Photo : Riad De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar
Le gouvernement a lancé, ces derniers jours, une audacieuse campagne contre les marchands informels et les camelots qui investissent depuis longtemps les placettes, les jardins publics et les cités populaires à travers tout le pays. À l'origine, l'action de l'Exécutif a été dictée par des considérations liées au cadre de vie du citoyen, la sécurité et l'hygiène du milieu. Sérieusement indisposés, les riverains de ces souks non-autorisés ont vigoureusement réagi en interpellant directement les pouvoirs publics. Des marches ont été organisées pour dénoncer, pêle-mêle, l'insécurité, la débauche, l'insalubrité et le tapage nocturne qui caractérisent ces zones de non-droit, de jour comme de nuit. Faisant du bien-être et de la qualité de vie du citoyen son principal mot d'ordre, le cabinet d'Abdelmalek Sellal, fort d'un extraordinaire appui populaire, décide de s'attaquer à ce triste phénomène qui date de la fin des années 1980. Auparavant, les commerçants légaux ont initié, en vain, plusieurs actions de protestation réclamant l'éradication du «trabendo» qui exerce à leur encontre une concurrence déloyale. Il est à noter que ces activités non déclarées, représentant près de 30% du volume des échanges, nuisent énormément à l'économie réelle en exposant la vie des consommateurs au danger. Ceci pour souligner le poids économique du dossier. Pour la première fois, donc, les forces de sécurité ont été mobilisées pour mettre réellement de l'ordre dans l'espace public. Cette opération, entamée à Alger, est en train de s'étendre progressivement à toutes les wilayas. À Béjaïa, les étalages de fortune, qui enlaidissaient la piétonnière d'accès à l'arrière-port, ont disparu comme par enchantement. La simple présence policière sur les lieux a vraisemblablement suffi pour dissuader les jeunes vendeurs. Le marché hebdomadaire, que tiennent ces mêmes trabendistes à El Khemis, au beau milieu de la ville, reste curieusement suspendu pour la deuxième semaine consécutive. Dans beaucoup de localités de la wilaya, les étalages qui encombrent les trottoirs se sont volatilisés. À ce niveau, même les détenteurs de registres de commerce ont longtemps abusé du laxisme des pouvoirs publics pour exposer leurs marchandises n'importe où et n'importe comment, en squattant préaux et espaces publics adjacents à leurs boutiques. La même réserve est signalée à travers les grandes villes de la wilaya comme Akbou, El Kseur, Kherrata ou Tazmalt. Ce retour progressif à la légalité a manifestement soulagé tout le monde. Et, les commerçants sont les premiers à jubiler. Cependant, on est bien loin de liquider le marché parallèle.Les gros barons du marché noir (importateurs véreux, filières de contrebandiers, contrefacteurs et bandes de cambrioleurs) ont visiblement observé une halte pour laisser passer la tempête. Pour en venir à bout, le gouvernement doit, en deuxième phase, s'attaquer à ces grands pourvoyeurs de la camelote et à leurs complices au sein de l'Administration. Dans son Approche pour résorber le commerce anarchique et informel, l'Etat se doit d'agir efficacement à la base. Evidemment, une simple descente de police ne suffirait pas. Il s'agit d'insérer socialement le maillon le plus faible de la chaîne pour tirer le tapis sous les pieds des gros trafiquants. Il faut «caser» le camelot qui fait prospérer le bazar. Maintenant que les citoyens expriment franchement leur ras-le-bol, il serait moins contraignant de convaincre toutes les parties pour œuvrer de concert dans ce sens. Le plus tôt serait le mieux. Le simple citoyen apprécierait et l'économie nationale se porterait mieux.