De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Aujourd'hui, au moins 15 affaires de la session criminelle seront différées à des dates ultérieures… La cause en est que les salles d'audiences près la cour de Constantine seront sans échos de défense en raison du boycott annoncé par les robes noires. Cette décision intervient en marge de l'adoption des bilans moral et financier du bâtonnat de Constantine lors de la tenue de l'assemblée générale ordinaire, jeudi dernier, à l'UP. Ce débrayage illimité, selon le bâtonnier M. Lemnouar, touchera le tribunal correctionnel de Ziadia (délits) et les sessions criminelles enrôlées à la cour. Par ce mouvement de protestation «contre les mauvais comportements et traitements qui leur sont réservés pendant leur travail, au moins 900 avocats exerçant à Constantine s'abstiendront -jusqu'à la résolution de leurs revendications d'ordre professionnel- de faire la plaidoirie de leurs clients et se consacrent à la protection de leurs droits pour mieux assurer la défense de ces derniers», explique le président du syndicat, et d'ajouter : «Nous ne comptons pas rependre du service tant qu'une oreille attentive ne se consacre pas à mettre fin aux différents agissements dans les salles d'audiences». Toutefois, le conférencier n'entend pas pour l'heure élargir son mouvement à d'autres bâtonnats régionaux. «Je veux que le problème qui lie notre profession au tribunal de Ziadia soit réglé à Constantine. Inutile d'amplifier une revendication nécessitant un traitement local», suggère-t-il aux membres qui ont manifestement fait pression pour accrocher leurs robes. En fait, la cause qui a poussé le bouchon trop loin dans cette affaire est liée à l'expulsion, le mois dernier, de la salle d'audiences du tribunal de Ziadia, d'un avocat qui contestait la décision du juge ayant autorisé une interprète à se vêtir de la robe noire dans le jugement d'un étranger. Le magistrat avait recouru à la force publique. Tandis que les esprits se sont calmés après l'intervention du conseil de l'ordre, 25 avocats seront interpellés par le procureur pour être auditionnés à la suite des doléances de citoyens. Cette dernière «infraction» étant de trop pour la corporation, estime M. Lemnouar qui veut, d'une part, «défendre son corps jusqu'au bout» et, de l'autre, fustiger quelques avocats dont le souci n'a rien à voir avec la profession. «Je plaiderai la cause d'un avocat honnête. Il faut savoir que 80% de nos problèmes sont générés par le bâtonnat.» Ne voulant incriminer personne parmi les hauts responsables, le bâtonnier cherche par dessus tout «une considération exemplaire pour ses pairs qui, eux, devraient pour leur part sortir de la banalisation de la fonction». D'autres points ont été soulevés pendant ce conclave, ayant trait notamment à la cessation des stages près la cour depuis 2004 et ce, en raison de l'exiguïté des lieux, et au temps imparti à la défense jugé trop court. Par ailleurs, en présentant le bilan financier, il ressort que le bâtonnat dispose de 4 milliards 300 millions de centimes, «une tirelire» que le syndicat voudrait mettre à profit en érigeant un club à l'alliance. Soulignons enfin que l'AG a regroupé les régions de Jijel, Mila et Skikda dont les cours dépendent territorialement de la région de Constantine, soit une corporation globale avoisinant les 1 700 avocats. Enfin, il faut savoir que le boycott samedi dernier des salles d'audiences avait été bénéfique à près de 90% des accusés pour les «petits délits», fera remarquer l'assemblée. Un magistrat avait certifié à un accusé : «Vous voyez, c'est à nous que revient le dernier mot.»