Le Haut commissariat à l'amazighité (HCA), 17 ans d'existence, sort de sa réserve et critique sévèrement le ministère de l'Education nationale, censé être son partenaire dans l'introduction de tamazight dans l'enseignement primaire, moyen et secondaire. «Malgré notre entêtement, nous évoluons dans un milieu hostile. Le HCA est abandonné par ses partenaires institutionnels. Nous sommes dans une situation d'impasse depuis au moins 8 ans», a indiqué hier, au forum d'El Moudjahid, Youcef Merahi, secrétaire général du HCA. Selon ce dernier, l'ancien ministre, Boubekeur Benbouzid et ses collaborateurs ont longtemps freiné le travail du HCA en ce qui concerne l'enseignement de cette deuxième langue nationale, son suivi et la réhabilitation de la culture amazighe: «Je dis bien qu'il n'y avait pas de volonté politique de réhabiliter la langue amazighe, mais bien au contraire, empêcher son développement. Tamazight est dans l'impasse tant que le ministère de l'Education nationale ne s'implique pas dans les actions engagées par le HCA visant à trouver des solutions concrètes aux problèmes posés.» Une déclaration qui sonne comme un appel au nouveau ministre, Abdelatif Baba Ahmed, pour revoir le dossier de l'enseignement de tamazight dans une école décriée par tous. Le représentant du HCA reproche notamment à l'ancien ministre, Boubekeur Benbouzid, son refus de rendre l'enseignement de tamazight obligatoire: «Il a dit qu'il ne pouvait pas obliger les parents à inscrire leurs enfants dans les cours de tamazight. Politiquement, c'est grave. Dans aucun pays au monde, un ministère de l'Education nationale ne demande l'autorisation des parents pour l'enseignement d'une langue maternelle.» Aussi, poursuit Youcef Merahi, «c'est ce caractère facultatif qui a fait que l'enseignement de tamazight en Algérie n'évolue pas». Pire encore, l'expérimentation de l'opération: «On est dans l'expérimentation depuis 17 ans et je parie qu'il n'y aura pas de généralisation de cet enseignement avant 20 autres années, tant que le ministère ne s'y engage pas pleinement». D'après un bilan présenté par Cherifa Bilek, sous-directrice de l'enseignement et de la formation, seules 11 wilayas continuent de dispenser l'enseignement de tamazight dans leurs écoles, sur un ensemble de 16 au début de l'opération en 1995/1996, au lendemain de la grève du cartable qui a abouti à la reconnaissance de tamazight comme langue nationale. Cette même opération a démarré avec 233 enseignants pour 37 690 apprenants. Aujourd'hui, les enseignants sont au nombre de 1 330 pour 213 075 apprenants. Sur le plan statistique, la situation est plus au moins bonne mais elle ne concerne que 11 wilayas. Autre remarque, plus de 90% des apprenants se concentrent dans les trois wilayas de Tizi Ouzou, Béjaïa et Bouira. Pas du tout encourageant, selon les représentants du HCA. Et ces derniers de s'élever contre le fait qu'en dehors des deux wilayas d'Alger et de Tizi Ouzou, il n'y a pas d'instituts d'enseignement de la langue et de la culture amazighes. Youcef Merahi regrette, également, la fermeture de l'institut de formation des maîtres et des formateurs de Ben Aknoun en 2010, sans en donner de raisons aux concernés. Tout cela dénote d'une volonté du ministère de l'Education nationale de casser le travail fait jusque-là par le HCA et autres partenaires en matière de réhabilitation de la langue amazighe, accuse-t-il. K. M.