit à l'université d'Alger fait remarquer également à ce propos que « ces soubresauts accompagnent les échéances électorales et traduisent davantage les ambitions contrariés des uns et des autres ». « Elles sont d'un mauvais effet sur les citoyens qui y voient à tort ou raison de l'opportunisme qui se manifeste dans le phénomène du nomadisme politique ». Ce n'est pas totalement l'avis du professeur Smail Maaraf. Pour cet enseignant de l'université d'Alger, « il y a eu une évolution, car auparavant ceux qui claquaient les portes des partis allaient rejoindre d'autres cadres de lutte où se faisaient oublier ». « Maintenant, les dissidents veulent créer de nouveaux partis, mais c'est un pari risqué ». Pour lui, « il est difficile de se faire une place dans la cacophonie qu'est devenue la scène politique et nul n'apporte un nouveau message, de nouvelles idées capables de provoquer un déclic ». On s'accorde sur le fait que les partis ont perdu de leurs attraits et que seules « les luttes sociales peuvent donner naissance à une nouvelle génération et à d'autres formes qui ne seront plus nécessairement le reproduction de vieux schémas ».