Photo : S. Zoheir De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani
Les 469 Exploitations agricoles collectives (EAC) et les Exploitations agricoles individuelles (EAI) à Annaba qui représentent plus de 50% de la surface agricole utile (SAU) et dont la superficie s'étend sur 48 177 hectares, confiées à des groupes d'agriculteurs ou à des individus et exploitées sur la base d'un acte administratif accordant à ces personnes un droit de jouissance, dont la durée n'est pas fixée, ont constitué pendant des années un frein à l'essor du secteur malgré les subventions et les soutiens injectés par les pouvoirs publics. En effet, si, au début, ces EAC et EAI ont quelque peu participé au développement de l'agriculture, ne serait-ce que par une forme quelconque de production céréalière ou maraichère, elles ont presque toutes abandonné le travail de la terre pour verser dans d'autres activités. Certaines ont continué pourtant à exploiter ces domaines mais, confrontées à des problèmes d'équipement ou de financement, elles ont, elles aussi, cessé de produire. Détournements, sous-location des terres, mise en jachère, abandon ont fait de ces EAC et EAI un moyen de gagner beaucoup d'argent sans se fatiguer, une sorte de commerce encadré par une réglementation qui n'a pas prévu ces comportements de la part des bénéficiaires puisqu'étant, à l'origine, des agriculteurs. Les bénéficiaires, dont la plupart ont changé d'activité, tout en conservant leurs droits sur ces terres fertiles, les sous-louent à des particuliers qui les exploitent et produisent, sans pour autant profiter des dispositions du Fonds national de développement et régulation agricoles (Fndra) qui accorde des avantages et des subventions, parce que n'ayant ni acte de propriété ni acte administratif qui leur donne le droit d'en jouir. Ce sont les bénéficiaires qui profitent de cette batterie de mesures en faisant valoir leurs droits pour acquérir les semences et les différents fertilisants auprès des Coopératives des céréales et légumes secs (Ccls) à des prix subventionnés. Semences et fertilisants qu'ils revendent au prix fort sur le marché parallèle et parfois aux exploitants de ces mêmes EAC et EAI. Une situation absurde qui porte préjudice à tout le secteur de l'agriculture.
Enquêtes de la DSA Cette situation avait amené la direction des services agricoles de la wilaya d'Annaba à s'intéresser de près à ce phénomène, en procédant à des enquêtes au niveau de ces entités pour découvrir qu'effectivement certaines d'entre elles avaient été détournées de leur vocation, abandonnées pour des problèmes de scission interne, de cumul de fonction ou encore sous-louées. Des procès avaient été intentés contre ces EAC/EAI mais, avec les lenteurs de la justice, la déchéance judiciaire prend en moyenne 4 à 6 ans si, dans le meilleur des cas, la justice rend son verdict en faveur de l'Etat, représenté par la DSA.
La loi d'orientation agricole La promulgation de la loi d'orientation agricole (08/16 du 3 août 2008) avec son corollaire la création de l'Office national des terres agricoles (Onta) en 1996, est venue mettre fin à cet état de déliquescence dramatique du foncier agricole. Les prérogatives de cet office ont pour finalité la gestion de ces terres affectées aux EAC/EAI, le contrôle de leur exploitation ainsi que le respect de la réglementation en vigueur régissant le foncier agricole. Le nouveau projet de loi portant réorganisation des exploitations agricoles collectives (EAC) et individuelles (EAI) vise, entre autres, à remplacer le droit de jouissance accordé aux bénéficiaires par une concession limitée dans le temps et qui est d'une durée de 40 ans. A Annaba, ce sont 2 346 dossiers de postulants au dispositif de concession des terres agricoles publiques qui ont été déposés au niveau de l'antenne locale de l'Office national des terres agricoles (Onta) qui, il faut le signaler, n'a pas chômé ces derniers temps. En effet, jusqu'au mois de décembre de l'année écoulée, l'opération conversion du droit de jouissance en droit de concession a donné lieu à la rédaction de 1 460 actes de propriété, sur les 2 153 dossiers étudiés, validés et transmis au service des domaines. Il reste cependant 96 postulants qui ont été mis en demeure de compléter leurs dossiers dans les plus brefs délais sous peine de rejet. Ces actes remis à leurs bénéficiaires permettront l'accès aux crédits bancaires sans aucune difficulté ou contrainte, de sorte que l'exploitant n'aura plus à se démener comme par le passé pour le financement de la campagne labours-semailles, pour toutes autres cultures maraichères ou arboricole. Ce qui est sûr c'est qu'avec ce nouveau dispositif mis en place et contrôlé par l'Onta, le secteur agricole connaîtra une véritable renaissance et les différents soutiens et financements accordés par le ministère de l'Agriculture iront bien aux véritables agriculteurs, exploitants réels des terres et qui pourront de la sorte se consacrer exclusivement à leur profession, contribuant ainsi à l'essor de ce secteur maintes fois malmené et qui a été l'objet de bien des détournements et des trafics de toutes sortes.