A la veille du dixième anniversaire de l'invasion du pays par les Américains l'Irak est un pays meurtri, ensanglanté, fragilisé. Au moins 50 personnes ont été tuées hier lors d'une série d'attentats. La situation hautement instable a poussé le gouvernement à reporter, dans deux provinces, majoritairement sunnites, de «six mois au maximum» les élections provinciales prévues le 20 avril. Ninive et al-Anbar sont justement le théâtre, depuis fin décembre, de manifestations qui réunissent chaque vendredi plusieurs milliers de sunnites furieux de la «marginalisation» dont ils s'estiment victimes de la part du gouvernement du chiite Nouri al-Maliki. Les attaques pour la plupart perpétrées au moyen de voitures piégées, ont blessé 171 personnes. Mais en Irak les bilans des tueries ne sont que provisoires. Hier c'était la journée la plus sanglante depuis le 9 septembre dernier, où 76 personnes avaient péri dans des violences. Le cycle de la violence est devenu une seconde nature dans la capitale irakienne. «Dès que les détonations ont résonné dans la capitale, la police et l'armée, dont les barrages sont érigés un peu partout dans Baghdad, ont renforcé leurs contrôles.» Au total, quinze voitures piégées, un attentat commis à l'aide d'un engin improvisé et plusieurs assassinats ciblés ont ensanglanté le pays, rapportent les dépêches d'agences. Nul n'est épargné par la folie meurtrière. Les quartiers de Sadr City, Machtal, Zafraniya, Baghdad Jadida, Kadhimiya, Chouala, Saïdiya et Mansour, mais aussi la ville d'Iskandariya, à 50 km au sud de la capitale, ont été touchés. L'Irak semble être devenu un Etat failli après le passage des GI's, dont les responsables, politiques et militaires, disaient être la pour ramener la «liberté» et la «démocratie» à un peuple souffrant sous l'autoritarisme de Saddam Hussein. Cette dernière vague d'attentats n'a pas été revendiquée, mais les groupes insurgés, dont Al Qaïda en Irak, s'en prennent régulièrement à la population, à la police et à l'armée, dans l'objectif probablement de déstabiliser le gouvernement du Premier ministre Nouri al-Maliki. La violence est bien au rendez-vous, alors que l'Irak s'apprête à marquer dans la plus grande discrétion le dixième anniversaire de son invasion par les chars américains et britanniques. La semaine dernière, 87 personnes ont péri dans des attentats. Jeudi dernier, des hommes armés sont parvenus à mener une attaque spectaculaire contre le ministère de la Justice, en plein centre de Baghdad. L'explosion de trois voitures piégées et l'assaut contre le bâtiment ont fait 30 morts. Les violences continuent à ensanglanter l'Irak de façon quotidienne. C'est le seul legs «stable» laissé par les Américains après leur retrait du pays. Selon un nouveau rapport publié par l'ONG Iraq Body Count, basée en Grande-Bretagne, au moins 112 000 civils ont été tués depuis le début de l'invasion, le 20 mars 2003. M.B./Agences