Photo : S. Zoheir De notre correspondant à Tlemcen Chawki Feth Allah La medersa Tachfinya, détruite en 1876, les palais d'El Mechouar, en plein centre-ville de Tlemcen, des cimetières et des mosquées sont autant de sites historiques qui ont été défigurés ou transformés, si ce n'est démolis, par le colonialisme français, a indiqué l'archéologue Chenoufi Brahim. La wilaya de Tlemcen a vu une grande partie de son patrimoine détruite par les Français qui n'ont pas hésité à faire de nombreux monuments des casernes et des bureaux pour l'administration coloniale. Concernant El Mechouar -signifiant littéralement «lieu de mouchawara» (consultation)-, qui a bénéficié de grandes subventions pour sa restauration, il est important de noter qu'il s'agit d'un monument imposant. Cette citadelle, qui a été édifiée par Abdelmoumen, illustre guerrier natif de Nedroma et premier chef des Alhmohaves, a joué un rôle important dans la vie des Tlemcéniens aussi bien socialement que culturellement. Sous le règne des Zianides, elle devint l'un des principaux sièges des rois de Tlemcen. C'est en ce lieu que se tenaient les réunions d'Etat. Le roi numide Yaghmoracene entreprit d'ailleurs de grands travaux de restauration et d'embellissement dans la citadelle où il fit construire son palais et ses annexes. Le site d'El Mechouar, construit sur une nappe d'eau, possède une structure unique. Le côté est de la citadelle, qui s'ouvre sur la place, repose sur une colline. La porte d'entrée principale, appelée Bab El Bououde, était probablement un pont-levis enjambant des douves. Ce monument, pendant le long règne des Zianides, a connu une grande expansion et des transformations, et a vu la construction, en plusieurs étapes, d'une variété d'édifices, de dépendances, d'annexes et d'autres bâtisses comme les deux bastions de style zianide à colonnes rondes qui subsistent encore de nos jours. Malgré la destruction de la grande bâtisse et de ses palais ainsi que de l'ensemble des murailles est par les Français, El Mechouar demeure encore imposant et garde toujours des secrets en son sein. Des recherches archéologiques devront être entreprises afin de percer à jour ces secrets, tels les canaux souterrains et les remparts exceptionnellement épais. Signalons qu'une importante découverte a été récemment faite. Lors de travaux de creusement dans le site, les ruines d'un palais royal ont été mises au jour. Les vestiges laissent apparaître de splendides mosaïques ainsi que de petits bassins ornés de marbre en bordure et des tombes très anciennes. Des fouilles plus poussées pourraient certainement apporter de nouvelles révélations. En attendant, les murs d'El Mechouar témoignent déjà de la présence de l'art andalou à travers des fragments de décoration, même si l'ensemble de ses ouvrages intérieurs, d'une valeur remarquable, a disparu, à l'exception de la mosquée avec son minaret. Mais cet ensemble est en train de se reconstruire et ce, malgré les difficultés de tout ordre rencontrées sur le terrain, notamment le respect des styles de construction originels et la disponibilité de matériaux adéquats. En effet, d'énormes chantiers sont en cours pour reconstruire ces lieux, comme c'est le cas d'un palais royal au niveau d'El Mechouar qui a fait l'objet d'une visite de la ministre de la Culture, laquelle a insisté sur l'accélération des travaux pour qu'il soit réceptionné avant la grande manifestation de Tlemcen, capitale de la culture islamique, prévue en 2011. S'agissant de la medersa de la Tachfinya, des rencontres ont été organisées pour examiner les moyens et la possibilité de sa réhabilitation. Chef-d'œuvre des Abdelwahides, dont l'anthropologue Djillali Sari a écrit tout un récit sur le rôle important qu'a joué cette institution que plusieurs savants ont fréquentée, la Tachfiniya pose problème, ou plutôt sa reconstruction. Même si on s'accorde et insiste sur la nécessité de la reconstruction de cette medersa, les observateurs indiquent que cela relève du domaine de l'impossible, car il faudrait dans ce cas raser tout le centre-ville. Aussi les hommes de culture estiment-ils que le seul moyen serait de reconstruire à l'identique la Tachfinya, mais sur un autre site qu'il faudra lui affecter. Ils soulignent à ce propos que ce sera un travail énorme et de longue haleine car devant impliquer de nombreuses spécialistes et disciplines (historiens, archéologues, restaurateurs, architectes, etc.).