La promotion immobilière bat son plein et les autoconstructeurs se comptent par milliers. Il suffit de sillonner le pays pour réaliser de visu le nombre de chantiers en marche ou à l'arrêt. A titre indicatif : près de 500 000 logements et des milliers d'équipements collectifs sont en cours de réalisation. Autant de sites en construction grands demandeurs de matériaux. Viennent s'ajouter à cela les grands projets structuraux lancés par l'Etat, très grands consommateurs de ciment et de rond à béton. Cette forte demande dans ces deux principaux matériaux de construction a été vite prise en charge par des spéculateurs de tout bord. Pour le ciment, il est difficile de croire qu'il existe une tension sur le produit à partir du moment où il existe des potentialités de production nationale. On compte 12 cimenteries publiques et une privée (ACC/Msila). Les agrégats sont aussi concernés par la spéculation du fait du nombre insuffisant de carrières d'exploitation et de la très forte demande. Dérégulation dans le marché du ciment en sac A première vue, la spéculation sur le ciment en vrac, très perceptible aux alentours immédiats des cimenteries du secteur public, n'a pas sa raison d'être si l'on s'en tient aux volumes de production de ces dernières. Selon des entrepreneurs rencontrés au dernier Salon Bâtimatec, qui s'est déroulé dernièrement au palais des expositions des Pins maritimes (Alger), des groupes de personnes ayant pignon au sein des cimenteries étatiques se font livrer des quantités importantes de ciment en sac, pour ne pas dire toute la production, à des fins purement spéculatives. Par contre, des architectes bien au fait de ce qui se passe sur le terrain et également rencontrés au Bâtimatec nous ont expliqué qu'«une insuffisance de la production nationale de ciment en sac ou pour le moins l'équilibre entre l'offre et la demande, favorisent la spéculation sur cet essentiel matériau de la construction». Autres indices avancés par nos interlocuteurs : «les professionnels du bâtiment ne sont généralement pas équipés en installation de stockage de ciment en vrac et, du coup, ils s'approvisionnent uniquement en ciment en sac, que nos cimenteries ne produisent pas en quantité suffisante, privilégiant la clientèle du vrac, dont une partie transforme la quantité achetée en sac moyennant un substantiel bénéfice». Ils signalent aussi que «les constructeurs ont tout intérêt à se doter de moyens de stockage s'ils espèrent ne plus tomber dans les griffes des spéculateurs». Et si rien n'est fait dans ce sens, leur a–t-on demandé ? «Le ciment continuera à être cher et encore plus en été, période de forte demande. Il était vendu, en avril dernier, à 600 DA le sac.» Devant une telle situation de spéculation, le ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme se dit bien décidé à mettre fin à la tension sur le ciment en sac. Il impose aux entrepreneurs de s'équiper en centrales à béton d'un agrément et en silos de stockage de ciment en vrac. En d'autres termes, le ministère ne fait qu'appliquer une disposition contractuelle que laquelle les entrepreneurs se sont engagés à appliquer pour obtenir l'agrément nécessaire à leurs activités. Soulignons, par ailleurs, que ce même département ministériel impute les hausses des prix des matériaux de construction aussi bien ceux fabriqués localement que ceux importés, à deux phénomènes, à savoir la spéculation et l'inflation importée, sur lesquels l'Etat n'aucune emprise. Matériaux de construction importés de plus en plus chers Tous les pays producteurs de matériaux de construction et dont nous sommes grands tributaires ont revu à la hausse leurs prix de vente. Ce qui paraît tout à fait logique dans la mesure où l'inflation mondiale n'a épargné aucun secteur d'activité industrielle. Selon des analystes, il faut s'attendre à ce que cette augmentation des coûts des matériaux importés perdure et, par voie de conséquence, le prix du bâti construit va suivre cette ascension. Les constructeurs et les demandeurs de logements ensemble seront contraints de subir. A moyen terme, la solution viendrait en partie de la création d'une industrie suffisamment diversifiée et performante. Un objectif tout à fait prioritaire dans la mesure où il est bon de rappeler que 45% des matériaux nécessaires à la construction d'un logement proviennent de l'étranger. L'entrée en production par exemple d'unité de fer à béton s'inscrit bien dans cette dernière démarche. Et, du coup, nous allons importer de moins en moins ce produit. Des techniques de construction obsolètes C'est là un constat indéniable. On continue sur les chantiers de travailler avec des moyens tout à fait rudimentaires. Nombre de nos entrepreneurs s'en contentent. Dans la profession, la mécanisation et l'outillage utile ne sont pas à l'ordre du jour. On continue à préparer le béton manuellement et à user de la force des bras, par poulie interposée, pour faire monter à l'étage supérieur, briques, ourdis et le mortier. Du côté du coffrage, c'est aussi la règle. C'est dire toute la perte de temps et la mauvaise rentabilisation du bois de coffrage qui servira tout au plus à trois petits chantiers. En somme, on est encore loin de l'usage de nouvelles techniques de construction. C'est comme si certains de nos entrepreneurs du secteur du bâtiment faisaient la sourde oreille à tout ce qui touche la modernité de leurs activités. Pour quelques architectes, «c'est un entêtement à ne pas vouloir chercher à réduire le temps de réalisation en usant d'outillages modernes et à diminuer les frais inhérents à la mauvaise organisation du travail». En d'autres termes, les procédés de construction en vigueur sont à la fois à l'origine de la mauvaise qualité du bâti et du coût élevé du prix de revient –plus l'exécution est longue, plus l'entrepreneur cherchera à se rattraper en ajoutant des zéros au prix de revient. Il s'agit donc, aujourd'hui, de convaincre les entrepreneurs de s'investir beaucoup plus dans la modernisation de leurs outils de travail et d'user de matériaux modernes, seul moyen de réduire le coût du mètre carré bâti. Ils peuvent, en effet, avoir un aperçu de l'intérêt de moderniser leur profession en visitant le Salon du bâtiment et des techniques de construction qui expose chaque année les dernières techniques dans le domaine. Celles-ci mises en exécution et généralisées ne peuvent qu'avoir des effets positifs immédiats : diminution du temps de réalisation et du prix de revient de la construction. Des facteurs qui peuvent contribuer à revoir à la baisse les coûts finaux des logements qui sont actuellement hors de portée des salariés. Z. A.