Le discours prononc� par Fran�ois Hollande, jeudi 20 d�cembre, au palais des Nations devant les deux chambres du Parlement marquera certainement l�histoire : pour la premi�re fois depuis l�ind�pendance, la France, par la voix de son pr�sident, condamne formellement, en des termes clairs, la colonisation. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - �L�histoire, m�me quand elle est tragique, m�me quand elle est douloureuse pour nos deux pays, elle doit �tre dite. Et la v�rit�, je vais la dire ici, devant vous. Pendant 132 ans, l�Alg�rie a �t� soumise � un syst�me profond�ment injuste et brutal, ce syst�me a un nom, c�est la colonisation.� Fran�ois Hollande, qui se savait particuli�rement attendu sur ce point si sensible, en Alg�rie mais surtout en France, ira en tout cas plus loin comme aucun de ses pr�d�cesseurs, Chirac compris, n�a eu le courage politique de faire. �Et je reconnais ici les souffrances que la colonisation a inflig�es au peuple alg�rien. Parmi ces souffrances, il y a eu les massacres de S�tif, Guelma et Kherrata, qui, je sais, demeurent ancr�s dans la conscience des Alg�riens, mais aussi des Fran�ais. Parce qu�� S�tif, le 8 Mai 1945, le jour m�me o� le monde triomphait de la barbarie, la France manquait � ses valeurs universelles. � Le pr�sident fran�ais ne s�arr�tera pas l�. �La v�rit�, encha�nera-t-il encore, elle doit �tre dite aussi sur les circonstances dans lesquelles l�Alg�rie s�est d�livr�e du syst�me colonial, sur cette guerre qui, longtemps, n�a pas dit son nom en France, la guerre d�Alg�rie.� Chaque mot est bien pes� et, d�ailleurs, il faut pr�ciser � ce propos que ce n�est qu�en 1999, sous Chirac, que la France adoptait une loi pour reconna�tre �les �v�nements d�Alg�rie�, ou �les op�rations militaires en Alg�rie� comme �tant �la guerre d�Alg�rie�. Or, Hollande reconna�tra officiellement ce jeudi � Alger que, �Voil�, nous avons le respect de la m�moire, de toutes les m�moires. Nous avons ce devoir de v�rit� sur la violence, sur les injustices, sur les massacres, sur la torture�. L�invit� des parlementaires alg�riens, qui conna�t parfaitement la sensibilit� de ses h�tes pour avoir s�journ� en Alg�rie durant presque une ann�e en 1978, prend le plus grand soin d��viter de prononcer les mots �harkis� et �pieds-noirs�. Deux cat�gories qu�il �voquera en seulement des termes allusifs. Comme lorsqu�il insistera sur �le respect de toutes les m�moires� ou quand il dira qu��il est n�cessaire que les historiens aient acc�s aux archives, et qu�une coop�ration dans ce domaine puisse �tre engag�e, poursuivie, et que progressivement, cette v�rit� puisse �tre connue de tous�. Fran�ois Hollande qui, depuis sa venue � Alger, mercredi dernier, ne cessait de plaider pour l��volution vers �un nouvel �ge� dans les rapports entre les deux pays, suscitera �galement bien des r�actions violentes dans les milieux de la droite par cette phrase lourde de sens : �Ma visite vient dans un moment charg� de sens et de symboles, il y a cinquante ans, l�Alg�rie acc�dait � l�ind�pendance, elle s�arrachait � la France, apr�s une guerre longue de huit ans.� C�est donc que l�Alg�rie a arrach� son ind�pendance. Cinquante ans apr�s, cette �vidence n�est pourtant pas admise par les nostalgiques de �l�Alg�rie fran�aise �, encore nombreux et si actifs dans l�Hexagone. �Sommes-nous capables d��crire ensemble une nouvelle page d�histoire ?� s�interroge d�ailleurs Hollande qui r�pond aussit�t : �Je le crois. Je le souhaite. Je le veux.� De par l�ampleur de la d�l�gation qui l�accompagnait � Alger, la plus importante de tous ses voyages � l��tranger depuis son �lection, le nombre d�accords et leur importance conclus � l�occasion, mais surtout le discours de Fran�ois Hollande sont, en effet, en nette rupture avec ce que la France officielle nous a habitu�s jusque-l�. A chacune de ses interventions par exemple, le pr�sident fran�ais tenait � rappeler les souffrances endur�es par le peuple alg�rien durant les ann�es de terrorisme. Au palais des Nations, il dira par exemple : �Nous connaissons les m�mes menaces : le terrorisme, et vous, vous savez ce qu�est le terrorisme. � Il recadre nettement la position que la France d�fendait jusqu�� mai 2012 lorsqu�il ajoute : �Le monde est en plein changement. Parfois, ils vont dans le bon sens, parfois dans le pire. Mais il y a eu des peuples qui se sont soulev�s contre la dictature, des r�volutions ont apport� l�espoir mais aussi, reconnaissons-le, soulev� des inqui�tudes.� Puis, cette phrase extr�mement importante : �Chaque pays doit trouver sa propre voie et vous l�avez montr�e. Il ne peut y avoir de r�ponse unique aux aspirations des citoyens, mais la le�on de ce qu�on a appel� le printemps arabe, c�est que de toutes les mani�res, et partout dans le monde, les peuples entendent prendre en main leur destin. Alors, le r�le de la France, celui de l�Alg�rie, c�est de les accompagner dans la voie de l�ouverture, de la d�mocratie, de la libert�.� Autrement dit, Bouteflika vient d�avoir le quitus de la communaut� internationale�