La communauté internationale exprime une extrême inquiétude au sujet du financement du terrorisme, notamment la question du paiement de rançon contre la libération d'otages. Cette pratique, qui a contribué au renflouement des caisses des organisations terroristes opérant dans le Sahel, la Somalie et le Yémen, à hauteur de 120 millions de dollars au cours des 8 dernières années, selon les chiffres fournis par les spécialistes de la lutte antiterroriste, est dans le viseur de plusieurs Etats membres de l'ONU et organisations régionales. Ces derniers, soucieux de tarir cette source de financement, ont appelé au refus de paiements de rançons qui servent à renforcer les capacités de nuisance des terroristes grâce aux achats d'armes. Les Etats-Unis qui ont fixé au rang de priorité nationale la lutte contre le terrorisme international, ont, dans ce cadre, réitéré leur appel à la communauté internationale à s'abstenir de verser toute rançon aux groupes terroristes contre la libération d'otages, tout en relevant l'importance de mettre fin à cette «tactique particulière» comme source de financement du terrorisme. Ils ont rejoint la position doctrinale de l'Algérie qui consiste à rejeter catégoriquement le paiement de rançon. Cet appel a été lancé par la porte-parole du département d'Etat, Mme Victoria Nuland, qui a été interrogée sur les déclarations faites par l'ex-ambassadrice américaine au Mali, Vicki Huddleston, selon lesquelles la France aurait versé des millions de dollars pour obtenir la libération de ses otages au Sahel. Pour Mme Nuland, «l'inquiétude de l'ambassadrice Huddleston reflète une préoccupation que nous partageons au sujet d'Aqmi et d'autres groupes qui utilisent les otages comme source principale de financement». A ce propos, elle a fait savoir que les Etats-Unis «continuent à encourager tous leurs partenaires et alliés de la communauté internationale à refuser absolument de coopérer avec les preneurs d'otages et à avoir une politique de tolérance zéro dans le cadre de cet effort». Sinon, a clairement prévenu la porte-parole du département d'Etat, «nous ne faisons qu'alimenter les coffres des terroristes». Mme Nuland a aussi précisé que ce sujet faisait l'objet «de discussions continues avec les alliés et les partenaires des Etats-Unis quant à l'importance de tarir cette tactique particulière et cette technique comme source de financement du terrorisme». Elle a souligné qu'elle refusait de citer un pays particulier mais a précisé subtilement: «Aqmi continue à essayer de soutirer les rançons et nous croyons qu'il a trop souvent réussi à les obtenir». Outre le coordonnateur américain de la lutte antiterroriste, M. Daniel Benjamin, le sous-secrétaire américain au Trésor pour la lutte contre le financement du terrorisme, M. David Cohen, a appelé, à plusieurs reprises, à l'urgence de briser ce qu'il appelle le «cercle vicieux» des enlèvements contre rançon, considérant cette pratique comme «la plus grande menace». A cet effet, il avait effectué, il y a quelques mois, une tournée en Europe où il s'était réuni avec plusieurs hauts responsables en France, en Allemagne, en Italie et au Royaume-Uni, dans le but de développer une approche unifiée face à cette forme de financement du terrorisme. Face aux responsables européens, M. Cohen avait alors affirmé que si la communauté internationale a, certes, obtenu des succès pour contrecarrer les méthodes traditionnelles de financement du terrorisme et affaiblir la capacité d'Al-Qaïda dans la collecte de fonds, «ses groupes affiliés au Sahel et au Yémen font mieux financièrement, en levant d'énormes sommes d'argent à travers les enlèvements contre rançon». Selon les chiffres qu'il avait avancés, les organisations terroristes auraient collecté plus de 120 millions de dollars en paiements de rançons au cours des 8 dernières années, observant qu'Aqmi est la branche d'Al-Qaïda qui a profité le plus des enlèvements contre rançon, en récoltant des dizaines de millions de dollars. Constatant, avec inquiétude, l'augmentation continue des montants des rançons exigées, le patron américain de la lutte contre le financement du terrorisme a précisé que le montant moyen d'une rançon par otage payée à Aqmi est passé de 4,5 millions de dollars, en 2010, à 5,4 millions de dollars en 2011. L'autre fait important relevé par ce haut responsable américain, est que les preneurs d'otages font, généralement, la distinction entre les gouvernements qui acceptent de verser des rançons et ceux qui refusent de s'y plier, constatant qu'Aqmi cible principalement les Européens du fait, a-t-il dit, que des gouvernements européens payent les rançons demandées. Pour rappel, l'Assemblée générale de l'ONU avait adopté, en décembre dernier, une résolution dans laquelle elle a exhorté les Etats membres de s'abstenir de financer ou de soutenir les activités terroristes. Les dirigeants de pays islamiques, membres de l'OCI, pour leur part, ont également exprimé leur inquiétude face à ce phénomène, précisant que le paiement de rançon aux groupes terroristes constituait une «des sources principales» de financement du terrorisme. Ils ont appelé, à cet effet, les pays membres de l'organisation islamique à collaborer et à refuser tout paiement de rançon. A. R.