Le ministre britannique des Finances, George Osborne, a annoncé, hier, une division par deux de la prévision de croissance officielle pour cette année et, faute de marges de manœuvre budgétaire, il s'est tourné vers la Banque d'Angleterre, incitée à faire davantage pour soutenir l'économie. Présentant au Parlement le projet de budget pour l'exercice 2013-2014, qui débutera le 1er avril, le chancelier de l'Echiquier a expliqué que la banque centrale conserverait un objectif d'inflation de 2% par an, mais que celui-ci était insuffisant. «Comme nous l'avons constaté ces cinq dernières années, une inflation basse et stable est une condition nécessaire mais pas suffisante de la prospérité», a-t-il dit dans un discours régulièrement ponctué par les huées de l'opposition. Le mandat de la Banque d'Angleterre (BoE) sera donc modifié pour qu'y figure l'éventualité d'un recours à «des instruments monétaires non-conventionnels pour soutenir l'économie». La BoE a consacré 375 milliards de livres (320 milliards d'euros) ces dernières années à l'achat d'emprunts d'Etat pour favoriser le crédit, une politique d'«assouplissement quantitatif» (QE) qui l'a faite sortir de ses attributions habituelles. La modification du mandat annoncée, hier, obligera aussi l'institut d'émission à s'expliquer plus clairement sur ses prévisions d'évolution de l'inflation. Cette évolution pourrait rapprocher son mode de fonctionnement de celui de la Réserve fédérale américaine, devenue ces dernières années beaucoup plus explicite sur la durée prévue du maintien de ses mesures de soutien à l'économie. Elle coïncide pratiquement avec l'arrivée, prévue en juillet prochain, d'un nouveau gouverneur à la tête de la banque centrale en la personne de Mark Carney, qui dirige actuellement la Banque du Canada. George Osborne a annoncé que la croissance britannique ne devrait pas dépasser 0,6% cette année, moitié moins qu'attendu il y a encore trois mois, mais il s'est engagé à poursuivre sa politique d'austérité budgétaire. «Cela prend plus longtemps qu'espéré mais nous devons nous maintenir sur la bonne voie», a-t-il plaidé. L'Office for Budget Responsibility (OBR), l'organisme indépendant chargé d'établir les prévisions servant de socle au budget, s'attend à une progression de 1,8% du produit intérieur brut (PIB) en 2014, a poursuivi le ministre. Il a noté que, même ralentie, la croissance du Royaume-Uni devrait dépasser celle de la France et de l'Allemagne cette année et l'an prochain. Il a assuré que Londres restait en mesure de ramener ses finances publiques à l'équilibre d'ici cinq ans. Le déficit budgétaire devrait revenir à 6,8% du PIB sur l'exercice 2013-2014 après 7,4% en 2012-2013 selon l'OBR. En revanche, le gouvernement de David Cameron s'est résolu à repousser une nouvelle fois d'un an l'objectif de stabilisation du ratio dette/PIB, qui devrait bientôt dépasser 80%. En dépit de leur chute dans les sondages d'opinion, David Cameron et George Osborne ont choisi de tenir le cap de l'austérité dans l'espoir qu'une reprise de l'économie leur permette d'en tirer les bénéfices lors des élections prévues en 2015. Cette position n'a pas été remise en cause par la décision prise le mois dernier par l'agence Moody's de priver Londres de la note suprême «triple A». Moody's a estimé, hier, que le budget et les nouvelles prévisions de l'OBR ne devraient pas remettre en cause la perspective «stable» de sa nouvelle note Aa1. Les deux autres grandes agences, Standard & Poor's et Fitch, notent toujours le Royaume-Uni AAA, mais avec une perspective négative. Le budget présenté, hier, prévoit néanmoins plusieurs mesures d'allégement de la fiscalité : le taux de l'impôt sur les sociétés devrait ainsi être ramené à 20% en 2015, contre 23% aujourd'hui, et les cotisations sociales réduites. Pour les particuliers, le gouvernement prévoit de porter le seuil d'imposition sur le revenu à 10 000 livres à partir de l'an prochain, soit un an plus tôt que prévu initialement, contre un peu plus de 8 000 livres actuellement. George Osborne a aussi annoncé l'abandon du mécanisme d'indexation automatique de la taxe sur la bière, le «beer tax escalator», qui s'est traduit par une envolée de 42% de cette taxe en cinq ans. Il a également dévoilé un nouveau mécanisme d'aide à l'accession à la propriété destiné à relancer un secteur immobilier en pleine déprime que le gouvernement perçoit comme un élément clé de la relance de l'économie. Reuters