Photo : S. Zoheir Par Wafia Sifouane Prévu pour le 6 février prochain, l'exposition «Des ksour à la casbah» se tiendra au Centre culturel algérien (CCA) de Paris. Cette exposition est consacrée au travail d'un homme amoureux des cités algériennes et détenteur de leurs secrets : hommage à l'architecte algérien Kaci Mahrour (1944-2004). À partir du fond iconographique et des recherches de l'architecte, l'exposition aborde à la fois les cités du sud et du nord, avec l'idée qu'une unité architecturale et philosophique existe et qu'elle identifie l'art d'habiter en Algérie. L'habitat algérien est généralement connu à travers le regard des historiens, architectes ou administrateurs occidentaux, mais peu à travers celui des spécialistes nationaux ou des habitants eux-mêmes. Cette dissymétrie est le fait d'une histoire complexe qu'il est urgent de pallier en donnant aux chercheurs algériens un espace d'expression et une certaine visibilité leur permettant de partager, avec les initiés et les profanes, les nouvelles clés de lecture de l'espace habité algérien. Architecte-urbaniste, Kaci Mahrour était aussi expert auprès des tribunaux et professeur à l'Ecole polytechnique d'architecture et d'urbanisme d'Alger et à l'Institut national du patrimoine de Tunis. Il était également spécialiste en morphogenèse urbaine. Il a mené de nombreux travaux sur l'ensemble des villes du nord algérien (Alger, Boufarik, Dellys, Constantine, Sétif, la Kabylie) ainsi que sur les ksour du sud algérien (Djanet, Adrar, Timimoun, Beni Abbès, Taghit, Ghardaïa, Tamentit). Il a étendu ses recherches à la Tunisie, notamment à Tunis, Sidi Bou Saïd, Nabeul, Tozeur, Sousse et à El Djem En tant que consultant expert patrimoine Unesco, il a réalisé et suivi des chantiers dans le projet d'ampliation de la bibliothèque des Manuscrits, à Chinguetti (Mauritanie), et géré le projet de restauration du ksar d'Aghled, dans le sud algérien. Kaci Mahrour était également architecte-urbaniste délégué régional. L'originalité de son regard tient principalement à sa démarche «d'homme de terrain» où il met en place une analyse architecturale et urbaine fondée sur le travail de relevé systématique des espaces de vie, la connaissance topographique des lieux et la genèse des centres urbains algériens. L'architecture algérienne n'est pas qu'une expression artistique d'un art de vivre, elle est avant tout une réponse technique aux contraintes morphologiques et climatiques du lieu. En effet, le Wast-eddar (patio), la Stah (terrasse), le Minzah (belvédère) ne sont pas remarquables pour leurs seules qualités esthétiques, ces espaces sont avant tout des réponses techniques et architecturales de générations de maîtres maçons, qui ont dû dépasser les contraintes des sites habités. Le wast-eddar, par exemple, est une réponse à l'exigence «d'égalité foncière» dans la Casbah alors que les terrasses sont une manière de respecter le droit de tous à la lumière. Ainsi, c'est en relevant et analysant les éléments topographiques, techniques et climatiques que Kaci Mahrour est parvenu à construire une nouvelle lecture de l'habitat algérien.